Les références politiques et sociales ne figurent pas explicitement dans le récit, à la manière du chef-d'œuvre de John Steinbeck Les raisins de la colère, œuvre adaptée avec succès au théâtre et au cinéma, mais on pense bien sûr à Steinbeck quand on voit le film français (en compétition) : Le dernier des fous, de Laurent Achard. Une histoire sombre, sans espoir d'une famille de fermiers qui perd tous ses repères parce que leur ferme périclite, la situation économique du secteur rural étant en nette dépression. Une dépression terrible qui atteint tous les membres de cette famille qui est condamnée à vendre mais qu'une fatale mécanique psychologique conduit à sa perte. Le dernier des fous est vu entièrement à hauteur d'un gosse de 10 ans Martin, le benjamin de la famille, qui parvient à trouver du réconfort auprès de la cuisinière de la famille, ici jouée par Fettouma Bouamari (au top de son art). Martin assiste sans rien comprendre à la dérive de sa famille. Une très dure descente aux enfers. Les uns s'affrontent aux autres et Martin voit l'horreur devant lui sous toutes ses formes. On pressent dès le début du film que cette histoire va très mal tourner et c'est ce qui se passe. Laurent Achard dit qu'il s'est inspiré d'un roman canadien de Thimothy Findley qui traite de l'enfance et de la famille. Il a donc tenté de transposer dans la France rurale un récit qui se passe au sein de la bourgeoisie canadienne des années 1960. Ensuite, il a failli adopter ce qu'on appelle une « vision d'enfant », chose extrêmement difficile parce qu'on ne sait jamais à quoi pense un enfant surtout quand tant de désespoir et de confusion l'entourent. Laurent Achard a très bien réussi son travail de mise en scène. Son film transmet une sacrée dose d'angoisse. En plus, les acteurs sont tous excellents, à commencer par le tout jeune Julin Cochelin qui joue Martin. Aux côtés de Fettouma (encore une fois superbe dans cette galère), il y a aussi Annie Cordy, Pascal Cervo, Dominique Reymond, Jean-Yves Chatolais... Et il serait souhaitable que samedi le jury n'oublie pas Le dernier des fous. Au fait, il y a eu un mini-scandale à propos du jury cette année. On s'est aperçu qu'un de ses membres a participé à l'écriture du scénario d'un film en compétition ! La personne s'est vite retirée mais la presse suisse a crié au scandale... Comme on l'a vu au cours des années, au festival de Locarno notamment, le cinéma iranien a bien tenu la rampe du succès grâce à sa rare qualité (Kiarostani) et à l'abondance de sa production. Mais ces derniers temps, on ne voit plus tellement de films iranien. Il y a cependant au moins une œuvre intéressante qui a réapparu à Locarno cette année : Chahar Shanbeh Souri, qui se déroule pendant la fête du nouvel an iranien qui tombe le 21 mars, premier jour du printemps. Le réalisateur Asghar Farhadi, alors que Téhéran est illuminé pour la fête et que les pétards explosent, filme une série de tableaux au sein d'une famille bourgeoise qui se dispute à la veille d'un voyage à Dubaï. On apprend plein d'invectives en langue persane !