Les Etats-Unis de l'après 11-septembre semblent plongés dans une atmosphère liberticide contredisant les amendements de la Constitution américaine et les principes des droits et des libertés, notamment la liberté d'expression. Les journalistes américains se voient, par exemple, nier le droit à la protection des sources. Reporters sans frontières (RSF) a alerté sur le cas du journaliste blogger Josh Wolf (The Revolution will be televised est le titre de son blog), emprisonné le 1er août dernier à San Francisco pour avoir refusé de livrer à la justice une vidéo tournée en juin 2005 lors d'affrontements entre anarchistes et policiers pendant un sommet du G8. Le journaliste a été incarcéré au centre de détention fédéral de Dublin en Californie, sa demande de liberté conditionnelle ayant été refusée. Trente-et-un Etats de l'Union sur 50, reconnaissent aux journalistes le privilège du secret professionnel, mais tel n'est pas le cas au niveau fédéral, note RSF. Les affaires du genre deviennent de plus en plus fréquentes alors que s'est installé un climat de peur et de suspicion sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme. Selon le Patriot Act, voté 45 jours après les attentats de 2001, le FBI a, sans devoir se justifier ni fournir une cause probable, le droit d'accéder au dossier médical, aux fiches de bibliothèque, au dossier scolaire des citoyens et ce, dans le secret et sans crainte de voir ces débordements rapportés par les médias grâce aux dispositions de cette loi. L'administration Bush a estimé que les informations embarrassantes pour elle devaient être gardées secrètes pour des raisons de sécurité nationale. Par conséquent, il est difficile pour les journalistes de trouver des informations sur l'application du Patriot Act, voire même de savoir si des chapitres particuliers de la loi ont été utilisés. La Fédération internationale des journalistes (FIJ) a noté dans un rapport sur les « libertés civiles de la guerre menée contre le terrorisme » que l'administration Bush déploie une « tactique insidieuse » pour tenter de discréditer les journalistes qui tiennent des propos critiques vis-à-vis de la Maison-Blanche. En juillet 2003, Jeffrey Kofman, un reporter d'ABC News, évoqua le moral chancelant des troupes impliquées en Irak dans l'émission World News Tonight, interviewant des soldats remettant en question la crédibilité de l'armée américaine. L'un d'entre eux suggéra amèrement que le secrétaire d'Etat à la Défense, Donald Rumsfeld, devait démissionner. Le lendemain, un officiel de l'administration Bush contacta The Drudge Report (un site Internet) afin de discréditer Kofman personnellement, racontant à Drudge que Kofman n'était pas crédible en ce qu'il était gay et de nationalité canadienne. A rappeler le cas troublant du journaliste américain, Christopher Bollyn, qui a été séquestré à son domicile pendant six heures à Hoffman Estates, dans la banlieue de Chicago le 16 août dernier. Il a été passé à tabac devant sa femme et ses enfants. Selon ses déclarations, ses agresseurs auraient été des policiers locaux. Christopher Bollyn s'est fait connaître par ses articles contestant la version gouvernementale des attentats du 11 septembre et par ses enquêtes sur le groupe de Bilderberg. Il publie dans American Free Press, un hebdomadaire pluraliste qui ouvre ses colonnes à tous les critiques du gouvernement fédéral. La Chambre des représentants a adopté, le 29 juin dernier, par 227 voix contre 183, une résolution présentée la veille, qui soutient le programme de surveillance des transactions bancaires internationales mené par l'administration Bush dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Cette résolution vaut condamnation contre les médias qui ont révélé l'existence de ce programme, à commencer par le quotidien New York Times, cible d'attaques véhémentes de l'exécutif et de la majorité parlementaire. Certains élus républicains réclament le bannissement du Congrès des journalistes accrédités du grand quotidien (qui s'est opposé à la guerre en Irak et qui était favorable au candidat démocrate lors des élections de 2004). D'autres vont jusqu'à demander que ces derniers soient poursuivis pour haute trahison. Le 29 août dernier, Donald Rumsfeld, secrétaire d'Etat à la Défense, a critiqué la presse américaine jugée « trop défaitiste » lui reprochant de rendre la réalité des difficultés de l'armée US en Irak.