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Presse le prix du sang
Il y a 20 ans, Tahar Djaout premier journaliste assassiné
Publié dans El Watan le 26 - 05 - 2013

« Quand je serai grand et que j'aurais un travail, je prendrais de l'argent et je le glisserais de nuit dans la maison d'un pauvre. Comme ça, quand le pauvre se réveillera, il sera content. Il va se dire que c'est Dieu qui le lui a envoyé.»
Le petit garçon qui fait ce vœu pieux devant sa grande sœur deviendra quelques années plus tard un brillant journaliste et un intellectuel de renom. Il n'oubliera, cependant, jamais d'aider les pauvres. Mieux encore, chaque fois qu'il en aura l'occasion, il deviendra cet intellectuel engagé pour faire entendre la voix de son peuple et de tous les damnés de cette terre sacrée qui l'a vu naître.
La dame qui nous raconte cette anecdote sur le pas de sa porte est Nna Tassadit, la sœur aînée de Tahar Djaout, dont il est ici question. Nous sommes à Oulkhou, son village natal, à Ath Chaffaâ. C'est jeudi, jour de marché dans la ville voisine d'Azzefoun. Ce qui explique que le village soit déserté par ses hommes. Un paysan vient à passer. C'est Ahmed Djaout, 63 ans. Ce paisible retraité est le premier habitant que nous rencontrons et il se trouve être un cousin du journaliste assassiné. Il se chargera bien gentiment de nous introduire à Oulkhou, de nous indiquer la maison familiale de Tahar Djaout, puis celle de sa sœur.
Nna Tassadit témoigne que Tahar avait un tempérament exceptionnel. «Jamais on ne l'a vu en colère. Il souriait toujours», dit-elle. Joint par téléphone, son ami d'enfance, Akli Gasmi, dira de lui qu'il était «d'une sagesse exemplaire. On ne l'a jamais vu se bagarrer et il détestait la violence». Tout petit déjà, Tahar a fait des pieds et des mains pour rentrer à l'école. N'ayant pas encore atteint l'âge de la scolarité, il n'avait pas été inscrit et en pleurait de dépit. C'est ainsi qu'il accompagna obstinément son frère aîné et se glissa souvent furtivement dans ce mystérieux temple de la connaissance qui le fascinait tant. «Il était très motivé et avait une grande volonté d'apprendre», témoigne encore son ami Akli. Tahar obtient en 1974 une licence de mathématiques, mais sa vocation le pousse tout naturellement vers le journalisme et la littérature.
Après Octobre 1988, Djaout s'engagera dans le journalisme d'idées. Dans un hommage non encore publié, son ami et compagnon de longue date, Abdelkrim Djaâd, dira de lui : «Les événements d'Octobre 1988, un aggiornamento du sérail pour déposer Chadli, va consacrer d'une manière durable la division du pays. Djaout sera l'un des porte-voix du camp démocratique qui s'opposera véhémentement à la violence islamiste.»
Alors que les nuages s'amoncellent dans le ciel d'Oulkhou, nous rencontrons des membres de l'association culturelle locale. Elle porte, bien évidemment, le nom de l'illustre journaliste. Nous nous rendons ensemble au cimetière où il repose. Sa tombe est propre et fleurie. Abritée sous un mimosa, elle se dresse sur une butte qui fait face à la mer en contrebas de ce village qu'il a toujours aimé. Beaucoup de lieux dans et autour du village sont évoqués dans ses livres. Oulkhou, c'est ce «village des ancêtres où il entretenait secrètement une relation intime avec la vérité des origines», nous dira son ami Abdelkrim Djaâd, joint par téléphone. «Toute son œuvre s'est nourrie de ce terreau, de cette terre ancestrale, de cette culture des ancêtres et de l'histoire de son pays», dit son ami d'enfance, Akli Gasmi. «Il était très attaché à ses amis et son village», ajoute encore son ami. Tahar Djaout lisait beaucoup et dévorait littéralement les livres. «Un jour, je lui avais prêté un livre de 300 pages, il me l'a rendu en 24 heures», se rappelle encore cet ancien enseignant de 10 ans son aîné.
Tahar a été fauché par les balles intégristes à une période où il venait enfin d'atteindre la plénitude de son talent littéraire et journalistique. Il paya de son sang un engagement sans faille pour une Algérie du progrès. Tahar Djaout se revendiquait ouvertement et fièrement de cette «famille qui avance» face à une «famille qui recule», mais n'avait que ses mots souvent très doux pour le dire. «Des mots contre des kalachnikovs. Combat inégal. Combat pathétique d'une République qui a oscillé et flanché au premier coup de feu», dira encore Abdelkrim Djaâd qui l'a longuement côtoyé, aussi bien à Algérie Actualité qu'à Ruptures.
Ce 26 mai 1993, sur le parking d'une cité de banlieue, un ersatz d'humain mettra fin à sa vie de deux balles dans la tempe. Il n'avait pas encore bouclé ses 39 ans. Un autre Tahar, Ouettar de son nom, appartenant à l'autre famille, poussera l'outrance jusqu'à dire qu'il n'était une perte que pour la France. 20 ans après sa disparition, sa grande famille commémore encore sa mort. Djaout est le premier martyr d'une corporation qui a payé un lourd tribut au terrorisme. Il sera «le premier martyr d'une presse qui a refusé toute compromission, toute flagornerie», dira encore Djaâd. C'est pour toutes ces raisons que Tahar Djaout est aujourd'hui plus qu'un symbole. C'est une école.


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