Ahmed, Anissa et Rabah. La folie humaine les a emportés. Notre mémoire les gardera. Les souvenirs qui s'enracinent sur le terreau de la mémoire sont précieux pour garder ceux qui sont partis et ne reviendront plus. Oublier ! Vous oublier ? C'est nier la vie que vous avez vécue, l'espérance qui vous portait, la foie qui vous animait. Les événements tragiques, je ne les ai jamais filmés ou photographiés, mais ils restent incrustés dans ma mémoire. Souvent les images d'Anissa, Ahmed et Rabah m'assaillent comme des photographies que j'aurai encadrées, éliminant les superflus pour n'éclairer que leurs visages. C'est toujours au ruisseau, qui fut un réceptacle d'une convivialitè entendue comme un art de vivre, où s'affrontaient les idées d'une Algérie assoiffée de vérité et de bonheur, que je revois Anissa rayonnante et Ahmed toujours fidèle à son personnage d'homme sage, économe de ses mots mais efficace par ses flèches qui pénétraient bien au-delà des mots et Rabah généralement accoudé à la fenêtre de sa chambre ou celle de la cuisine, une cigarette à la bouche. Ces êtres, qui nous sont chers et qui ne sont plus là, avaient la passion de l'amitié et de la fidélité. La fidélité que l'on doit à ses amis était pour eux un dogme qui l'emportait sur tout autre chose. Ils suscitaient en retour des fidélités profondes, au delà des années et des épreuves. Ils laisseront à leurs amis, à tous ceux qui ont eu le privilège de les connaître, le souvenir inoubliable d'une famille aux qualités de cœur et d'esprits incomparables qui ont voué leur existence au service de la patrie avec une constance et un dévouement admirable. Vous resterez à jamais présents dans nos cœurs.
