Le 4 août 2021 s'éteignait Saïd Hilmi, une figure marquante du paysage culturel algérien. Né le 15 mai 1939 à Azeffoun, en Kabylie, cet homme aux multiples talents – acteur, humoriste, parolier, auteur et compositeur – a laissé derrière lui une empreinte profonde et chaleureuse dans le cœur du public comme dans l'histoire artistique de l'Algérie. Orphelin très jeune, il fut élevé par son frère aîné, Mohamed Hilmi, artiste déjà bien installé dans le monde du théâtre et de la radio. C'est à ses côtés que le jeune Saïd découvre l'univers du spectacle. Il fait ses premiers pas sur scène dans une pièce intitulée Mouni Radjel, mais c'est à la radio qu'il se révèle au départ, notamment dans des programmes pour enfants. Rapidement, il devient une voix familière, puis un animateur charismatique à travers des émissions consacrées au théâtre sur la Chaîne 2 de la radio nationale. Ce premier contact avec le public forge sa relation de proximité et d'écoute, qu'il conservera toute sa vie. Sa carrière au cinéma se construit ensuite avec patience et intelligence. Il choisit ses rôles avec soin, apparaissant dans des films marquants du cinéma algérien, tels que Zone interdite (1974), Ali au pays des mirages (1980) d'Ahmed Rachedi, ou encore Douar des femmes (2005) de Mohamed Chouikh. Il partage l'écran avec des figures majeures comme Sid Ali Kouiret, Fatiha Berbère et Nouria, participant ainsi à l'essor d'un cinéma national en quête d'identité et de profondeur. Le théâtre, qu'il n'a jamais vraiment quitté, le voit aussi briller. Il interprète notamment Hassen Terro en 2007, lors des festivités d'Alger, capitale de la culture arabe, aux côtés de Mustapha Ayad, Zahir Bouzerar, et les regrettés, Ammar Maarouf, Fatiha Berbère et Yacine Zaidi. Sur scène, sa prestance élégante, son humour fin et sa capacité à faire passer l'émotion le rendent rapidement incontournable. Il gagne alors le surnom affectueux de «Gentleman de la comédie algérienne», reflet d'un style unique, à la fois tendre, exigeant et profondément humain. Dans les années 1990, Saïd Hilmi explore une forme plus personnelle d'expression avec le One Man Show. Son spectacle Guetta Ouarmi connaît un large succès. À travers des personnages hauts en couleur, il y aborde avec mordant les contradictions de la société, usant de l'humour comme d'un miroir, parfois dur, souvent juste, toujours empreint d'une profonde affection pour son pays. Parallèlement à sa carrière artistique, il s'engage activement pour la défense du cinéma algérien. Il participe aux travaux de l'association Adwaa, œuvrant pour la mémoire et la promotion du patrimoine cinématographique national. Il en deviendra même président d'honneur, un rôle symbolique qui reconnaît son investissement sincère et durable. Sa disparition, survenue à l'âge de 82 ans, a été ressentie comme une onde de choc. Emporté par des complications liées au Covid-19, il laisse un vide immense dans le monde de la culture. Le président Abdelmadjid Tebboune a rendu hommage à l'homme et à l'artiste, saluant une carrière exemplaire et une passion communicative. En mémoire de son œuvre, un concours annuel récompensant les meilleurs comédiens a été instauré par le Théâtre national Algérien, prolongeant ainsi son héritage et sa bienveillance artistique au-delà de sa vie. Trois ans après sa disparition, le souvenir de Saïd Hilmi demeure vivant, nourri de gratitude, d'admiration et de respect.