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le médecin qui veille, l'historien qui rêve
Benatia Abderahman. Médecin, chercheur, auteur de plusieurs livres sur l'histoire
Publié dans El Watan le 15 - 11 - 2012

«S'il est bon que les civilisations s'opposent pour favoriser des synthèses nouvelles, il est monstrueux qu'elles s'entre-dévorent.»
Saint Exupery
Ça fleure bon la nostalgie et le goût de la curiosité chez Abderrahman Benatia, qui s'en est allé fouiner dans les arcanes du passé lointain pour tenter d'en comprendre toutes les subtilités. L'homme n'est peut-être pas comblé d'honneurs, mais il reste fidèle à lui-même. Il considère que les écrits consacrés à l'histoire ancienne, notamment par les Orientalistes, ont travesti les faits pour des considérations idéologiques et que, par conséquent, ils brouillent la réalité et la compréhension. Médecin de formation, Abderrahman a exercé, de longues années durant, son métier avec amour, avant d'être dévoré par une autre passion : celle de l'écriture.
Abderrahman est né à Alger en 1941. Il est issu d'une famille de 3 enfants, dont son frère aîné, Farouk, sociologue reconnu. Abderrahman a fait sa scolarité au lycée du Champs de Manœuvres, où il y a obtenu son baccalauréat en 1960. Il s'est tout de suite orienté vers la médecine. «C'est ma mère qui m'a conseillé cette filière. Vous n'ignorez pas qu'à l'époque, les métiers de médecin et d'avocat étaient les plus recherchés dans les familles modestes, comme c'était notre cas. Et puis, je ne le cache pas, c'était aussi une ambition pour ma mère de voir son enfant embrasser cette carrière exaltante.»
Première passion, la médecine
Abderrahman obtient son doctorat en 1970, après avoir soutenu avec panache une thèse sur «La lutte antitrachomateuse en Algérie». En 1971, il est «cabinard» à Alger, où il exerce dans un quartier populaire. «Ce n'étaient pas les patients qui manquaient, mais je ne me plaisais pas dans cette posture libérale. Les labos faisaient grandement défaut, il y avait peu de spécialistes et les impôts avaient la main lourde. C'est pourquoi je me suis résolu à rejoindre le secteur public en 1985.» Notre médecin poursuivra sa noble mission jusqu'à sa retraite, en 1998.
«La médecine, par définition, est un art exercé par les médecins qui ne sont que des individus héritiers de leur instruction et de leur éducation. Ils peuvent avoir reçu une bonne éducation des mœurs de rectitude ou le contraire. Il en va des moyens mis à la disposition du secteur par les hommes politiques. Si ces hommes politiques veulent participer au bien-être de la société, il mettront à la disposition des médecins les moyens demandés par le corps médical et les malades ou le contraire. Tout est ramené à l'individu», résume-t-il. Petit de taille, sec, le teint pâle, les épaules rentrées, Abderrahman conte son passé sans fioritures. «Mon expérience personnelle de la pratique de la médecine, m'a appris les contacts humains, à être à l'écoute des gens et surtout l'humilité. La compréhension de ces contacts humains m'a servi par la suite dans la recherche historique, car l'histoire est avant tout une science qui parle des relations en société.»
Après avoir pris sa retraite, Abderrahman bifurque vers un autre domaine, celui de l'histoire. Dans son regard, on décèle une lueur. On a l'impression qu'il veut régler ses comptes avec l'oubli et les contre-vérités. «Je n'écris pas sur l'histoire, mais sur la philosophie de l'histoire. Ma lecture est une lecture éclectique qui va des belles lettres européennes à l'histoire et à la philosophie asiatique, à l'histoire ancienne de l'Egypte. Je lisais presque tout, je ratissais large en français, car à l'époque, nous ne maîtrisions pas l'arabe, compte tenu des contraintes établies par le système colonial.»
De fait, Abderrahman promène sa curiosité à travers les siècles et les contrées, au cœur du monde et des civilisations vouées aujourd'hui à l'oubli. Résultat de ces recherches ? Une quinzaine de livres écrits par lui aux titres souvent extravagants, comme Les Arabes ancêtres des Gaulois ? ou encore Pourquoi les Européens ont-ils peur des Arabes ?
L'influence du berbère
Ainsi, Abderrahman nous apprend qu'au Tibet, le Dalaï lama, au XIXe siècle, avait des conseillers musulmans, selon ce que rapporte le père Huc dans son ouvrage Voyage au Tibet.«Dans mon ouvrage Arabes et Indo-européens, je parle de la civilisation ancienne de l'Inde et du bouddhisme. Dans ce cadre, je montre que la civilisation indienne est une civilisation d'origine mésopotamienne et que Bouddha est né au pied de l'Himalaya, précisément à Capula-Vastou. Ces deux noms propres, que j'ai pu expliquer par la langue berbère, qui est rattachée aux langues caucasiques, suivant les études menées par de nombreux linguistes. Je vais à contre-courant des histoires officielles en venant avec un autre son de cloche pour rétablir quelque peu la vérité, s'il peut exister une vérité dans une histoire qui remonte à plus de 5000 ans avant l'ère chrétienne.»
Evoquant dans son ouvrage la langue berbère, Abderrahman note que «si les populations de la Berbérie ont adopté et parlent naturellement l'arabe dans leur grande majorité, la langue berbère n'a pas pour autant disparu de l'Afrique du Nord. Mieux, cette langue toujours vivace a influencé et influence encore le parler arabe d'Occident. Le périple méconnu de la langue berbère nous permet de saisir l'autorité de cette langue en tant que témoin linguistique et civilisationnel tout au long de nombreux millénaires. Nombre d'auteurs ont cantonné ce parler dans la seule Berbérie africaine et méconnu son importance dans la genèse de nombreux mots du vocabulaire arabe et dans la formation d'une partie du lexique des langues européennes. Le berbère a rayonné par l'intermédiaire des populations migrantes ibéro-berbérophones en Asie (Inde, Perse, Anatolie) en Europe (Balkans, Italie et France) de même qu'il a donné naissance à des toponymes, hydronymes, oronymes… toujours en usage de l'Himalaya aux Ardennes !»
Abderrahman, qui ne se considère pas comme un historien mais comme un chercheur, s'attache tout au long de son travail à scruter la moindre inexactitude, le moindre oubli. «Il y a un de mes condisciples de lycée, que j'avais rencontré après la parution de Les Arabes en Europe avant l'ère chrétienne, qui m'a dit textuellement : ‘‘C'est le livre que j'attendais car il a répondu aux questions que je me posais sans cesse depuis des années''.»
Abderrahman sait que la littérature est un bel instrument, utile pour examiner les illusions de l'histoire, s'appesantir sur l'importance du livre. «Quand on parle du livre, on parle automatiquement du lecteur - la grande majorité de nos compatriotes ne lisent pas, y compris les journalistes qui, lorsqu'ils réceptionnent un livre pour en donner un exposé dans leur journal, nous disent qu'ils vont en faire une lecture en diagonale.»
A propos de l'histoire qui apparemment accapare tout son temps, Abderrahman dit que le scandale n'est pas de dire la vérité, mais de ne pas la dire tout entière. «C'est cette approche en profondeur de ces questionnements continus qui m'ont fait observer que les dictionnaires et encyclopédies, quand ils parlent d'un fait historique ou civilisationnel, ramènent tout à la civilisation et à l'histoire gréco-romaine. Mais avant cela, il y avait d'autres histoires et d'autres civilisations qui n'étaient ni grecque ni romaine et cela a débouché sur la rédaction de tous mes ouvrages avec une quête du non-dit ou de faits historiques dénaturés ou même occultés.»
Cela a accentué la difficulté de jeter des ponts entre des hommes et des univers séparés et de susciter parfois des confrontations. «Vous savez, les Orientalistes ont introduit des concepts lexicaux arabes avec un sens souvent opposé au sens originel. Par exemple, ‘‘el istiaâmar'' pour traduire le colonialisme, alors que ‘‘l'istiaâmar'' en arabe éthymologigue possède une sémantique noble et positive, telle que cité dans le Coran (Sourate Hôd, verset 61) : ‘‘De la terre, il vous a créé et vous la fait peupler'' … »
le rôle néfaste des Orientalistes
«Le deuxième exemple, c'est l'expression reprise par des auteurs arabes qui traduisent l'expression française ‘‘demander la main d'une jeune fille'', ils traduisent cette expression littéralement, alors qu'elle n'existe pas dans la littérature arabe. Si l'on suit à la lettre cette expression dans les pays musulmans, qui appliquent la charia... demander, c'est avoir la main coupée…»
Ce problème de la traduction est toujours d'actualité. «La civilisation grecque n'a été connue en Europe que grâce aux traducteurs arabes» étant donné que la civilisation grecque est la fille des civilisations arabiques ; de nombreux poètes et savants, qu'on qualifie de grecs, sont les précurseurs des savants et poètes phéniciens d'Asie mineure ou de Grèce car les Phéniciens, Egyptiens et Mésopotamiens avaient peuplé la Grèce et y ont introduit leur culture, leur langue et leur écriture orientée de droite à gauche, et ce, avant la création de la Koïnè au Ve siècle avant J.-C. ; Akman, poète ionien, créateur du lyrisme choral, Erato Sthène, mathématicien et astronome libyen (IIIe siècle avant J.-C.), Esope le fabuliste était originaire d'Asie mineure tout comme Hérodote, Homère…
Dans son travail appréciable de reconstruction, même s'il est peu considéré, Abderrahman, qui a du mal à se faire entendre, s'est construit son petit monde, avec à son actif déjà 12 ouvrages qui sont censés aller au-delà du temps et des espaces pour en découvrir les moindres recoins, en veillant à l'exactitude et en traquant toutes les contre-vérités…


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