On craignait le pire. A Alger, on disait : le cinéma se meurt. La machine de production ne fonctionne plus. La distribution est au point mort. Sur les écrans qui restent, c'est du déjà vu. Mais, soudain, le cinéma en voie de disparition revient avec la visite-éclair d'un grand cinéaste américain et l'annonce de la tenue d'un festival de «films engagés». Fiasco ou réussite, ce festival ? On verra bien. L'événement de taille, c'est la présence d'Oliver Stone. 24 heures à Alger, sans même pourtant montrer son film South Of The Border, prévu pour être le clou des projections prévues à la Cinémathèque d'Alger. South Of The Border, montré à la Mostra de Venise, au Festival de Toronto, et tout récemment au Festival de Bombay, est un film documentaire, un contre-pied, une contre-information sur l'Amérique latine. Les médias américains ne disent jamais la vérité sur l'Amérique latine. C'est toujours le regard des Américains du Nord sur l'Amérique latine. Oliver Stone a voulu donner la parole aux grands dirigeants de l'Amérique latine pour que le peuple américain, gâvé de fausses informations, entende ce que les Latinos ont à dire sur leurs pays. Au cours de l'hiver 2007, Hugo Chavez, président du Vénézuéla, a invité Oliver Stone au moment même où il tentait vainement de faire libérer les otages des Farc colombiennes. Oliver Stone a gardé de ce voyage une grande amitié pour Hugo Chavez parce qu'il s'est aperçu qu'il n'était pas du tout l'homme sur qui les médias des Etats-Unis répandaient tant de fausses nouvelles, tant de méchancetés. Il était une fois l'amérique... du sud Au mois de janvier 2009, Oliver Stone est reparti avec son équipe à Caracas pour interviewer Hugo Chavez. Et de fil en aiguille, encouragé par le leader vénézuélien, il s'est retrouvé embarqué dans un vaste projet, qui deviendra South Of The Border, un voyage à travers l'Amérique latine pour parler de la «révolution silencieuse» en cours : comment resserrer les liens régionnaux, contrôler leurs propres richesses nationales, rechercher une politique commune face aux Etats-Unis et à la Banque mondiale. Ce périple a conduit Oliver Stone à tendre son micro à Lula Da Silva (Brésil), Evo Morales (Bolivie), Kristina Kichner et son mari, l'ex-président Nestor Kichner (Argentine), Fernando Lugo (Paraguay), Rafael Correa (Equateur), et Raoul Casto (Cuba). Un documentaire sans précédent, South Of The Border éclaire de manière neuve, très saisissante, la situation en Amérique latine et les transformations qui s'y opèrent, tout en répondant aux falsifications des médias américains quand ils parlent de Chavez ou de Castro. Oliver Stone montre bien que les nouvelles, souvent dramatiques, lancées sur CNN ou dans les pages du New York Times, sont le plus souvent fabriquées dans des cercles hostiles. Les médias américains mentent et Oliver Stone tente dans son film de rétablir la vérité. L'auteur de Wall Street, Alexander, The Doors (hommage magnifique à Jim Morrison), Platoon, JFK et d'autres brillantes productions est certainement le cinéaste politique le plus singulier. Comme lui, Michael Moore aussi essaye d'informer les Américains de manière indépendante, honnête. Tous deux sont redoutés par «l'Establishment» de Washington, parce qu'ils font de grands films produits par de grands studios et que le public américain les croit. On peut être sûr, après Nixon et Kennedy, que Barack Obama sera un jour dans le collimateur d'Oliver Stone, qui est reparti d'Alger en Californie pour filmer une fiction sur le trafic de drogue à la frontière du Mexique.
