La salle Ibn Zeydoun, à Alger, a accueilli, les 9 et 10 février, la comédie musicale Boussadia sound, mise en scène par Tounès Aït Ali. D'une durée de 70 minutes, Boussadia sound est une comédie musicale, produite par la Coopérative Aoun Culturelle de Sétif et écrite conjointement par Leïla Benaïcha et Djamila Zekaï. Il s'agit d'une comédie à scénario fonctionnel, qui a nécessité deux années d'intenses recherches. Contrairement à l'intitulé de ce spectacle, Boussadia sound n'est pas une comédie musicale sur la région de Bou Saâda, mais un voyage initiatique où se mêlent, entre autres, tous les genres musicaux et toutes les variétés de danses. En effet, à travers la danse, le chant, la conception des costumes et la fonctionnalité de la mise en scène, le spectateur est d'emblée, dès le premier tableau, convié à faire une immersion assurée dans l'histoire de notre patrimoine, avec des ramifications de l'humanité. Boussadia sound se décline sous la forme de sept tableaux distincts, où en filigrane des ingrédients de compréhension sont servis avec parcimonie. L'incipit de ce spectacle débute par la chanson populaire Baba Merzoug, du chanteur soufi Abdellah Menaï. Un fil conducteur qui mènera un père à une certaine quête, celle de la recherche de son fils à travers les villes du Maghreb et de l'Algérie. Le point de départ se fait à partir du Soudan pour transiter par la suite par la Tunisie, la Libye, l'Egypte et le Maroc, pour arriver enfin en Algérie. Dans le deuxième tableau, on retrouve ce même fils - à la recherche de son paternel - faisant le trajet en sens contraire à celui de son père, de l'ouest vers l'est. Ce voyage contraignant de ce fils donne un large éclairage sur plusieurs thématiques, dont, entre autres, l'esclavage, puisqu'il a été réduit à l'esclavage en Egypte, avant de se retrouver à Tlemcen sous la coupe d'une bienfaitrice, Lala Aarfia. Le thème de l'amour occupe une place de choix dans ce spectacle, puisque le fils de Baba Merzoug tombe amoureux de la fille du roi Koukou. D'autres tableaux sont à l'honneur, avec des hommages et des clins d'œil à certaines personnalités marginalisées de leur vivant, telles que Cheikha Remitti. La décennie noire est au cœur même de cette histoire, avec un hommage poignant à toutes les personnes assassinées durant cette période, avec un clin d'œil au journaliste Ismail Yefsah. D'autres hommages sont rendus à certains brillants dramaturges algériens, à l'image de M'hamed Benguettaf, Ziani Cherif Ayad et Sirat Boumediene, ainsi qu'à des personnalités-clés de l'histoire de l'Algérie. Il est à noter que la plupart des protagonistes portant des masques ont évolué sur un genre de parchemin, avec des estrades mouvantes. La metteur en scène, Tounès Aït Ali, nous a indiqué en aparté qu'elle n'a pas voulu donner des identités à ces personnages, qui sont avant tout des défunts. «J'ai voulu laisser les comédiens jouer plus avec le cœur qu'avec le visage. Je voulais laisser le visage neutre et le corps bouger et parler». Elle précise également que Boussadia sound est un projet qui a nécessité deux ans de réflexion pour la recherche et le financement. «Je n'ai pas voulu me concentrer juste sur Boussadia, qui n'est qu'un moyen de pouvoir voyager et visiter toutes les stations. En même temps, on découvre notre patrimoine, d'un endroit à un autre. Je pense que cela ne sert à rien de reproduire la même chose qu'on connaît. On retrouve une histoire large. L'histoire de Boussadia, tout le monde la connaît, tout comme celle de Baba Salem et Baba Merzoug. Cela ne sert à rien de ramener ce que l'on connaît. Un peu d'imagination et de création ne fait pas de mal. Cela ne m'aurait pas intéressée de ramener le Boussadia avec le karkabou, le drapeau vert et tout cela. J'ai voulu sortir de tout cela». Si Boussadia sound est une comédie musicale bien ficelée, rassemblant des danseurs, des chanteurs et des artistes professionnels pour qui la scène n'a aucun secret, il n'en demeure pas moins que le spectacle gagnerait à être rodé davantage : façon singulière de mieux consolider le processus de création de ce tout nouveau spectacle. Après le passage de l'imposante comédie musicale Boussadia sound à la salle Ibn Zeydoun, d'autres programmations sont attendues ce mois-ci, notamment pour la clôture du Festival féminin universitaire de Béjaïa en Tunisie.