Si la classe politique tunisienne a condamné unanimement la violence qui sévit depuis quelques jours en Egypte, elle n'en est pas moins divisée sur l'attribution des responsabilités. Tunis (Tunisie). De notre correspondant
Il est nécessaire de suivre les manifestations de rue du pouvoir et de l'opposition en Tunisie pour avoir une idée sur les différences et les similitudes entre la Tunisie et l'Egypte, d'une part, et comprendre les raisons de ce ton, beaucoup moins violent en Tunisie, d'autre part. En effet, le discours politique violent est guetté sur les réseaux sociaux, voire dans les mosquées, ce qui a limité au maximum le champ des excès et poussé tous les intervenants à essayer de contrôler leur vocabulaire. Partant de cette attitude, les Tunisiens sont donc unanimes contre la violence de tous bords et pour l'instauration du dialogue. Mais, qu'en est-il de l'interprétation des événements ? Il est évident que la similitude de la présence des islamistes au pouvoir en Tunisie et en Egypte se répercute dans la prise de position par rapport aux incidents en Egypte. Les islamistes d'Ennahdha ont condamné la destitution de Morsi et l'ont qualifiée de putsch. Rached Ghannouchi avait même appelé le peuple égyptien à «rester dans les rues jusqu'au rétablissement de la légalité». Les centaines de manifestants islamistes descendus avant-hier accusent l'armée d'avoir commis «un carnage contre des citoyens pacifistes». Les ministres nahdhaouis se prévalent du fait que «leur pouvoir n'est pas aussi sanguinaire que les putschistes égyptiens et n'a pas dispersé par les armes le sit-in antigouvernemental». Chez l'opposition, les prises de position sont divisées. Nidaa Tounes, le parti de Béji Caïd Essebsi, ex-Premier ministre de la Transition, «condamne la violence mais déplore que le sit-in soit sorti de son aspect pacifique». Nidaa Tounes condamne également «l'expansion de la violence contre les coptes et leurs églises» et appelle les autorités tunisiennes à «respecter leurs engagements diplomatiques en protégeant les représentations et les citoyens égyptiens». Le ton n'est pas le même du côté d'Al Massar et d'Al Jamhouri qui ont plutôt «condamné la violence de l'armée dans la dispersion du sit-in». Pour ce qui est de la centrale syndicale, UGTT, «elle s'est placée aux côtés du peuple égyptien», dans un communiqué publié il y a deux jours. Dans la rue, les citoyens réagissent d'une manière moins expressive. L'appel d'Ennahdha à manifester en soutien à la légitimité en Egypte n'a pas eu d'échos parmi les citoyens. Il n'a jamais réuni plus d'un millier de persooness. «On a plutôt besoin de stabiliser notre pays», explique une dame de 53 ans.