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L'organisation de la sécurité lors du rendez-vous historique
50e anniversaire du congrès de la Soummam
Publié dans El Watan le 20 - 08 - 2006

En effet, tout évolue dans la vie et principalement une guerre révolutionnaire qui est en constante ébullition et même déchaînée, à l'image d'une mer habitée par la tempête ou d'un fleuve qui charrie dans ses eaux en furie, tout ce qui peut être arraché tout au long de son parcours.
Dans les maquis, les responsables étaient emballés et emportés par la mission sacrée que leur ont confiée leurs propres chefs qui furent à l'origine du déclenchement de la guerre de libération. Passionnés par le combat contre le colonialisme, ils sont emportés par cette fougue du devoir à accomplir, à savoir :
Visiter, dans le plus grand secret, tous les villages les uns après les autres ;
implanter les OPA au niveau de chaque village ;
partir à la conquête des douars et des villages, jusqu'à faire jonction avec les groupes de moudjahidine des régions voisines ;
organiser la chasse aux traîtres, aux collaborateurs et contre les agents de l'administration coloniale ;
exécuter tous les récalcitrants, les traîtres et tous ceux qui se sont dressés contre le FLN ou qui ont refusé d'exécuter ses ordres ;
sensibiliser la population sur la nécessité d'une adhésion totale au FLN. Ainsi, deux années se sont écoulées depuis le déclenchement de la guerre. Aussi, il devenait impératif d'organiser un congrès dans les maquis. Mais comment s'y prendre ? Quel-est le lieu qui garantirait la condition essentielle de sécurité des congressistes ? La sécurité des responsables était une chose primordiale ! Qui pouvait la garantir ? Aucun endroit, aucun lieu ne pouvait être considéré comme étant en mesure de réunir les conditions de sécurité ; comme également, aucun responsable ne pouvait se targuer de répondre de la sécurité tant recherchée pour mettre à l'abri les congressistes d'une éventuelle attaque de l'armée coloniale. « Il faut être fou pour organiser un congrès », telle était la boutade de Abbane Ramdane, après que les travaux eurent été clôturés. En effet, oser réunir tous les chefs de l'ALN et du FLN en un lieu qui ne présentait pas de garanties particulières de sécurité était un pari non gagné d'avance. C'était un projet fou. En effet, imaginons un instant que l'ennemi soit informé de ce rassemblement et, avec les moyens monstres dont il dispose, il pourrait facilement envahir les lieux et peut-être anéantir nos positions, sinon tuer quelques responsables. La Révolution serait alors ébréchée et amputée de plusieurs de ses chefs. Et puis, ça aurait été un affront pour nos chefs d'avoir subi de tels revers. Mais ceux qui connaissait Amirouche et ses collaborateurs ont fini par leur faire confiance Les chefs de la Soummam ont pris en compte plusieurs facteurs qui doivent entrer en lice afin d'assurer le bon déroulement de ce conclave, la sécurité des congressistes, en un mot le succès des travaux. L'organisation de la sécurité du congrès est un volet primordial. Comment a-t-on procédé pour assurer une couverture des villages ?
Le choix du lieu du congrès
A l'origine, il y avait un lieu qui était brigué : c'était la Kelaâ des Aït Abbas, près d'Akbou. Il semblerait qu'auparavant, il y aurait une proposition de l'organiser dans le nord constantinois. Mais pour des raisons que nous ignorons, ce projet n'a pas connu de suite. C'est ainsi que l'unanimité s'est faite autour de la Kabylie, précisément pour la Kelaâ des Aït Abbas. Pourquoi précisément la Kelaâ ? Ce ne fut pas un hasard, bien sûr, puisque tout le monde connaissait son histoire, surtout celle du Bachagha El Mokrani, le résistant aux forces d'invasion française, l'organisateur de l'insurrection de 1871 ; il y avait aussi Boumezrag, Boubaghla, cheikh Aziz et Cheikh Ahaddad...Ils constituèrent le symbole de la lutte contre l'envahisseur pour cette fin du XIXe siècle. Les chefs des maquis, en voulant organiser un congrès à La Kelaâ, espéraient rendre hommage à ces héros de la résistance, ainsi qu'à cette région qui a souffert des représailles et qui continue à subir les assauts de l'armée coloniale. Ils voulaient symboliser le transfert du flambeau de la lutte de la génération d'El Mokrani à celle de novembre qui a repris le même combat libérateur ; il y eut l'unanimité autour de ce choix. Malheureusement, un incident de dernière minute est venu remettre en cause l'endroit et le transférer vers Ifri. Il s'agit de la fameuse affaire de la mule qui a rejoint le poste militaire, avec son chargement de documents destinés au congrès. Les Français avaient pris connaissance des projets de documents du congrès avant les congressistes eux-mêmes ! Quelle belle aubaine pour eux, puisqu'ils n'avaient pas organisé d'action dans ce sens et que ce butin de guerre leur a été offert par cette mule. Les responsables de la Soummam et à leur tête Amirouche, furent humiliés par une telle défaite. Comment une telle catastrophe est-elle arrivée ? Il s'agit tout simplement d'une bête de somme habituée à la ferme et qui s'est souvenue du chemin au moment où elle passait à proximité. Mais ce sont les militaires qui l'avaient accueillie, non sans grande surprise, surtout lorsqu'ils découvrirent la nature du chargement ! Ce fut pour eux un cadeau inespéré que de recevoir des documents ultrasecrets sans avoir cherché à les récupérer, sans aucune peine, comme s'ils étaient tombés du ciel ! Lorsque le « pot aux roses » fut découvert, l'alerte fut aussitôt donnée des deux côtés ! D'une part, pour les chefs de l'ALN, l'incertitude régnait quant à la destination des fameux documents ; donc il fallait détourner l'attention de l'ennemi. D'autre part, pour l'armée coloniale, et nous l'avions appris bien plus tard, avait bel et bien réceptionné les documents ; il fallait donc que le secret soit gardé jalousement pour mieux surprendre les chefs qui avaient projeté de se réunir, et les officiers français le savaient bien. Il leur fallait développer le renseignement pour percer le mystère du lieu de réunion. Il est vrai que longtemps après cet incident, les chefs des maquis ne possédaient aucune preuve que les documents concernés se trouvaient entre les mains de l'ennemi. D'ailleurs, le colonel Si Nacer (Mohamedi Saïd), présent sur les lieux de l'embuscade, avait déclaré une décennie après l'indépendance, que les documents et l'argent seraient récupérés par un quelconque fellah ! Le doute avait donc continué à planer sur leur destination. Comment l'avions-nous su ? Tout simplement parce que le correspondant de la Dépêche de Constantine a envoyé à son journal, un billet daté du 24 juillet 1956 faisant état de la mainmise par l'armée des « archives de Krim Belkacem transportées par une mule ». Et ce n'est que le samedi 22 septembre 1956, soit deux mois plus tard,que le quotidien a publié la nouvelle qui était d'ailleurs passée inaperçue aux yeux des responsables de l'ALN et du FLN. Ce fut le « canard enchaîné » de l'époque qui nous a révélé l'affaire, en voulant tourner en dérision l'armée française : « un bourricot fait prisonnier. Il transportait les archives de Krim Belkacem. » Le journal satirique est tombé entre nos mains, un peu moins d'un demi-siècle après l'incident ! Une telle révélation, pourtant publique, est passée inaperçue au maquis, puisque personne n'en a soufflé un mot. Amirouche et les autres chefs ont préféré s'éloigner de la Kelaâ par mesure de précautions ; il fallait en urgence arrêter un autre lieu, puisque les délégations commençaient à arriver de l'Est, comme de l'Ouest. A l'Est, c'est la délégation du nord constantinois qui est annoncée presque la première ; elle s'est d'ailleurs accrochée avec un détachement ennemi dans la forêt de Boni, à deux heures de marche de la Kelaâ, initialement prévue pour accueillir le congrès. Cet accrochage n'était pas le fait du hasard, puisqu'une opération militaire fut déclenchée dans la région, que le village de Kelaâ fut bombardé etc. Parmi cette délégation, il y avait Zighout Youcef, le chef légendaire de cette zone, son adjoint Lakhdar Bentobbal, non moins illustre, Brahim Mezhoudi, Ali Kafi, Amar Benaouda etc. Le fait élogieux pour ces chefs, c'est qu'ils récupérèrent quelques armes, dont un fusil mitrailleur ! Quel beau palmarès pour les chefs de cette trempe ! A l'Ouest, la délégation de la Wilaya IV était déjà arrivée. Il y avait Ouamrane, Saddek Dhilès ; ils étaient accompagnés de Mohamedi Saïd, Krim Belkacem et Mira Abderahmane qui s'apprêtaient à traverser, tous ensemble, la route nationale, lorsqu'ils furent accueillis par un feu nourri ; ils venaient de tomber dans la fameuse embuscade. D'ailleurs, la « mule traîtresse » transportait en plus des archives, la sacoche de Mohamedi Saïd qui contenait la somme de 8 millions de centimes et celle d'Ouamrane qui devait contenir une somme pas moins importante, selon témoignage de Mohamedi Saïd. Ainsi, il y avait urgence à trouver un endroit qui abritera le conclave, sinon les responsables se heurteraient à un cafouillage avec toutes les délégations qui continuaient à se présenter. Après concertation, ils mirent le cap sur Ouzellaguen, près d'Ighzer Amokrane.
Pourquoi le choix d'Ifri ?
Le choix du douar Ouzellaguen n'était pas fortuit, puisque Krim Belkacem, le chef de la Kabylie, était là et qu'il n'était pas du genre à prendre les choses à la légère. Il comprit qu'il fallait un lieu répondant surtout aux conditions de sécurité. Bien sûr qu'il connaissait peu la petite Kabylie, mais il avait confiance aux responsables de la vallée de la Soummam. Il se concerta donc avec Amirouche, Mira Abderahmane, Hamaï Kaci...Il semble que l'unanimité s'est faite autour du choix de Ouzellaguen. Pouvons-nous nous interroger sur ce choix spécialement ? Pour un chef de l'ALN soucieux de la sécurité de ces responsables de haut niveau et de la réussite du congrès, il n'hésitera pas à opter pour le massif de l'Akfadou qui se trouve à une étape de marche du lieu convoité. Avec un pareil massif forestier qui s'étend sur plusieurs centaines d'hectares, la sécurité est presque garantie et le secret ne risquait pas d'être dévoilé. Il y avait aussi le Djurdjura ou la région de Beni Ksila qui était déjà zone interdite ; ces trois endroits auraient pu convenir, mais les responsables ont opté à l'unanimité pour Ouzellaguen.
Les avantages du relief
Le relief du douar Ouzellaguen n'avait rien de particulier. Encaissé entre le douar Aït Oughlis à l'Est et le douar Chellata à l'Ouest, Ouzellaguen est accroché à un flanc de montagne qui s'étale depuis l'oued Soummam en aval, jusqu'au rocher de Timliouine en amont, qui marque le point de départ de la chaîne du Djurdjura. Entre les deux, il y a un chapelet de villages qui s'étend de Aghendjour, jusqu'à Timliouine, en passant par Tigrine, Sidi Younès, Ifri et en montant plus haut, nous parvenons enfin à Tizi Maghlaz et à droite, le village Timliouine, qui voisinent à eux deux, les 1000m d'altitude. Deux éléments importants sont à mettre à l'avantage de douar : il s'agit de l'existence d'une immense oliveraie qui s'étend sur tout le douar, jusqu'aux derniers villages situés en amont. Ce détail a son importance en prévision des combats, notamment lors de l'intervention de l'aviation et de l'artillerie. L'autre élément, c'est la proximité du douar par rapport à l'Akfadou. En effet, après avoir traversé le village de Sidi Hend Oussaïd, il faut entamer un piémont boisé pour parvenir à Zène Amechtouh, mais après un parcours de quelques deux kilomètres de clairière, ce qui, malheureusement, ne sera pas à notre avantage, puisque l'aviation et l'artillerie auront vite raison des moudjahidine qui tenteraient de rejoindre la forêt. C'était un risque à ne pas négliger.
La fidélité de la population
La population du douar est connue pour sa fidélité à l'ALN depuis le déclenchement de la guerre de libération. Il n'y avait point de harkis, ni de goumiers et même pas un poste militaire ; seul celui d'Ighzer Amokrane en aval, se contentait de surveiller les alentours par des patrouilles ; parfois il envoyait à l'aveuglette quelques obus afin de faire du bruit et peut-être pour rappeler sa présence ! Deux avions « Morane » balayaient quotidiennement le douar, en tirant à la mitrailleuse sur les troupeaux et les bergers qui se hasardaient à aller jusqu'à Ouanari, une immense prairie en altitude convoitée pour la transhumance dont l'ennemi a décidé de considérer comme zone interdite depuis peu. Chaque jour, ces deux avions volaient en rase- mottes pour mitrailler sur tout ce qui bouge. Combien de bêtes ont été ainsi tuées ? Des centaines qui faisaient partie du troupeau collectif constitué par le rassemblement des ovins et bovins des villages, appelé communément akhdar, furent impitoyablement décimés. Mais le plus important dans tout ça, c'est la confiance des moudjahidine à l'égard d'une population fidèle à l'ALN et au FLN, même si elle subit des représailles à chaque opération militaire. Elle continue à résister face à des massacres, à des bombardements et aux destructions. En plus de ces données, nous connaissons la tactique induite par l'ennemi à chaque opération de ratissage. Elle fut la même et ce pendant plusieurs mois. Dans ce type d'opérations, l'ennemi prend position de très bonne heure, peut-être vers quatre heures du matin, comme suit :
Sur le flanc est, l'armée, à partir du camp d'Ighzer Amokrane, se déploie en amont vers les villages Aghendjour, Tigrine, Sidi Younès et Aghoulad qui subissent un encerclement, afin que personne ne puisse y entrer ou en sortir.
Sur le flanc ouest, les militaires progressent par camions sur la route venant d'Akbou, en passant par Chellata, pour arriver jusqu'à Tazrout, Ighil Oudlès, Ifri et Timliouine. De là, les soldats s'apprêteront à boucler les villages traversés, puis Tizi Maghlaz, d'où ils pouvaient dominer tout le douar, et surveiller ainsi les positions des moudjahidine et tous les mouvements suspects. Du côté nord-est, ce sont les soldats en provenance de Chemini qui occupent Semaoune, Tighilt Touzouighte et qui descendront jusqu'à Bouchibane pour les encercler.
Du côté nord, les soldats en provenance du poste de Hora (Grande Kabylie) se posteront en amont sur les rochers de Timliouine, Ouanaris et Chréa pour prendre position et empêcher les moudjahidine, les moussebline et la population qui tenteront de vouloir sortir du ratissage afin de rejoindre Aït Zikki ou Aït Idjeur en Grande Kabylie. Voilà en quelque sorte, la tactique de l'armée française lorsqu'il s'agit de ratisser le douar ; l'armée française procédera, au lever du jour, à déployer ses soldats en fouillant et tirant partout. Des quatre points cardinaux, ils allaient avancer très prudemment bien sûr, mais seulement après l'arrivée des avions. Et le premier à pointer le nez à l'horizon, sera le « peeper » qui se mettra à fouiller en vol plané à travers les sous-bois, à la recherche d'indices. Parfois, il arrive à partir de la montagne, les gaz coupés en volant à ras de terre et en suivant les déclinaisons du terrain pour mieux nous surprendre. Alors, il lui suffira de lancer une grenade lacrymogène, pour qu'apparaissent les B26 qui piqueront à tour de rôle pour lancer leurs bombes de 5 quintaux. Telles étaient les habitudes de l'ennemi pour investir le douar. Il fallait absolument connaître les plans ennemis dans son déploiement pour mieux le contrecarrer, pour prévoir les moyens les plus efficaces pour les faire échouer. Toutes ces données sont intéressantes pour Amirouche et les autres chefs afin de mieux cerner les problèmes de sécurité du congrès. Et c'est en tenant compte de toutes ces données d'une importance vitale, que les forces de l'ALN allaient être déployées. L'implantation des villages garnisons de l'ALN pour la durée du congrès Ainsi, compte tenu de toutes ces données, des habitudes de l'ennemi, de ses plans, il fallait adapter une tactique pour faire face à éventuelle invasion du douar par l'ennemi, pour sauver le congrès, mais surtout la vie des congressistes. Pour les chefs de l'ALN et du FLN de la Soummam, c'est un défi qu'il fallait relever sur l'ennemi. L'implantation des villages garnisons s'est faite exactement telle que décrite plus haut, en tenant compte du plan de progression des soldats. Il s'agit de déployer les 3 000 combattants de l'ALN sur les quatre points cardinaux. Le plan consistait à ne pas jeter les hommes dans la nature, mais au niveau des villages, du moins aux alentours pour tendre un guet-apens à l'ennemi. Les villages sécurisés sont les suivants :
Sur le flanc est : Aghendjour, Tigrine et Sidi Younès seront l'objet de patrouilles nocturnes et surtout le matin de bonne heure, pour prévenir toute incursion de soldats à partir du camp de Ighzer Amokrane.
Sur le flanc ouest, les villages Ighil Oudelès, Tazrout et plus loin vers Alma.
Le cordon de sécurité
Ainsi, les villages se trouvant à la périphérie servent de garnison pour l'ALN, de sorte à sécuriser ceux qui se trouvent au Centre, comme le noyau où doivent se tenir les réunions. En effet, pour des raisons de stratégie, les réunions se faisaient à tour de rôle au niveau d'Ifri, Timliouine, Ighbane et Izemourène. Une telle initiative permet, en effet, de mettre à l'abri les congressistes d'un assaut de l'ennemi, en cas de fuite. La méthode fut efficace, puisque même les villageois trop curieux penseront que les concernés ont quitté le douar, alors qu'ils ont simplement rejoint le village d'à côté.
La circulation des hommes
La circulation de jour est formellement interdite pour les moudjahidine. En effet, il s'agissait de ne pas dévoiler les positions de l'ALN et se mettre à l'abri de la surveillance ennemie dont le poste d'observations pouvait jaillir de n'importe où. Cette règle est donc impérative. Pour les civils, des mesures draconiennes sont prises pour limiter la circulation. Le chef de chaque village est seul habilité à autoriser leurs déplacements. Les personnes devant se rendre à Ighzer Amokrane devaient être triées sur le volet, pour leur éviter de dévoiler, même involontairement, les positions des moudjahidine. Par contre, il ne fallait pas non plus décréter un blocus pour la population, car l'armée française comprendrait vite qu'il y avait quelque chose de louche ! Il fallait éviter d'attirer le regard ennemi ou de susciter un quelconque soupçon de sa part.
Amirouche, le coordonnateur de cette armée
Amirouche était responsable du déploiement des forces de l'ALN. Il était secondé par Si Hamimi Oufadel, Aïssa Boundaoui et Oudek Arab. Les liaisons se faisaient surtout de nuit, mais Amirouche, entre deux séances, se permettaient de se rendre à l'improviste au niveau des unités pour contrôler leurs positions, leur vigilance et s'enquérir de leur situation. Ses ordres étaient strictes : ne jamais bouger des positions, quelles que soient l'importance des forces ennemies. Il s'agit de tenir à n'importe quel prix, jusqu'à la tombée de la nuit, ceci pour permettre éventuellement aux responsables d'avoir le temps de sortir de l'opération
L'organisation des actions de diversion
Des groupes de moudjahidine avaient pour mission de sillonner la région est (Adekar, Bougie…) Au douar Ath Mansour, c'est le groupe Ghezali Hamou dit « Mlikchi » avec Aïsssa Arab et Mokrane Harani, comme adjoint. Ils étaient postés là, en prévision d'une attaque ou dans l'attente d'un appel en renfort vers Ouzellaguen. A l'Ouest, les portes de fer, Bouira et le flanc sud du Djurdjura, par le commandant Mira Abderahmane. Ces groupes devaient harceler les soldats, juste pour signaler leur présence et les empêcher de se concentrer éventuellement à l'endroit du congrès et de détourner leur attention.
Comment nourrir toutes ces forces, sans attirer l'attention de l'ennemi
Le problème de nourrir 3000 moudjahidine s'est posé d'une façon cruciale. En effet, comment nourrir des effectifs aussi importants, jamais déployés jusque-là, sans attirer l'attention de l'ennemi ou simplement des curieux. Il serait trop flagrant de ramener 3000 pains par jour ! Ce serait trop flagrant ; comment commander autant de pain et le transporter sans attirer l'attention de l'ennemi. C'était pratiquement impossible, sans risquer de se dévoiler aussitôt. Pour remédier au problème, il y eut le même repas pour tout le monde : couscous et galette auxquels, il faut ajouter les fruits et légumes des jardins potagers des villageois. La solution est trouvée, puisque les quantités de semoule ne seraient pas importantes. Et puis, chaque famille devait préparer sa part de couscous ou de galette en puisant de ses réserves de semoule, en attendant de se faire rembourser. Connaissant la sobriété des moudjahidine et l'ingéniosité des femmes, les repas seront prêts au bout quelques dizaines de minutes. C'est ainsi que tous les moudjahidine et les moussebline se sont restaurés sans problème, grâce à la solidarité de tous les villageois. Ce qui est miraculeux, c'est que 3000 hommes ont séjourné à Ouzellaguen pendant une dizaine de jours, à deux heures de marche du camp militaire, sans qu'il y ait la moindre alerte et surtout sans que l'ennemi n'ait eu le moindre doute ! Et ce fut à la satisfaction de tout le monde que le congrès prit fin, avec la réussite que nous connaissons. Alors, chaque délégation reprit le chemin du retour, avec la satisfaction du devoir accompli et surtout avec dans ses bagages, la charte de la Soummam qui deviendra désormais, un code de conduite pour tous les moudjahidine. La Wilaya III tira alors la fierté d'avoir réussi le défi, d'avoir organisé le congrès dans de très bonnes conditions et d'avoir réalisé, un fait unique dans l'Histoire de la guerre de libération, qui est la rencontre de tous les chefs des maquis. Une telle initiative ne se reproduira plus malheureusement, du moins au niveau de l'Intérieur. Pour des raisons évidentes de sécurité, de telles réunions se tiendront désormais à l'extérieur, au grand regret des chefs des maquis !


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