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Mallory Schneuwly Purdie (Sociologue)
« Les politiques jouent sur la peur de l'Islam »
Publié dans El Watan le 09 - 01 - 2007

La sociologue helvète Mallory Schneuwly Purdie, qui a consacré sa thèse aux musulmans de Suisse, estime qu'ils veulent être reconnus dans leur différence. Vice-présidente du groupe de recherche sur l'Islam en Suisse (Gris), cette jeune femme est, en outre, chargée de cours à la chaire de la science des religions de l'université de Fribourg.
Pouvez-vous nous brosser le portrait du musulman de Suisse ?
En fait, il n'y a pas un musulman type, mais une multitude. La communauté est diverse. Si on regarde simplement les Somaliens, ils sont carrément différents des Soudanais ou des Algériens. Il y a quasiment autant d'hommes que de femmes aujourd'hui. Ce qui n'était pas le cas dans les années 1960-70, où il y avait avant tout une population masculine, formée de travailleurs saisonniers. Environ 90% des musulmans de Suisse sont ainsi originaires des Balkans et de la Turquie. L'Islam en Suisse est essentiellement européen de tradition. En outre, le nombre de musulmans de nationalité suisse se monte à 36 481, soit 11,75% de la population musulmane du pays.
Dans votre thèse, vous expliquez aussi que c'est une communauté urbaine...
Elle est surtout jeune. La moitié des musulmans de Suisse ont moins de 25 ans. Et le nombre de naissances ici est très important. Les moins de 15 ans représentent environ 91 000 personnes.
Comment voient-ils la Suisse alors que l'Islam ne bénéficie dans aucun canton d'une reconnaissance formelle de l'Etat ?
C'est leur pays, même s'ils se sentent un peu entre deux. Ici, on leur fait comprendre que ce n'est pas tout à fait chez eux. Et chez eux, ils se sentent étrangers parce qu'on leur reproche d'être trop différents.
Ces jeunes revendiquent-ils leur identité musulmane en Suisse ?
Oui et non. Le problème, c'est que nous, les non-musulmans, on leur jette toujours à la figure cette image de musulman. Qu'ils le veuille ou non. J'ai rencontré un jeune Turc en Suisse qui me disait qu'avant le 11 septembre, il était Turc, que maintenant il est musulman.
Les attentats du 11 septembre ont donc servi de déclencheur pour sortir de l'ombre une communauté très discrète jusque-là...
— Un des bienfaits du 11 septembre, si l'on peut dire, c'est que tout le monde a commencé à s'intéresser à l'Islam. Et tout le monde alors savait tout à coup ce qu'était l'Islam. Il y a eu tellement de documentaires, d'articles sur l'Islam que tout le monde pense savoir ce que c'est sans le savoir vraiment. Finalement, on a construit une identité aux musulmans sans leur demander leur avis.
On en fait des têtes de Turcs ?
En quelque sorte, oui. Les Occidentaux les voient comme des chevaux de Troie. On croit découvrir un complot islamique contre le monde. Or les gens oublient les raisons qui ont poussé ces gens sur les chemins de l'émigration. Ils ont souvent quitté des dictatures, et ce n'est pas pour en recréer qu'ils sont ici.
Mais ce sont des musulmans pakistanais qui ont posé des bombes à Londres, en juillet 2005...
Oui, mais c'est une infime minorité. J'ai discuté avec un agent secret suisse, il me disait qu'il y avait en Suisse 10-15% de musulmans pratiquants et que dans ces 10-15%, il y aurait 0,01% d'extrémistes. Soit moins de 300 personnes qui auraient des tendances radicales sur les 310 000 musulmans de notre pays,dont 63 000 en Suisse romande. Tendances qui n'impliquent pas encore un passage à l'acte. Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier.
Comment, selon vous, interpréter qu'aujourd'hui le politique se focalise sur cette tendance minime ?
Les politiques jouent sur la peur des citoyens. Ce qui est grave aussi c'est qu'ils ne connaissent pas le monde musulman. D'autant que c'est la deuxième communauté religieuse de Suisse. Dans ce contexte, l'attitude de l'Union démocratique du centre (UDC) est très dangereuse. Elle met de l'huile sur le feu continuellement. Mais elle n'est pas la seule. Prenons l'exemple des caricatures de Mahomet. Chez nous, on n'a montré quasiment que des images de manifestations contre, mais on a oublié de montrer que des imams, y compris dans les pays musulmans, appelaient au calme. Parfois, je me demande si ce n'est pas fait exprès.
Cela s'appelle du populisme ?
C'est ça. En outre, les sociétés européennes sont en crise. Il y a une crise de l'éducation, de l'école, des parents, des familles, de notre identité aussi. Des gens qui revendiquent une religion, qui fixent un cadre à leur vie, ça fait peur. C'est aussi la question du retour du religieux sur la scène publique qui fait peur après un siècle de laïcité, notamment en France. On a eu des libertés acquises grâce à l'émancipation du religieux et on se rend compte que toutes ces libertés, ça fait perdre un peu de sens à notre société.
Vous avez un exemple ?
Une jeune femme me disait que ce n'est pas le fait de dire qu'elle est musulmane qui pose problème, c'est le fait de dire qu'elle croit en Dieu. Il y a peu de jeunes qui se revendiquent publiquement catholiques, mais les jeunes musulmans, eux, ne cachent pas leur foi.
C'est aussi parce que le cinéma ou la TV stigmatisent les musulmans. Ce sont eux les méchants...
Après le péril jaune, le péril vert effectivement. Depuis cinq ans, on pense qu'un musulman pratiquant est un terroriste potentiel.
N'empêche, voir une femme en burka à Paris, ça choque...
Oui, je comprends. Mais en France, par exemple, à l'heure où l'on n'existe socialement que si l'on parle de soi, arriver en burka à l'école est devenu une manière de faire parler de soi. Certaines filles savent qu'elles feront parler d'elles. Elles provoquent.
Votre avis sur les minarets que veut interdire l'UDC sur le territoire national...
On reproche aux musulmans de ne pas être assez présents et quand ils se montrent, on leur demande de se cacher. C'est assez paradoxal. Le musulman veut être reconnu dans sa différence. Un minaret dans une ville ne veut pas dire qu'un muezzin va appeler cinq fois par jour à la prière. Les musulmans ne le veulent pas. En outre, ils ne comprennent pas pourquoi cela fait peur, pourquoi un carré confessionnel et un enterrement selon le rite musulman posent problème. Cela ne mettra pas en cause la paix civile. On entre dans une logique d'incompréhension fondamentale. Si un musulman veut être enterré ici selon le rite musulman, c'est parce qu'il veut vivre et mourir ici. Si la femme veut porter le voile ici, c'est qu'elle veut rester musulmane tout en voulant s'intégrer. Et nous, on prend cela comme un refus d'intégration, alors que ces gens veulent vivre ici et mourir ici. Le cimetière, c'est l'exemple le plus probant. Si quelqu'un est prêt à mourir ici, c'est qu'il est prêt à y vivre.
Quelle est la solution ?
Il faut informer et arrêter de confondre Islam et musulman. Ce n'est pas la même chose. De dire qu'on sait ce qu'est l'Islam et que c'est une religion monolithique est faux. Dire qu'à cause de l'Islam on lapide, on torture, c'est dangereux. L'Islam est divers. On ne dit pas qu'un génocidaire rwandais a tué parce qu'il est catholique. Mais si un musulman faute, c'est ce qu'on lui dit. Il faut former nos politiques, de gauche comme de droite.
Pourquoi n'écoute-t-on pas les musulmans ?
C'est une communauté jeune. Il faut laisser aux musulmans le temps de s'organiser. D'autant que les communautés musulmanes sont très divisées. Elles ont du mal à s'unir et à parler d'une seule voix. Les musulmans ne se reconnaissent, en outre, pas toujours dans les représentants officiels. Un conseil du culte musulman pourrait être une solution.
Patrick Vallélian, Sid Ahmed Hammouche


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