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Droit d'asile
La loterie géante
Publié dans El Watan le 13 - 11 - 2006

Clémence Armand est l'une des rares personnes à témoigner de l'intérieur de l'Office français de protection de réfugiés et apatrides (Ofpra). On savait que l'accord ou le refus du droit d'asile relevait de l'arbitraire par manque de temps et par « l'obligation de résultat ». On découvre un monde où le destin se joue à la loterie. Clémence Armand signe un livre* bouleversant, écrit à la première personne.
Vous dites que l'attribution du droit d'asile en France se révèle être une loterie géante. Comment expliquez-vous cette situation ?
Cette formule est évidemment provocatrice. La réalité est plus nuancée que cela, mais ce que j'ai pu constater tout le temps que j'ai travaillé à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) est que, selon la période à laquelle un demandeur dépose sa demande, selon le pays dont il est originaire, selon l'officier de protection (OP) sur lequel il va tomber, sa demande peut être traitée différemment. Par exemple, lorsque j'étais à l'Ofpra, nous sommes passés d'un taux d'accord de près de 90% pour les ressortissants de Bosnie-Herzégovine, à un taux de près de 5% en à peine un mois. Je trouvais cela injuste et ne pouvais m'empêcher de penser lors d'entretiens où je savais que j'allais devoir rédiger une réponse négative : « Si seulement il était arrivé un mois plus tôt ! ». Dans le livre, j'ai également écrit un chapitre sur un homme originaire du Kosovo. Je ne savais pas quelle décision prendre. J'ai demandé conseil à plusieurs OP et tous m'ont dit de faire un rejet. Cependant, après plusieurs heures de recherches, j'ai réussi à montrer qu'il courrait un vrai risque en cas de retour dans son pays et j'ai pu faire un accord. S'il était tombé sur un autre OP, il aurait certainement eu un rejet. C'est pour toutes ces raisons que nous avons utilisé ce terme très provocateur de loterie.
Les demandes d'asile en France ne cessent de diminuer. A quoi est due cette baisse, à une politique plus restrictive de l'Etat français ? De l'Ofpra ? A un découragement des exilés... ?
La situation des demandeurs d'asile est en effet préoccupante. De plus en plus de circulaires et règlements visent à faire baisser la demande. Le dossier de demande d'asile envoyé à l'Ofpra doit obligatoirement être rédigé en langue française (ce qui n'était pas le cas avant), dans un délai de plus en plus court… Or les demandeurs d'asile n'ont pas toujours les moyens de payer un interprète, les associations qui accompagnent les demandeurs d'asile sont surchargées et il est parfois difficile de renvoyer son dossier dans les temps. De plus, si les familles ou les adultes avec enfants arrivent à trouver des hébergements, les adultes isolés sont en général sans domicile fixe et vivent dans des situations de grande précarité. Puis, avec l'augmentation très importante du nombre d'expulsions de personnes sans papiers, le travail d'officier de protection est encore plus difficile qu'avant, car, quand on fait un refus de statut de réfugié à quelqu'un, il y a beaucoup plus de chances qu'il y a encore quelques années, que cette personne soit expulsée vers son pays.
Quel est le profil d'un officier de protection ? Plusieurs associations mettent en cause la partialité de l'Ofpra, dans son obsession à faire du chiffre, à réduire le nombre d'accords...
Il y a de nombreux profils différents à l'Ofpra et c'est ce qui fait la richesse de cette institution ! La plupart des OP ont fait des études de sciences politiques, de droit, de relations internationales. Beaucoup parlent une langue étrangère (arabe, roumain, albanais, chinois…), ont voyagé dans les pays dont ils traitent la demande, ont travaillé dans des ONG, avec des migrants… Je dirais que la plupart des OP sont compétents et sont tout à fait à leur place dans cette institution, le problème vient effectivement plus de l'institution et des faibles moyens mis à leur disposition pour faire des recherches, de l'absence de soutien et de régulation psy. Moi qui viens du milieu associatif, j'ai été surprise de découvrir en arrivant à l'Ofpra que, après avoir entendu une personne nous raconter les persécutions atroces dont elle a été victime, nous n'ayons aucun lieu où en parler, où décompresser. Réduire le nombre d'accords ne fait pas partie des directives que nous recevons bien sûr. En revanche, la pression pour rendre des décisions dans des délais très courts conduit parfois à ne pas traiter avec autant d'attention qu'elles le méritent certaines demandes. Puis, il faut savoir qu'aujourd'hui de nombreux OP ne sont pas fonctionnaires, mais contractuels. Certains en sont à leur 4e ou 5e contrat précaire d'un an. Ils n'ont donc pas toute latitude à prendre leurs décisions, ils sont obligés de rendre des décisions à un rythme soutenu et ne peuvent pas prendre trop de liberté de peur d'être licenciés à la fin de l'année.
Votre titre, très ironique, Droit d'asile au Non de quoi ? est provocateur. Ce « non » donné à des milliers de noms repose sur quelles bases ?
Le « non », comme le « oui », repose sur nos frêles épaules d'OP. Nous recevons les demandeurs en entretien et sommes chargés de juger si leurs craintes sont fondées. Les OP sont isolés dans la prise de décision. Avant d'arriver à l'Ofpra, je pensais que nous serions deux par dossier et que la décision était prise à plusieurs. Mais non, nous prenons la décision seuls, au regard des impressions que nous avons eu pendant l'entretien et cette décision est validée ou non par notre chef. Il est facile de dire « non » : les déclarations de l'intéressé, vagues, peu précises et peu crédibles, ne permettent pas d'établir la réalité des faits allégués. Le « oui » doit être un peu plus argumenté. Mais, comme je l'explique dans mon livre, j'ai réussi à faire beaucoup d'accords aux demandeurs que j'ai reçus en entretien.
Ce titre est donc très provocateur, la réalité n'est pas aussi tranchée ! Comment avez-vous vécu votre expérience en tant qu'officière ?
J'ai toujours été très intéressée par la question de la migration et me suis toujours beaucoup intéressée à la situation des étrangers et des personnes d'origine étrangère vivant en France. Cette expérience à l'Ofpra a donc été passionnante, puisqu'elle m'a permis de rencontrer chaque jour pendant un an des personnes migrantes qui m'ont raconté leur parcours. Mais, comme je l'explique dans le livre, cette expérience a également été difficile : les demandeurs d'asile que nous rencontrons ont souvent des histoires très dures, nous parlent des persécutions dont ils ont été victimes, des menaces qu'ils ont subies, etc. Or nous avons très peu de formation pour recevoir et digérer toute cette douleur. De plus, nous devions rendre des décisions à une cadence soutenue. Je trouvais que nous manquions de moyens, de temps et de sources d'informations fiables pour pouvoir rendre des décisions justes. Aussi, j'ai décidé de quitter l'Ofpra.
* Droit d'asile, au Non de quoi, Clémence Armand, éditions Toute latitude, Paris


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