Le Festival du livre et du film «Etonnants Voyageurs» s'est ouvert, avant-hier, à Brazzaville (République du Congo) sous le thème : «L'Afrique qui vient». Brazzaville (République du Congo) De notre envoyé spécial Une rencontre culturelle réunissant une centaine d'artistes, d'intellectuels et d'écrivains du monde entier, dont les Algériens Boualem Sansal et Yahia Belaskri. «Les soldats sont des symptômes, des symboles du mal de la société», a indiqué d'emblée l'écrivain sud-africain Mark Behr, dans sa conférence-débat, vendredi, au jardin du Palais des congrès de Brazzaville. Mais, l'auteur de L'odeur des pommes, qui a avoué avoir été soldat avant de troquer son fusil contre une plume, ne voyait pas la «violence comme une perversion (…), tout a une explication, une justification…». Une thèse que contredit fortement l'écrivain angolais, José Eduardo Agualusa. «Il ne faut pas faire de distinction entre l'agression et la guerre. Dans le monde (l'Afrique en particulier), on apprend aux enfants, aux hommes que la violence fait partie de l'identité. C'est pervers et stupide. L'homme est au centre de la guerre. Il faut seulement représenter (en littérature) la guerre d'une manière non spectaculaire.» Abondant quasiment dans le même sens, David Van Reybrouck, écrivain belge, estime que «justement, pour éviter une écriture non spectaculaire, il faut laisser la parole aux témoins, à ceux qui étaient acteurs ou dans la périphérie d'un conflit… Il faut emprunter la voix des autres». En Afrique, dans les régions de l'Angola, du Congo et de la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), des conflits sanglants ont marqué la mémoire collective récente. Qu'il l'ait vécue (la guerre) ou recueillie de la bouche de témoins - poussés par le désir de comprendre ou le besoin vital d'écrire - comment les écrivains transforment-ils l'expérience de la guerre pour en faire la matière de leur œuvre ? Les intervenants ont débattu sans toujours se mettre d'accord sur les raisons d'une guerre. L'homme de théâtre et conteur congolais, qui vit à Lyon (France), a tenté de trouver une réponse en racontant une anecdote : «Je ne suis pas de tempérament violent, mais une fois j'étais chez une famille dans un village gabonais, dont le frère avait été tué dans un conflit. J'étais dans une chambre où il y avait des armes du défunt. Quatre soldats sont arrivés pour enlever une fillette de 12 ans pour abuser d'elle. Et quand j'entendais les cris de la victime, j'avais regardé les armes. Je pouvais facilement basculer dans la violence pour défendre cette fillette, mais je ne l'avais pas fait…». Comme quoi, on peut éviter les conflits… malgré sa conscience. C'était un point de vue. Quant aux raisons des guerres en Afrique, elles ne cessent d'interpeller les écrivains, les humains… Chahredine Berriah