Encore une fois, on va recourir aux importations pour satisfaire la demande nationale. Non pas en fruits exotiques, c'est déjà fait. Bananes, kiwis et plaquemines trônent depuis pas mal de temps sur les étalages des marchés… c'est d'oignons secs dont il est question ! Après la pomme de terre, les autorités du ministère du Commerce vont autoriser l'importation de ce bulbe qui, apparemment, est à la base de notre alimentation. On ne saurait envisager un plat sans oignon ; ce qui pourrait être évident pour ce cas, l'est moins pour la plaquemine qui ressemble vaguement à la tomate. Cédée au détail à 300 DA le kilo, elle n'est plus une curiosité des étals, mais suscite la question de savoir si ce fruit est aussi indispensable dans notre alimentation que le laisse supposer sa présence dans les marchés. Face à une telle situation, on ne peut s'empêcher de se demander pourquoi et comment on en est arrivé à de telles aberrations, pis encore : envisager de ramener tubercules et bulbes de l'étranger jusque dans nos assiettes ! Rien ne le justifie ; pas de sécheresse ni de mauvaises conditions climatiques qui auraient pu expliquer la rareté de tels légumes, encore moins une surconsommation, pommes de terre et oignons ne suffisent pas à eux seuls et ne peuvent constituer des produits de substitution. Certains diront que ce sont les paradoxes de l'agriculture algérienne. Les plus anciens se rappellent que dans les années 1970, à l'époque du «tout-étatique», l'absence de concentré de tomates sur le marché avait fait dire à un lointain prédécesseur de l'actuel ministre du Commerce, face à des millions de téléspectateurs algériens, que si une telle pénurie était fortement ressentie, c'était tout simplement parce que la ménagère algérienne avait perdu l'habitude de nos mères et grands-mères de tout mettre en conserves en pleine saison, tomates et autres piments en vue de périodes difficiles. Cette «mise en boîte» ratée des consommateurs algériens, par Abdelghani Akbi, lui aura sans doute coûté son poste ; il fut relevé de ses fonctions. Depuis, tous les régimes successifs, plutôt que de s'attaquer aux dysfonctionnements chroniques de l'agriculture, de son environnement commercial et financier, ont préféré recourir plus facilement aux importations, des solutions palliatives grevant fortement les recettes en devises. M. Benyounès ne fait pas mieux que ses prédécesseurs. C'est sans doute le drame du pouvoir algérien. Aujourd'hui, avec moins d'Etat que jadis pour ne pas dire absence totale d'Etat, ce sont les Algériens qui en payent les conséquences. Pas tous malheureusement, parce qu'une minorité s'en met plein les poches en détournant la manne des ressources en devises qui fond comme neige au soleil, à son profit exclusif, profitant de l'inconséquence des décideurs et du «laisser-aller» érigé en mode de gouvernance. La corruption et la prévarication des responsables achevant cette entreprise criminelle de destruction de l'Algérie.