Le mois de jeûne touche à sa fin et les vacances d'été approchent à grands pas. De plus en plus nombreux à s'offrir quelques jours de vacances, les Algériens continuent à bouder le tourisme domestique qui sombre dans la médiocrité et le laisser-aller. Par contre, d'anciennes destinations autrefois prisées par nos compatriotes comme la Tunisie semblent perdre de leurs attraits au profit d'autres destinations notamment asiatiques. Mais quelque soit la destination, les acteurs du secteur, en l'occurrence les agences de voyages, se frottent les mains et tablent sur une hausse de leurs chiffres d'affaires cette année. C'est du moins ce que nous a confié Mme Kezzal, de l'agence de voyages All Ways Travel. «La tendance haussière qu'on observe depuis environ trois ans se maintient cette année. Le Ramadhan ne l'a pas freinée. Les départs ont seulement été reportés», commente notre interlocutrice qui anticipe une hausse du chiffre d'affaires de l'agence par rapport à 2013. Même sentiment chez Alltour. Sa gérante constate non seulement que le nombre de voyages réalisés par les Algériens a nettement progressé, mais aussi qu'ils ont dépensé plus qu'en 2013 pour financer leurs projets de départ. Autre constat, cette année ce sont les destinations asiatiques qui font rêver les Algériens. «Si l'année passée ils étaient nombreux à partir au Maroc et en Tunisie, cette année c'est la Malaisie qui l'emporte, suivie de la Thaïlande. La Tunisie, le Maroc et la France n'ont plus la cote auprès des Algériens. La Turquie, par contre, demeure une destination prisée», affirme notre interlocutrice. Cet engouement s'explique selon elle par l'effet de mode, la recherche de nouveauté et de découverte, mais surtout par le fait que les voyages sont devenus un poste de dépense important pour de nombreux Algériens. «Ils n'hésitent pas, à titre d'exemple, à dépenser environ 179 000 da par personne pour un séjour de 10 jours en Malaisie et 115 000 da pour passer quelques jours en Turquie», renchérit la gérante d'Alltour. «C'est une culture qui s'installe peu à peu chez nous», se réjouit Mme Kezzal, qui confirme que le budget moyen des Algériens pour les congés d'été enregistre une hausse notable par rapport à l'an dernier. «Il est de 300 000 da par personne», précise-t-elle. Cependant, elle affirme que de nombreux clients de l'agence ont choisi de passer leurs vacances en Espagne (Barcelone) ou encore en Turquie. «Si certaines destinations ou tendances s'étirent sur des années, d'autres surgissent subitement grâce à un événement ou encore suivant les modes. C'est le cas du Portugal. Cette année, les Algériens ont découvert le Portugal. Nous avons reçu beaucoup de demandes pour des séjours dans ce pays», a-t-elle ajouté. Des clients mieux informés et plus avertis grâce à Internet Les Algériens ne sont donc pas si différents des autres touristes, ils voyagent plus et dépensent plus... ils suivent la tendance mondiale. Si l'on croit les résultats de l'enquête annuelle «TripBarometer» réalisée par le site de voyage TripAdvisor et le cabinet de recherche Ipsos menée auprès des établissements d'hébergement et des voyageurs, 2014 s'annonce comme une année exceptionnelle dans le secteur de l'hôtellerie à l'échelle mondiale, le pourcentage des voyageurs dans le monde, qu'ils soient nationaux ou internationaux devrait augmenter. 21% des voyageurs prévoient d'augmenter leur budget voyage cette année par rapport à 2013. 85% des voyageurs interrogés se disent prêts à faire des sacrifices sur d'autres postes de dépense pour augmenter leur budget voyage. L'enquête révèle également que la planification du voyage est dominée par les ressources en ligne et que les avis sur Internet transforment le voyage ; «51% des voyageurs dans le monde ont écrit un avis sur un hébergement après un voyage et 93% des voyageurs dans le monde disent que les avis en ligne ont un impact sur leurs décisions de réservation ». Pour les Algériens aussi, Internet est devenu un outil d'aide indispensable à l'organisation des voyages. «Les voyageurs se renseignent d'abord sur Internet avant de venir nous voir et même quand nous leur conseillions des destinations, des hôtels,… ils préfèrent revenir à Internet pour prendre la décision finale», a déclaré la gérante d'Alltour, en ajoutant : «En plus d'avoir changé les comportements des voyageurs, Internet nous a permis d'améliorer notre façon de travailler et surtout de communiquer avec nos clients. Nous faisons la promotion de nos produits sur les réseaux sociaux et des sites Internet tels que Ouedkniss.com Quant aux devis, nous les envoyons par mail aux clients pour leur éviter les déplacements. C'est plus simple et plus rapide.» La Tunisie fait fuir les algériens Sans surprise, nous avons appris par nos interlocutrices que les destinations locales ne sont pas attractives pour les Algériens qui préfèrent passer leurs vacances à l'étranger. «En plus du manque d'infrastructures, les voyageurs ne sont pas bien accueillis», regrette Amina Sahraoui, la gérante de l'agence de voyages Amina Tours. De son côté, notre interlocutrice d'Alltour se plaint de la cherté des prestations : «Passer une semaine à Zéralda peut coûter beaucoup plus cher qu'un séjour en Tunisie», explique-t-elle.Mais il n'y a pas que les destinations locales qui font fuir les Algériens, à notre grande surprise la Tunisie également. En effet, nos interlocutrices affirment que les entrées des Algériens ont beaucoup diminué cette année. Coup dur pour les professionnels du tourisme du pays du jasmin, sachant que les touristes algériens représentent 20% des entrées globales. Et ce, selon les dernières déclarations de Wahida Jaïet, la directrice de l'Office national du tourisme tunisien (ONTT). Toutefois, si cette dernière prévoit un retour à la normale en 2014 et table sur 1 million d'entrées, nos interlocutrices, elles, sont pessimistes. «Il est vrai qu'à 50 000 da le séjour, la Tunisie est abordable pour les Algériens, en plus ils n'ont pas à demander un visa, ils peuvent s'y rendre par voie terrestre. Par contre, ils seront moins nombreux à partir car les prix ont beaucoup augmenté cette année et les hôteliers appliquent une tarification spéciale pour les Algériens», dit-elle. «Autrement dit, explique-t-elle, si vous êtes citoyen européen vous paierez beaucoup moins cher votre séjour en Tunisie qu'un Algérien. Sans parler de la qualité de service qui s'est nettement dégradée. La plupart des clients qui sont partis sont revenus mécontents. Le bouche à oreille fera certainement son effet ; par conséquent, la fréquentation du pays va baisser et ce n'est pas la situation sécuritaire qui est en cause», soutient la gérante de l'agence Amina Tours. La qualité prime sur les prix cassés Le constat est unanime, les comportements ont évolué et les voyageurs algériens sont aujourd'hui en attente de qualité. «Même s'ils souhaitent contrôler leurs dépenses, ils n'acceptent plus de partir dans n'importe quelles conditions et ils sont prêts à payer plus pour passer un bon séjour. Il faut savoir que les voyages restent gravés dans la mémoire de nos clients à tout jamais», déclare la gérante d'Amina Tours. «Nous leur vendons du rêve», ajoute-t-elle. Autre tendance, celle du sur-mesure. Les Algériens ont une préférence pour les produits personnalisés : «les séjours à la carte», chacun en fonction de son budget et de ses attentes. A noter aussi qu'ils sont nombreux à réduire leur temps de séjour (une semaine à 10 jours). Ils voyagent généralement en famille, ils partent moins longtemps mais plus souvent tout au long de l'année, pas uniquement pendant les vacances d'été. Côté organisation, selon nos interlocutrices, les voyageurs algériens ne sont pas amateurs des voyages improvisés. Ils ne s'y prennent pas à la dernière minute. Au contraire, ils prennent le temps de préparer leurs vacances. «Ils sont conscients qu'il faut s'y prendre à l'avance pour avoir des prix intéressants et aussi pour éviter que tout soit complet, ce qui est le cas pour le mois d'août actuellement», explique Mme Kezzal de l'agence de voyages All Ways Travel. Un marché fortement concurrentiel Le nombre d'agences de voyages ne cesse d'augmenter d'année en année. La concurrence impose aux acteurs du marché de communiquer davantage et sur plusieurs canaux de communication. «Nous faisons des annonces sur le site Internet Ouedkniss, sur les journaux, nous faisons également passer des spots publicitaires sur des chaînes télévisées», déclare notre interlocutrice d'Alltour. Du côté d'All Ways Travel, notoriété et réactivité sont les maîtres-mots. «Nous restons joignables 24h/24. Un numéro est mis à la disposition des voyageurs. Ils peuvent appeler à n'importe quelle heure pour signaler un problème et nous pouvons réagir en conséquence», dira la gérante d'All Ways Travel. Quant à l'agence Amina Tour, c'est le rapport qualité/prix qui constitue son atout. «Notre agence se différencie par un bon rapport qualité/prix. Par ailleurs, nous accordons beaucoup d'importance à l'accueil des clients. On prend le temps qu'il faut pour les écouter et les orienter. Nous sommes conscients que l'organisation d'un séjour demande beaucoup de réflexion», affirme Amina Sahraoui.
