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Rohingyas, l'épuration ethnique d'un peuple sans défense
400 000 musulmans ont déjà fui la Birmanie en un mois
Publié dans El Watan le 19 - 09 - 2017

La crise humanitaire sur fond de «nettoyage ethnique», selon l'expression même de l'Organisation des Nations unies (ONU), ne cesse de s'aggraver au sud-ouest de la Birmanie, de son nom officiel République de l'Union du Myanmar, où l'armée semble vouloir en finir définitivement avec les Rohingyas, une minorité musulmane concentrée au nord de l'Etat régional d'Arakan (Rakhine).
Alors qu'elle dure depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la persécution de ce peuple sans défense a pris un coup d'accélérateur depuis 2012, en raison d'une «affaire de viol» d'une femme bouddhiste par un Rohingya. La violencea atteint un niveau alarmant depuis l'automne 2016, sous prétexte de lutte antiterroriste contre un mystérieux groupuscule répondant au sigle ARSA (Arakan Rohingya Salvation Army).
A chaque attaque de cette «Armée du salut des Rohingyas d'Arakan», comme celle d'octobre dernier, les forces de sécurité birmanes répondent par le massacre de dizaines de Rohingyas, identifiés comme «terroristes», et incendient des villages entiers en représailles. C'est exactement ce qui s'est reproduit depuis le 26 août 2017, avec une intensité sans précédent, au lendemain d'une offensive contre plusieurs postes de police qu'auraient commis les rebelles musulmans de l'ARSA. Ces attaques, les plus meurtrières selon les autorités locales, ont amplifié le déchaînement de haine contre des villageois civils.
Des policiers, des militaires et de simples «citoyens» appartenant à la majorité bouddhiste ont fait preuve d'une cruauté inouïe, tabassant, violant et tuant hommes, femmes et enfants, tout en mettant le feu à leurs maisons. L'armée évoque 400 morts parmi les Rohingyas, dont 350 «terroristes».
Des sources médiatiques parlent aussi d'une centaine de réfugiés morts par noyade en essayant de traverser le fleuve du Naf, séparant la Birmanie du Bangladesh. La conséquence logique de telles atrocités est «un exode de dimension presque biblique» vers le Bangladesh voisin, pour reprendre l'expression de David Camroux (voir l'entretien).
En se basant sur les chiffres de l'ONU et des ONG humanitaires (Haut-Commissariat pour les réfugiés, Amnesty International et Human Rights Watch), entre 370 000 et 400 000 musulmans auraient quitté Arakan durant ces trois dernières semaines, nombre qu'il faut additionner aux 200 000 personnes qui ont fui entre 2012 et 2016. Pour comprendre l'ampleur du nettoyage ethnique qui s'opère, précisons que la population totale des Rohingyas se situe entre 800 000 et 1,2 million d'âmes.
Le silence complice d'Aung San Suu Kyi
Au-delà de la crise humanitaire qui se profile à l'horizon, le silence d'Aung San Suu Kyi – dirigeante du gouvernement birman depuis avril 2016 et prix Nobel de la paix 1991 alors qu'elle était dissidente contre la junte militaire qui gouverna le pays d'une main de fer depuis 1962 – a permis de donner un coup de projecteur médiatique mondial sur les souffrances d'une minorité musulmane, haïe par la majorité de ses «compatriotes» bouddhistes.
Son intervention télévisuelle prévue aujourd'hui est tant attendue par la communauté internationale ; elle était jusque-là dans le déni total de la réalité de ce qui se passe à Arakan, évoquant, début septembre, un «iceberg de désinformation» autour de la campagne menée par l'armée contre des «terroristes». Cette passivité de l'ancienne mascotte des organisations humanitaires, et protégée des gouvernements occidentaux, est perçue comme une complicité par l'opinion publique internationale. «Aung San Suu Kyi : Récit de la chute d'une idole», titre, entre autres, le Courrier International.
Dans ce sillage, une pétition sur le site Change.org, signée par plus de 424 000 personnes, réclame qu'on lui retire son prix Nobel, demande refusée par le comité norvégien concerné, dont le règlement ne prévoit pas ce genre d'actions. Néanmoins, l'image de la «Lady» est sérieusement écornée, au point que même le dalaï-lama, l'une des autorités spirituelles les plus respectées chez les bouddhistes, s'est senti obligé de lui adresser une lettre, rendue publique, dans laquelle il l'exhorte à intervenir rapidement.
De même la jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix 2014, a donné une vraie leçon de morale à son aînée, via son compte Twitter, l'appelant à assumer ses responsabilités et à condamner «le traitement honteux» et la «terreur» dont les Rohingyas font l'objet depuis plusieurs années. «The world is waiting and the Rohingya Muslims are waiting» (Le monde attend et les musulmans rohingyas attendent), lui a-t-elle assigné.
Le fantôme de la junte militaire
D'autres personnalités internationales, à l'instar de Bernard Kouchner, cofondateur de Médecin Sans Frontières et ancien ministre français des Affaires étrangère, ont également appelé la «Dame de Rangoun» à respecter ses engagements en faveur de la protection des droits des Rohingyas, pris l'année dernière devant l'Assemblée générale des Nations unies, rendez-vous auquel elle a fait le choix de ne pas participer cette année.
Certainement pour éviter d'affronter les leaders du monde, abasourdis par son silence, alors qu'elle leur avait promis, l'année dernière, de protéger la «minorité musulmane» et de travailler pour son intégration dans la communauté nationale birmane. Elle avait d'ailleurs nommée une commission spéciale sur «la situation dans l'Etat d'Arakan», présidée par Kofi Annan, ancien secrétaire général des Nations unies. Celui-ci avait publié son rapport final le 24 août 2017.
Le lendemain, il y a eu l'attaque attribuée à l'ARSA. Simple coïncidence ? Difficile de le croire, surtout que les autorités birmanes relevaient dans les médias locaux le lien entre la publication du rapport et ces assauts de rebelles musulmans, laissant entendre que ces derniers ne veulent pas d'une solution pacifique.
Or, cette argumentation ne tient pas la route quand on découvre le contenu dudit document, largement favorable aux Rohingyas, quoique cette appellation ait été évitée et remplacée par «minorité musulmane», plus acceptée par l'armée et la majorité bouddhiste. Le rapport de 88 recommandations propose des solutions sur les plans politique, économique et social afin de créer les conditions de réconciliation interethnique au nord de l'Etat d'Arakan.
Par ailleurs, la Commission Annan suggère au gouvernement de donner plus de droits à la minorité musulmane afin d'«éviter sa radicalisation». Si ces propositions étaient plutôt bien accueillies par Aung San Suu Kyi, c'était loin d'être le cas de l'armée. Afin de se maintenir au pouvoir, du moins de ne pas trop s'en éloigner, les militaires ont fondé leur stratégie sur le «nettoyage ethnique» des Rohingyas.
Grâce à cette politique cynique, il semblerait qu'ils aient atteint leur objectif en affaiblissant leur rivale de toujours.
Elle est de plus en plus isolée sur la scène internationale et sous pression de son électorat qui soutient pleinement la gestion du dossier rohingya par l'armée, se trouvant piégée entre le choix de réaffirmer sa fidélité aux idéaux qu'elle a défendus toute sa vie – avec le risque de dresser contre elle l'armée, mais surtout la majorité bouddhiste qui l'a élue – et celui de sacrifier tout un peuple pour aller au bout de son projet de démocratisation du pays. C'est pourquoi le prochain discours de la dirigeante birmane sera très décisif pour l'avenir du peuple rohingya, la minorité la plus faible et la plus persécutée de ce début du XXIe siècle.


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