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Savoir et sécurité alimentaire en Algérie
Publié dans El Watan le 01 - 03 - 2016

Professeur à l'Ecole nationale supérieure d'agronomie depuis une quarantaine d'années, j'ai décidé de prendre la plume avec un collectif de mes collègues, au nom de notre responsabilité vis-à-vis de notre patrie, en ces moments particuliers pour notre économie nationale.
Nul besoin d'être spécialiste pour comprendre que troquer du pétrole contre du blé, ce n'est plus possible pour l'Algérie. Mais la recherche de solutions intelligentes est possible. Réinventer un autre modèle économique est possible. La situation est grave, mais pas désespérée. Avec 1 600 000 étudiants, c'est d'abord et avant tout le talent, la construction de la société de la connaissance et l'innovation qui peuvent être nos remparts face à la crise pétrolière. Le lien science, société et innovation, n'est pas un simple discours politique ou marketing.
Des données économiques mesurables mettent à l'évidence que les avantages comparatifs des nations sont de plus en plus fonction de leurs potentiels technologiques et de recherche. En une génération, des pays dits émergents ont été en mesure d'édifier des économies diversifiées efficacement insérées dans la division internationale du travail, de créer de la valeur à partir de compétences, et d'être compétitifs avec les pays anciennement industrialisés.
Pour nous agronomes, c'est la connaissance qui nous permettra de conduire une réelle stratégie nationale de sécurité alimentaire, dont les outils-clés ne sont pas encore maîtrisés dans notre pays, moins encore le sont les mécanismes de gouvernance ; des facteurs auxquels s'ajoutent les répercussions imprévisibles des changements climatiques sur le système alimentaire à l'échelle nationale et mondiale.
Construire un système de production agricole durable et compétitif aujourd'hui, c'est pouvoir maîtriser non seulement la grande diversité des disciplines auxquelles il fait appel, mais également la complexité de leurs interactions. Voilà toute la difficulté à laquelle est confronté le système de production agricole et alimentaire en Algérie, qui demeure trop archaïque et loin de la technologie du vivant.
Le besoin de recours à la science et à la connaissance est encore plus fort dans des pays comme l'Algérie, en raison de l'insuffisance des ressources en eau qu'il faut gérer. Sur 180 pays étudiés par la FAO, l'Algérie est classée parmi les 17 pays les plus pauvres en matière de potentialités en eau, soit à moins de 30% du seuil de pénurie fixé par le PNUD, ou celui de rareté fixé par la Banque mondiale à 1000 m3/hab/an ; en Algérie, cette disponibilité représente actuellement moins de 300 m3/hab/an, alors que la moyenne mondiale est de l'ordre de 6700 m3/hab/an.
Face à ces défis de sécurité alimentaire nationale, pourquoi le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique continue-t-il d'ignorer les problèmes accrus que connaît depuis la rentrée universitaire l'unique grande école d'agronomie du pays qui s'est construite au fil d'un siècle d'existence ? Pourquoi aujourd'hui le fonctionnement de cet établissement stratégique pour l'économie algérienne est-il bloqué, alors que dans d'autres pays, les grandes écoles de son rang signent un contrat de performance avec l'Etat ?
La réalité est que notre drame réside dans le mutisme du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique qui assiste dans l'indifférence totale au démantèlement de cette école. En juin 2015, une demande d'audience lui a été adressée, signée par la moitié du corps enseignant de l'école, elle est restée sans réponse à ce jour. Si notre ministre a décidé d'entamer un bras de fer uniquement par représailles pour notre prise de position contre la destruction du jardin botanique centenaire de notre établissement qui devait être transformé en baraques de chantier de l'entreprise Cosider, il doit savoir qu'en sa qualité de ministre sa mission est justement d'ouvrir les portes du dialogue et de préserver les acquis de son secteur.
Les méthodes de gouvernance des établissements universitaires ont profondément changé, de même que les méthodes de dialogue et de construction avec l'élite universitaire ont profondément évolué, Monsieur le ministre. Aujourd'hui, c'est vers les scientifiques que les décideurs et les hommes politiques se tournent pour faire les choix les plus pertinents, dans un monde globalisé devenu tellement complexe que science, société et économie sont devenues indissociables.
Aujourd'hui, face à notre équation «périr ou exister autrement», ce que nous attendons de notre ministre, c'est de conduire le changement et de faire émerger un système universitaire capable de produire du talent et de l'innovation et non des chômeurs porteurs de désespoir. Ce que nous attendons, c'est qu'il nous permette en tant qu'universitaires de participer à la construction d'un nouveau modèle économique national, dans un contexte mondial très compétitif qui limite fortement nos marges d'erreurs.
Et qui d'autre mieux qu'un ministre de l'Enseignement supérieur peut transformer notre jeunesse en atout et en pétrole gris pour l'Algérie ?
Les dossiers que nous avons portés à la connaissance de notre ministre concernent des atteintes très graves à la crédibilité et la pérennité de cette école de la souveraineté alimentaire du pays. La réalité du terrain est marquée par le bradage de la pédagogie et les inscriptions illégales en classes préparatoires avec des moyennes inférieures à la moyenne informatique, sur dérogation du ministère, la marginalisation des compétences, le gel du projet de développement de l'établissement, la dilapidation du foncier de l'école, l'obsolescence de ses infrastructures de recherche… qui sont autant de dérives que notre ministère de tutelle continue de cautionner.
Ce qui nous gêne quand notre ministre déclare qu'il remettra au sein de l'Université algérienne la rigueur des années 1970, c'est que nous avons demandé, sans résultat, une enquête sur les inscriptions illégales de bacheliers 2015 en classes préparatoires de notre école, justement sur dérogation du ministère. Quelle suite va-t-il donner à ce grave dérapage contraire à la rigueur où «les relations et les privilèges» continuent à avoir la suprématie sur le mérite ?
A l'heure où les pays du monde entier construisent leur projection stratégique à 2030, notre ministre propose de remettre la rigueur des années 1970. Ce que nous attendons, ce n'est pas un retour en arrière de près d'un demi-siècle, mais une projection sur un nouveau modèle de système de formation qui nous conduira réellement à la construction de la société de la connaissance. Le monde appartient aux visionnaires, Monsieur le ministre.
Bien évidemment, cet exercice de projection est complexe tant il exige des capacités à analyser et à prévoir les évolutions technologiques, économiques et sociétales. Conduire le changement aujourd'hui, c'est se projeter et se préparer à l'adoption d'un modèle de formation dynamique, intégrant les systèmes d'innovation de demain qui feront appel à des acteurs et à des schémas très différents des systèmes actuels.
Dans ce contexte, ce qui est attendu de nos universités, et plus particulièrement de nos grandes écoles, c'est la formation de ressources humaines en capacité d'affronter la complexité, d'assembler des compétences diverses, de mobiliser des acteurs variés.
De même que ce qui nous gêne quand le ministre de l'Enseignement supérieur déclare pouvoir mobiliser 400 chercheurs au service du secteur de l'agriculture, c'est qu'il ne mesure absolument pas la grande fragilité de notre potentiel face à nos besoins et face aux stratégies d'alliances internationales.
Les pays développés considèrent que désormais aucune de leurs institutions ne peut s'autosuffire. Les grands domaines génériques comme la génomique fédèrent les équipes dans des programmes et des consortiums internationaux dotés de moyens et d'équipements de plus en plus lourds et sophistiqués. A l'échelle du système français, les deux établissements, l'INRA et le CIRAD, qui emploient à eux seuls un important vivier de plus de 5000 chercheurs et ingénieurs, ont créé le réseau des établissements agronomiques français Agreenium, qui fonctionne avec 600 accords de coopération à l'échelle internationale.
Face au poids des grands établissements européens et internationaux qui se regroupent autour de projets fédérateurs, il est évident que la fragilité du système de formation et de recherche en Algérie vient de sa dispersion à l'échelle nationale et de son isolement des alliances stratégiques internationales qu'on ne peut pénétrer que sous réserve de mise à niveau de nos capacités de recherche et de notre mode de gouvernance. Notre système national de formation et de recherche est donc appelé à reformuler intégralement sa stratégie avec des objectifs et des résultats clairement affichés dans la construction d'un nouveau modèle économique fondé sur la connaissance, le talent humain et l'innovation.
Mais comment atteindre ce stade de performance à l'Ecole nationale supérieure d'agronomie d'El Harrach face au mutisme de notre ministère qui cautionne la dégradation de nos conditions de travail, les inscriptions illégales en classes préparatoires, l'absence total d'un projet d'établissement, les intimidations et blocages…
Nous ne recherchons ni gloire ni argent, nous ne demandons qu'à servir notre pays par notre savoir. Nous demandons à notre ministre d'ouvrir les portes du dialogue et de soutenir notre institution au nom de la sécurité alimentaire de l'Algérie. La mission de notre ministre n'est pas de soutenir les hommes qu'il a placés, mais de soutenir le programme d'excellence des grandes écoles tel que tracé par son Excellence le président de la République qui a tant œuvré pour la société de la connaissance en Algérie.


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