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Ben Ali Benzaghou : «Je regrette que le rapport de la commission de réforme n'ait pas été rendu public»
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Publié dans El Watan le 14 - 04 - 2013

Dans cet entretien, M. Benzaghou, recteur de l'USTHB, livre les difficultés entravant l'évolution de la formation des étudiants sous le système LMD initié depuis plusieurs années. Le recteur de l'USTHB a été également appelé, il y a une dizaine d'années, à diriger une équipe d'experts et de pédagogues pour proposer une série de mesures dans le cadre de la réforme du système éducatif. En tant que président de cette commission, M. Benzaghou évoque aujourd'hui les aspects n'ayant pas favorisé l'aboutissement aux résultats attendus.
-Des mouvements de protestation agitent les universités algériennes. Les préoccupations exprimées depuis quelques années par les étudiants traduisent les difficultés liées à plusieurs aspects pédagogiques et sociaux souvent négligés par les responsables du secteur. Est-ce le cas au niveau de l'USTHB ?
C'est tout à fait naturel que les étudiants s'expriment et manifestent durant leur vie estudiantine. Nous avons observé ces dernières années, au niveau de notre université, que la grande partie des mouvements de protestation sont liés au passage de l'ancien régime au nouveau régime (LMD). Nous expliquons ces mouvements par le fait que les populations d'étudiants qui s'expriment souvent sont celles en difficulté. Il s'agit d'étudiants ayant accumulé du retard dans leurs études. Pour les nouveaux élèves, il y a, à mon avis, deux types de préoccupations ; d'abord les conditions d'accueil, de transport, d'hébergement, les pressions dans les sections (1300 étudiants et 65 sections) qui sont des raisons de protestation. Il y a aussi une autre forme d'inquiétude liée au marché de l'emploi disponible dans notre pays, ce qui fait que les étudiants souhaitent rester le plus longtemps à l'université.
C'est une des situations qui poussent les jeunes étudiants à brandir des revendications de généralisation d'accès au master et au doctorat. Pour l'accès à la formation doctorante (troisième cycle) cette année, qui demande un concours d'accès sur épreuves et dont le nombre de postes est limité à 290, nous avons reçu 4600 candidatures. C'est une information qui mérite d'être au centre d'intérêt. Je pense que cela traduit une angoisse de quitter l'université et d'affronter le marché du travail. S'inscrire en doctorat permettrait de retarder au maximum cette confrontation et permet à l'étudiant de rester encore longtemps à l'université.
Pour préparer les jeunes à affronter le monde du travail, nous avons programmé des rencontres avec les organismes d'aide à l'emploi et à la création de microentreprises. Je vous signale que dans ce contexte, plusieurs partenariats avec des opérateurs économiques existent pour avoir une visibilité de la demande de cursus et de formation. A chaque fois d'ailleurs qu'il y a une demande identifiée, nous essayons d'y répondre. Par exemple, la création d'un master en économie financière pour répondre aux besoins exprimés par les banques et autres organismes financiers, pour répondre à une main-d'œuvre qualifiée en mathématiques et en économie.
-Le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a tenu, il ya quelques jours, une réunion avec les recteurs des universités algériennes. A l'ordre du jour figurait l'évaluation de l'application du système LMD. Quelle était l'appréciation du recteur de l'USTHB pour ce système d'études mis en place depuis presque une décennie ?
Nous sommes dans un processus d'évaluation, c'est le principe même de toute réforme. Quand on modifie des choses, il est impératif de se donner des moments d'évaluation. Cela fait neuf ans qu'une nouvelle organisation de la pédagogie et de l'architecture des formations a été mise en place, donc il est tout à fait naturel qu'il y ait périodiquement une évaluation. La rencontre avec le ministre s'inscrivait dans cette évaluation qui a été demandée à l'ensemble des universités, dans le cadre du conseil national de l'évaluation des universités. Cette instance a été mise en place conformément à la loi régissant le secteur. Disons que ce conseil a fait sa première communication pour indiquer quelle méthode il compte suivre pour faire l'évaluation, particulièrement en ce qui concerne l'application de la mise en place du système LMD dans les universités algériennes.
Concernant l'USTHB, nous considérons que toute l'université fonctionne selon le système LMD ; vous savez que la méthode est d'éteindre progressivement l'ancien régime. On y a mis beaucoup de temps. Pour certaines filières, on a mis presque dix ans pour éteindre l'ancien système, alors qu'il y en a d'autres pour lesquelles on a mis cinq ans seulement. Nous aurons encore plusieurs années pour éteindre l'ancien système pour les formations doctorantes, donc l'université appliquera simultanément les deux systèmes. C'est donc ce processus qu'il s'agissait d'évaluer et de voir ce qui, peut-être, n'a pas bien marché, de le corriger sur le plan de l'organisation et du contenu.
-Quelles étaient, justement, les difficultés relevées à l'USTHB ?
Ce que nous notons dans la mise en place dans ce système, c'est qu'il y a un certain nombre de paramètres, qui ne sont pas liés au type de système (LMD ou classique). Les difficultés se posent plutôt à la croissance des effectifs d'étudiants à l'université quel que soit le système d'études mis en place. C'est une donnée qu'il faut prendre en considération et qu'il faut prendre en charge. A l'USTHB, c'est une des principales contraintes, nous avons plus de 32 000 inscrits. Comme c'est une université des sciences et technologies, cela demande un certain nombre de conditions (laboratoires...), d'autant plus que nous avons fait l'effort, à l'USTHB, d'introduire de façon systématique les travaux de laboratoire pour tous les étudiants de la première année.
A titre d'exemple, nous avons plus de 12 000 étudiants en première année, faites un peu le calcul pour déployer ce nombre sur les laboratoires pour une capacité de 20 étudiants par laboratoire. Voyez-vous ce que cela implique comme organisation et moyens ? Alors, quel que soit la méthode mise en place, ce nombre reste une donnée objective et permanente qu'il faut prendre en compte. Prenons l'argument avancé concernant le LMD, présenté en tant que système demandant beaucoup de moyens. Moi je dirais que les moyens devraient être définis selon le nombre d'étudiants pour améliorer les conditions pédagogiques et la qualité de l'enseignement.
Il est clair que la qualité de la formation dépend de la taille des effectifs. Pour ce qui est de l'USHTB, les licences sont mises en place. Concernant les masters, nous en avons plus de 80 mis en place. Nous avons actuellement plus de 6000 étudiants inscrits en master, en première et en deuxième années. Juste pour vous donner une idée des moyens nécessaires pour l'évolution des étudiants dans leur cursus. En deuxième année, nous avons 2400 étudiants qui préparent leurs mémoires et auxquels il faut des sujets, des lieux de travail, des promoteurs et des placements dans des entreprises pour accompagner leurs recherches en fonction du thème choisi. Ce sont, il faut le dire, des contraintes qui existent dans toutes les universités du monde à des degrés qui diffèrent. Nous pensons que l'USTHB arrive à son maximum de capacité. Une université des sciences et technologies ne rime pas avec de gros effectifs.
-C'est le résultat des chiffres «politiques» du bac...
Tous les bacheliers ont le droit de s'inscrire à l'université et cela nous renvoie à un autre problème. C'est en amont. Il n'est offert aux jeunes que deux perspectives : aller à l'université ou échouer. Est-ce que c'est la meilleure solution ? Il faut ouvrir d'autres portes, la formation professionnelle, la formation technique et d'autres solutions encore. L'université est une aspiration pour tous les jeunes, mais elle ne doit pas accueillir tout ce monde. Cela n'existe nulle part ailleurs. C'est à ce niveau-là qu'il faut approfondir la réflexion. Il est nécessaire de créer de la diversification au niveau de l'enseignement post-obligatoire, c'est-à-dire au secondaire.
-Ces difficultés à prendre en charge ces gros effectifs expliquent-elles le «mauvais» classement des universités algériennes au niveau international ?
J'ai eu l'occasion de répondre à plusieurs reprises à cette question. D'abord le mauvais classement quand nous avons essayé d'analyser cette situation, on a fait le constat suivant : tous les classements se font, sans exception, sur la base d'informations disponibles sur internet. Tous les laboratoires qui réalisent ces classements — Schangai, le laboratoire espagnol, le Time… — travaillent avec des moteurs de recherche disponibles sur le web. Mais ce qui est fondamental, c'est que si une université n'est pas présente sur le web, elle est pénalisée. C'est le cas de toutes les universités algériennes. Ce que nous mettons sur le site n'est pas suffisant vu les paramètres d'évaluation retenus par ces laboratoires de classement.
Nous prenons au sérieux ces classements qui donnent une idée de ce que font les établissements universitaires et leur position dans le monde et, en tenant en compte de ces paramètres, nous essayons de nous améliorer. Mais si nous prenons certains critères comme les activités de recherche, je trouve que nous ne sommes pas si mal classés. Je vous rappelle qu'il y a deux ans, sur le plan de la publication de travaux de recherche, nous étions classés dans le top 10 dans toutes les disciplines qui concernent notre établissement.
-Cette discussion nous mène à aborder le sujet de l'évaluation de la réforme du système éducatif en application depuis maintenant près de dix ans. Cela fait-il partie, selon vous, de l'évolution de la réforme proposée par la commission que vous présidiez ou répond-il à des desseins purement politiques ?
Il faut savoir que la mission donnée à cette commission était de faire une évaluation du système éducatif. C'est important de donner une vision globale et cohérente du système éducatif et à travers une analyse et des recommandations. C'est cela la mission donnée à cette commission composée, je vous le rappelle, de 170 membres issus du secteur. Comme il l'avait demandé, le président de la République a été destinataire d'un rapport des travaux de la commission. Je regrette que le rapport ne soit pas, à ce jour, publié. Il n'y a rien de secret. C'est une affaire qui concerne toute la société. Il serait utile que ce rapport soit rendu public. Ce n'est pas à la commission qui l'a rédigé de le faire. Je me demande pourquoi les services de la Présidence ne l'ont pas fait.
Quand on annonce aujourd'hui que le ministère de l'Education nationale a mis en œuvre un mécanisme d'évaluation de cette réforme, il faut bien préciser qu'il y a deux approches. Il ne s'agit pas de faire l'évaluation de la réforme, mais de faire le bilan de l'état actuel du système éducatif. Il s'agit aussi de situer ce qui a été prévu dans le cadre de la réforme, ce qui en a été fait... d'où la nécessité de la publication du rapport. Si l'on ne sait pas ce qui a été donné comme recommandations ni ce qui a été retenu, encore moins ce qui a été rejeté. L'évaluation proposée est donc une évaluation de l'état actuel du système scolaire et non de la réforme.
-Il est donc erroné de dire que c'est une évaluation des réformes, comme présenté par la tutelle ?
Non, cela fait aussi partie de l'évaluation de la réforme. Je suppose que ceux qui vont évaluer sont au courant de ce qu'il y a eu comme réforme. D'après ce que j'ai lu dans la presse, le ministère de l'Education nationale a bien cerné ce qu'il souhaite évaluer. C'est principalement ce qui touche le primaire et le moyen (le cycle obligatoire) et c'est très important. Dans la réforme, il y a un segment crucial qui constitue la vision globale du système éducatif. Cette évaluation est importante, mais elle ne concerne qu'une partie du système. Je remarque un des segments du système éducatif le plus sensible, c'est l'enseignement secondaire. C'est-à-dire ce cycle qui suit l'enseignement obligatoire et précède l'enseignement universitaire ou la vie professionnelle.
Je dis que c'est un point sensible, c'est le ventre mou du système éducatif. Pour preuve, depuis 1970, il y a eu beaucoup de tentatives de réforme de ce segment, on est passé de l'enseignement technique à la formation professionnelle, mais les résultats n'ont pas été à la hauteur des attentes. Pour l'évaluation, je pense que pour le segment obligatoire, il n'y a pas beaucoup de divergences de point de vue, ce qui facilite son évaluation, contrairement à celui du secondaire. Car selon une certaine conception, la formation et l'enseignement professionnels restent le refuge de celui qui a échoué. Or, on peut échouer au baccalauréat et réussir une carrière dans un domaine professionnel, ce qui n'est pas possible avec l'approche actuelle. Cela ne peut pas fonctionner comme ça. Il faut offrir aux jeunes qui ont des aptitudes la possibilité d'aller aussi loin que possible, mais pour une autre partie, qui n'est pas négligeable, il faut les préparer à aller à la vie professionnelle ou au monde du travail. Il faut dépasser un peu cette dévalorisation de la formation qui prépare au monde du travail.
Je vous cite un exemple : on a mis en place l'enseignement technique en Algérie dans les années 1970. La finalité de cet enseignement technique est de donner un enseignement aussi proche que possible du monde du travail. Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Le bac technique servait plutôt à aller à l'université. Tous ces bacs techniques qui, à l'origine, étaient conçus pour préparer les gens à aller travailler servaient pour l'inscription à l'université. Souvent, il s'agissait d'étudiants qui ont beaucoup de difficultés et arrivaient à l'université avec ceux issus de l'enseignement dit général, alors qu'ils n'ont pas eu plusieurs matières dans leur formation au lycée (français, physique…).
Le bac technique, en vigueur par le passé, était donc dévoyé, c'est pour cela d'ailleurs que dans la réforme, il était prévu un enseignement pré-universitaire et un enseignement et une formation professionnels, d'où l'intitulé du ministère : Enseignement et Formation professionnels. Mais ce n'est pas clair.
Des revendications sont exprimées à travers la presse quant à la nécessité de créer un bac professionnel pour le valoriser. Je n'ai rien contre cette conception, mais si ce bac sert à accéder à l'enseignement supérieur, il y aurait amalgame. Il y a donc incompréhension. L'idéal serait qu'un diplôme couronne le cursus de l'enseignement professionnel, ce qui permettrait à l'apprenant d'avoir une carrière. Car le titulaire d'un bac professionnel ou pas a le droit de prétendre à des études à l'université et, à ce moment-là, l'organisation d'un bac professionnel n'aurait pas eu l'effet escompté, celui de promouvoir l'enseignement professionnel.
Cet aspect n'a pas été soumis à l'évaluation, alors que c'est un volet qui me paraît important et qui doit susciter l'intérêt de tout le monde, pas uniquement celui du ministère de l'Education nationale. Autre recommandation faite par la commission de réforme, c'est la stabilité et la cohérence du système éducatif. La commission avait proposé qu'il y ait des systèmes d'analyse du système éducatif, comme préconisé par la commission qui a d'ailleurs proposé qu'il y ait un observatoire de l'éducation nationale. C'est un organisme qui fait des études, des analyses et des critiques sur le système éducatif.
Un observatoire a été créé au sein du ministère de l'Education nationale, mais aucune évaluation n'a été rendue publique. De même que la création du conseil national de l'éducation qui devrait être un espace de dialogue pour toutes les parties composant le système éducatif, y compris les syndicats du secteur et les associations des parents d'élèves, qui permettrait d'avoir une vision globale du système éducatif. Ce conseil n'a jamais été créé. Mais cette évaluation est importante, car au bout de dix ans, il est impératif de savoir ce qui a été réalisé et ce qu'il faut encore revoir.
-Quels sont les aspects de la réforme qui ont été rejetés ou dont les recommandations ne sont pas prises en compte ? Des lobbyings islamistes seraient-ils derrière le retard de l'accès aux langues étrangères ?
Dans le rapport remis par la commission, il est clairement signifié que personne n'a remis en cause le principe de base stipulant que la langue arabe est la langue d'enseignement, mais un système éducatif doit être ouvert aux langues étrangères. C'est l'approche appliquée partout dans le monde. Pour des raisons historiques, l'accès aux sciences et aux technologies doit forcément passer par les langues étrangères. Après un long débat, la commission, pour des raisons objectives, a opté pour l'introduction progressive et plus efficace de la langue française dans les établissements au primaire et de l'anglais à partir de la première année moyenne. Ces recommandations sont mises en application. Le problème c'est que l'encadrement n'a pas suivi cette approche. Les résultats sont critiques en langues, y compris en arabe. Le problème pour l'arabe, c'est la méthode pédagogique qui n'a pas été suffisamment modernisée. Pour les langues, il y a plusieurs raisons, objectives ou voulues. Qui dit voulues, ce sont des raisons politiques.
-Faut-il alors sortir la réforme du débat politique ?
Je ne suis pas d'accord. L'éducation est un problème de société. On ne peut pas la sortir du débat politique. Il peut y avoir des positions partisanes et idéologiques. La réforme implique un débat politique, mais pas un enjeu partisan. Cela pourrait prêter à confusion. Il faut mettre l'école à l'abri des enjeux partisans. Il est faux de dire que c'est uniquement aux spécialistes de donner leur avis.
Même si les revendications divergent complètement. Des voix revendiquent plus d'islamisation, d'autres une occidentalisation totale...
C'est un objet de débat. Il faut écouter tout le monde. Le débat doit être ouvert et tout le monde a le droit de s'exprimer. Beaucoup de choses ont été dites et qui sont totalement fausses. A titre d'exemple, il n'a jamais été question de supprimer totalement l'éducation religieuse. Cela n'a jamais été demandé par la commission. Par contre, elle a souhaité que l'enseignement soit fait avec les méthodes pédagogiques appropriées et adéquates à l'âge de l'enfant.
Je vous rappelle que le rapport remis au président était composé de constats et de recommandations. Le rapport était accompagné d'annexes portant sur les moyens techniques pour l'application des recommandations. Les chapitres principaux sont liés à la formation des formateurs, à l'apprentissage des langues et à l'éducation religieuse et civique.
A mon avis, la réforme est un débat de société, il faut donner peut-être plus d'importance à l'avis des pédagogues, mais il faut aussi écouter les parents, il ne faut pas les exclure. C'est à eux d'exprimer les préoccupation sur les conditions de scolarité, sur la surcharge et les programmes, ils peuvent aussi émettre leur avis sur la pertinence du programme et son contenu, mais ce n'est pas à eux de décider de supprimer ou pas, cela est le rôle des pédagogues qui doivent veiller à la cohérence du contenu.
Il est noté une baisse du rendement dans certaines matières scientifiques et des langues, je pense qu'il faut revoir la méthode d'apprentissage et rendre ces matières plus attractives. Il y a beaucoup à faire pour la formation des enseignants. Il y a aussi une action à faire au niveau des parents, car ce sont eux qui influencent le choix des enfants, je parle des maths que fuient beaucoup d'élèves.
-Le ministère a-t-il omis un aspect qui vous semblerait pertinent à évaluer ?
Le ministère a ouvert une évaluation pour la phase obligatoire. Ce n'est pas juste, à mon avis, d'évaluer un aspect et de le revoir deux ans plus tard. Car cela créerait un chamboulement, alors que le système a besoin de stabilité. Il ne faut pas trop déstabiliser par ces réformes, mais il faut constamment évoluer. Je ne pense pas que l'approche de la tutelle à revoir la réforme dix ans après soit raisonnable. Il faudra passer aussi à l'évaluation de l'enseignement post-obligatoire. Il faut aussi penser à évaluer toutes les tranches d'âge allant jusqu'à 16 ans, car à mon avis, il est biaisé de ne s'occuper que de ceux qui sont dans le système éducatif. Que sont-ils devenus, nos enfants qui ne sont plus à l'école qui ont entre 16 et 20 ans ? Qu'a-t-on offert, en dehors de l'école, à cette tranche d'âge ? Sans ces questionnements, l'approche reste insuffisante et cela entraverait toute recherche de vision globale et complète.


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