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Abderrahmane Hadj-Nacer : «Une voyoucratie organisée se dispute aujourd'hui le pouvoir»
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Publié dans El Watan le 16 - 07 - 2014

-On assiste depuis quelques années à une intervention de plus en plus importante des réseaux d'affaires et de l'argent en politique. Quels facteurs ont accentué ce phénomène ?
Il y a le tabou de l'argent hérité de la culture catholique française, les frontières devenues floues depuis la wahabbisation de l'islam entre le licite et l'illicite et le refus d'aborder explicitement le rapport entre le pouvoir et l'argent.
A l'indépendance, la lutte acharnée, durant le Congrès de Tripoli entre deux visions de l'avenir, celle du GPRA assise sur la légitimité populaire et historique et celle de ceux ayant pris le pouvoir, de soldats n'ayant pas de rapport à la vie civile, tournait autour du rapport entre l'argent et le pouvoir. Tandis que le GPRA développait une vision de l'ascension sociale par l'accumulation du capital et de la connaissance, les autres prônaient l'ascension via la violence légitimée sous couvert de révolution.
On pouvait dire au départ que ce sont deux approches théoriques, mais en réalité cela produit deux visions du rapport à l'argent totalement différentes. Si dans l'un des cas le rapport à l'argent est légitime, dans l'autre il ne l'est jamais. Quand l'argent est légitime, il devient un des instruments d'accession à la hiérarchie sociale au même titre que la compétence ou l'abnégation dans le service public, dans le cas contraire c'est la violence qui devient le moyen d'accession à la hiérarchie.
L'argent a sa propre logique. Dans sa biologie, l'être humain cherche à dominer son territoire. Or, l'argent est le moyen le plus efficace de le dominer. Pour ceux qui pensent que l'argent est légitime, la question ne se pose pas. Quant à ceux qui pensent que l'argent est un instrument illégitime d'accession à la hiérarchie, ils se battront pour que celui-ci n'apparaisse jamais, et que cet instrument reste dans l'informel et dans l'opacité, à l'image du pouvoir. Et à pouvoir informel, économie informelle. A partir du moment où l'économie est devenue informelle et que le pouvoir est devenu informel, l'argent entre dans une logique de jungle et de développement des plus sauvages. Dans l'informel, la régulation laisse place à la violence. Dans la sphère informelle, les moyens de régulation de l'Etat ne peuvent plus intervenir.
A ce moment-là l'économie informelle devenue puissante se bat pour casser les instruments de régulation de l'Etat. L'informel domine, à tel point que les subventions et le soutien des prix sensés consolider le pouvoir d'achat des ménages, sont en réalité un soutien à l'économie informelle. Sous l'argument fumeux du soutien au pouvoir d'achat se cache une volonté d'accroître les capacités de l'économie informelle et de sujétion des citoyens au bon vouloir des puissants. L'économie informelle et l'absence de régulation induisent forcément l'apparition brutale des fortunes. Ce qui permet un nouveau jeu avec le pouvoir et un basculement du pouvoir par la force au pouvoir grâce l'argent illicite. L'argent sale prend le dessus en quelque sorte sur la gestion par la violence légitime. Une voyoucratie organisée dispute aujourd'hui le pouvoir aux détenteurs issus du Congrès de Tripoli.
-La crise que traverse actuellement le FCE cristallise en quelque sorte les luttes au sein de divers clans au pouvoir. Cependant, les conflits qui secouent cette organisation patronale paraissent violents. Qu'est-ce qui explique aujourd'hui ce tiraillement ?
Si l'on se base sur une grille de lecture simplificatrice on peut dire que ce sont les représentants financiers d'un clan qui luttent contre ceux d'un autre clan. Une première lecture qui voudrait que ce soit un combat entre ceux qui ont su soutenir qui il fallait contre les autres, ceux qui ne l'ont pas su. Je pense que la réalité des choses va plus loin que cette vision simplificatrice. La mondialisation touche aujourd'hui tout le monde. Le problème, qui se pose pour beaucoup, est comment s'intégrer dans la mondialisation. Les nouveaux oligarques algériens ne présentent d'ailleurs pas la même logique d'intégration. Il existe des logiques extrêmes de mondialisation dérégulée avec un monde dirigé par des oligarques auxquels seront soumis l'ensemble des peuples.
C'est pour cela que l'on voit certains travailler pour la centralisation de la finance mondiale entre Londres et New York. Elle s'oppose à la logique des classes moyennes, qui est une logique patrimoniale et qui lie territoire et patrimoine. C'est d'ailleurs la logique de pays qui favorisent l'émergence des petites et moyennes entreprises. Et ce sont les pays qui résistent le mieux aux crises. Ce sont des logiques qui ne se ressemblent pas. En Algérie, il y a ceux qui prennent le risque d'investir localement car ils savent que leur intégration dans le monde dépend de leur enracinement. Mais il y a aussi ceux qui refusent d'investir localement parce qu'ils pensent que leur enracinement dans le monde dépendra de leur attractivité financière.

-Pensez-vous que ceux qui sont aujourd'hui au pouvoir fonctionnent selon cette logique ?
Je ne suis pas sûr qu'ils aient conceptualisé ou qu'ils se rendent compte de ces logiques. Je pense que les gens sont beaucoup plus dans des rapports de pouvoir individuel, d'intégration et de soumission au reste du monde. Ce qu'ils ne comprennent pas c'est que ce n'est pas parce que l'on est milliardaire en devises, que forcément on sera intégré dans la caste de ceux qui dirigent le monde. L'argent ne suffit pas. L'argent est certes un instrument de pouvoir, mais il faut aussi accumuler les codes culturels qui rendent fréquentables. Le problème dans le système algérien est que ni l'enseignement ni la fermeture du pays ne permettent une accumulation autre que pécuniaire. N'ayant pas les moyens de défendre leurs positions, nos oligarques pensant profiter un jour de l'argent mal acquis, ignorent aussi le fait que c'est toujours eux qui payeront pour les crises monétaire et financière internationales. Ce sont ceux qui n'ont aucune légitimité qui payent pour les grands oligarques du système financier international. Ces derniers ont diverses techniques de recaptation des ressources financières acquises illicitement.

-Partant du postulat que les tenants du système bénéficient de réseaux bien établis à l'international, ont-ils un réel besoin de réseaux d'affaires nationaux ?
Il est évident que l'appui est là, mais illusoire. A partir du moment où l'on sait que l'argent capté illicitement ne restera jamais ici, et que transitant par Paris ou les Îles Vierges, il finira par circuler entre diverses places en dollars ou en euro, ceux qui gèrent les places financières parisienne, londoniennes ou encore new-yorkaisespeuvent donner l'illusion d'un soutien. Il faut savoir que tous les pays qui reçoivent ces fonds sont dans l'illégalité. Sauf que les règles en vigueur, par exemple en Europe, ne s'appliquent pas aux fortunes venant de pays du tiers-monde. Des couloirs verts s'ouvrent d'ailleurs facilement pour de grandes fortunes issues de flux illicites. Sur le plan du droit, c'est du recel à grande échelle. On a mis en place des siphons pour aspirer en permanence l'argent qui est détourné du tiers-monde. Certains diront que des fortunes mal acquises ont fait l'objet d'enquêtes et d'attaques. Or, celles-ci ont d'abord ciblé des gens que l'on a décidé d'éliminer, à l'image de Gueddafi. Il faut aussi préciser que l'argent détourné ne revient jamais dans le pays d'origine. Deuxièmement, si l'on s'attaque au fils d'un ministre de Guinée équatoriale, par exemple, l'objectif est de démontrer aux autres que s'ils ne sont pas obéissants, on pourra s'occuper de leur cas.

-Et en ce qui concerne les réseaux internes ?
Ce sont des réseaux de pouvoir. Le pouvoir, selon la définition de Napoléon, «c'est l'argent pour payer la troupe, pour mater le peuple». Aujourd'hui est-il plus important d'être à la tête d'une administration, de faire partie de l'armée, ou de détenir une grosse fortune ? Dans l'administration et l'armée, il existe tout de même des règles à respecter pour gravir les échelons. Par contre, dans les milieux d'argent, c'est la jungle. On n'est plus dans le respect des règles. On est dans la capacité d'avoir une position rapide brutale et hors règles. Dans la mesure où le contournement des règles passe par l'argent, celui qui détient l'argent deviendra un soutien et un passage obligé.

-Ne pensez-vous pas que le phénomène tend à s'affirmer aujourd'hui par le fait que nous soyons dans une phase où la légitimité révolutionnaire doit laisser place à une autre forme de légitimité ?
Tout le monde pense que nous sommes dans une phase historique, c'est qu'au-delà de l'âge du capitaine, nous vivons un basculement du monde.A la lecture de certaines expériences vécues par d'autres pays, à l'image de la Russie à titre d'exemple, nous voyons que la disparition d'une certaine légitimité s'est faite au profit d'une oligarchie pure et dure. Cela n'a certes pas duré longtemps, puisqu'il y a eu le retour d'une certaine forme d'autoritarisme, de régulation mais sans la disparition de l'oligarchie.
C'est une tentative vouée à l'échec de remettre de l'ordre dans l'oligarchie, uniquement par l'usage de la contrainte. Cela ne durera pas car ce n'est pas construit sur d'autres formes de légitimité qui impliquent à long terme la population. Ce dont nous avons tous peur est – qu'au-delà de la violence dans certains pays comme la Syrie, la Libye… qui n'est pas survenue accidentellement – qu'en l'absence d'une ingénierie politique, sociologique, anthropologique, économique..., nous sommes en train de basculer stupidement dans la jungle. Ce ne sont pas les manipulations autour d'une prétendue ingérence de la main de l'étranger dans ce qui se passe au M'zab, ou comme ce fut le cas en Kabylie qui va retarder l'échéance.
La population sait qu'il y a un danger, et pas seulement par rapport à ce qui se passe à nos frontières, mais aussi dans les rapports entretenus avec l'argent et la violence, par rapport à la politique, ce qui est légitime et ce qui ne l'est pas. Ce ne sont pas les décisions par le haut, la promulgation d'une nouvelle Constitution, la promesse d'une nouvelle rente issue du gaz de schiste qui règleront le problème. Le pouvoir ne comprend pas que les gens ne réagissent pas contre le gaz de schiste, mais contre l'opacité dans la prise de décision. Il est plus solide d'impliquer la population dans la mutation d'un système politique, dans la distribution de richesse par le travail et dans la transparence. Cela va dans le sens du confortement de l'Algérie dans ses relations avec le reste du monde.

-Pensez-vous que la propension du pouvoir de croire que la population trouve son compte dans ce qui est redistribué dans le cadre des transferts sociaux et dans la généralisation de l'informel est une erreur ?
C'est une erreur, car la population considère que ce qu'elle grappille n'est pas du tout ce à quoi elle a droit. Tout le monde considère aujourd'hui que chacun doit prendre sa part. On a voulu transformer ce peuple en peuple d'assistés et on a détruit le système de valeurs comme le travail, la discipline et la citoyenneté.
C'est exactement ce qui est recherché. Aujourd'hui, la seule légitimité qui est reconnue c'est la violence. Cela marche car à chaque fois que des populations usent de la violence elles obtiennent quelque chose. Et ça marche aussi car les manipulateurs se servent tantôt de la Kabylie, tantôt du M'zab, et demain peut-être du pays des Chaouis pour distiller leur propagande. Ils s'attaquent, d'ailleurs, aux populations les plus enracinées dans l'amour du pays, dans leur histoire et dans leur patrimoine. Ils font dans le déracinement et ils reproduisent les pratiques coloniales.


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