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Guerrara sombre dans la colère
Des atavismes ethniques à la répression policière
Publié dans El Watan le 01 - 11 - 2004

Guerrara. 117 km du chef-lieu de Ghardaïa, à plus de 450 km d'Alger. Coincée au milieu du désert, cette terre clémente, paisible et calme se cherche toujours. Elle n'a pas trouvé celui qui peut lui prêter une oreille attentive. Elle s'éteint telle une bougie sous le vent. Connus pour leur sérénité et leur pacifisme, les Mozabites de la région vivent depuis des années sous le diktat des autorités locales, en silence. Pour exprimer leur colère contenue, ils empruntent, cette fois-ci, le langage le plus « expressif », celui de la violence, devenu le jargon national de toutes les strates sociales en souffrance. La passivité de la police a fait réveiller quelques atavismes des Mozabites. Ainsi, des émeutes ont éclaté il y a une semaine, samedi 23 octobre. Pourquoi ? En amont, il y a l'agression d'un groupe de vigiles mozabites par les Ouled Naïl (une population arabophone).
En aval, cela n'est qu'un motif pour déverser leur colère contre les pratiques policières qu'ils subissent quotidiennement. Voyage au cœur de cette contrée vivant sous le joug policier. Au carrefour de la sortie nord-est de la ville de Ghardaïa, une étendue de terres rocheuses se prolonge à perte de vue. Rien n'indique qu'une autre ville ou plutôt une vie peut exister ailleurs, n'était cette plaque de signalisation gigantesque qui s'impose : Guerrara 113 km, Ouargla 234 km et Laghouat 281 km. La route est longue. L'objectif est encore lointain. A peine l'horloge indique 8h qu'une chaleur torride s'abat sur nos corps, le mercure étant à 43°. La voiture roule à grande allure dévalant le chemin qui s'évanouit entre des monticules de calcaire dolomitique. Après avoir traversé Hassi Ouaraghnou et Berriane, nous rencontrons un semblant de vie pas loin d'une usine de batteries Tudor, près de 40 km de Ghardaïa. Un peu plus loin, Oued Laroui résiste humblement devant la cruauté de la nature, préservant l'âme aux quelques palmiers restant du patrimoine ancestral. Oued Laroui essaie de redonner vie à des végétations jaunâtres avec le concours du PNDA, qui se manifeste par les quelques forages réalisés. Ensuite viennent Oued Nissa, Oued Megrouna et Oued Griri, tous taris, à 13 km de la ville de Guerrara. Tout au long de la route les longeant, le « père » du PNDA a mis des signes visibles en guise de preuve que son plan est passé par ces terres jaunes dépourvues de toute végétation. A 3 km de l'entrée sud-ouest de la ville, un immense dépotoir qui n'a rien à envier à celui de Oued Smar (Alger) agresse les yeux. Le terrain est devenu « noir » de sachets noirs. C'est ici que les autorités locales déversent les ordures de plus de 100 000 habitants. Une odeur âcre commence à nous atteindre.
Révolte
A peine une pente de 90° est franchie en trombe que la ville de Guerrara lève son voile pour fasciner ses visiteurs. Engouffrée dans une cuvette oxygénée par la végétation luxuriante des oasis de Karazila, de Mangâa et de Bahdi, Guerrara se tient tant bien que mal debout, rejetant la fatalité. Il est 11h. La ville est morne, triste. Encore sous le choc. Au siège de la commune, bordant la place du 1er Novembre devenue le théâtre des échauffourées la semaine dernière, il n'y a presque personne. Sur le trottoir donnant sur le portail principal de l'administration, il ne reste que les restes de pneumatiques incendiés par les émeutiers. Au tribunal, une équipe des travaux publics s'échine à colmater les brèches et à combler les trous par une raclée de ciment blanc. Une autre équipe tente par un coup de rouleau pressé de laque de cacher les signes de la colère juvénile laissés par le feu ayant dévoré cet édifice. La succursale d'Algérie Poste a échappé de justesse à un saccage certain. Seule la plaque lumineuse est endommagée. Mais comment cela s'est-il produit ? Salah Eddine, un Mozabite, revient sur les faits. « Ici, nous montons la garde la nuit pour barrer le chemin aux voleurs. Ainsi, dans la nuit du vendredi 22 octobre, un groupe de vigiles, composé de cinq Mozabites, a fait une inspection du côté de la cité El Mouadhine, du village de Sidi Mohammed. C'était une tournée qu'on faisait régulièrement. Mais ce jour-là, je ne sais pas quelle mouche a piqué les résidents pour qu'ils agressent ce groupe de vigiles au point que l'un d'eux a été hospitalisé. Devant une telle brutalité, nous nous sommes déplacés au poste de police pour dénoncer les agresseurs qui étaient près d'une vingtaine. Mais la police n'a pas répondu à notre appel. Le lendemain, tous les Mozabites se sont rassemblés devant le commissariat pour s'insurger contre cette passivité de la police qui est censée nous protéger. Quelques jeunes n'ayant pu contenir leur colère ont jeté des pierres à l'intérieur de l'enceinte de la police. Les CNS ont répliqué illico presto par des bombes lacrymogènes. Et les émeutes ont éclaté pour ne cesser que l'après-midi, grâce à l'intervention des notables », relate-t-il. Les personnes qui ont agressé les vigiles mozabites sont originaires d'Ouled Naïl. « Ce sont des arrivistes. Ils ont leur quartier. Ils vivent à leur manière. Ils ont des traditions qui ne sont pas les nôtres. Pourquoi agressent-ils nos hommes qui, pourtant, veillent sur la sécurité de leur maison et de leurs biens ? », atteste El Hadj Ahmed, un sage de la région. « Il s'agit d'abord d'une question de dignité. Ensuite, nous déplorons le fait que la police ne fait pas son travail qui, à la tombée de la nuit, se met en hibernation, ne quittant jamais l'enceinte du commissariat », ajoute-t-il colérique, le doigt pointé vers l'édifice de la police. Du côté de la cité El Mouadhine, tout est calme. Les habitants ont une autre version des faits. Pour eux, les vigiles ont franchi la « zone rouge », celle interdite aux Mozabites. « Nous considérons cela comme une atteinte à notre dignité. Ce que nous avons fait relève de la légitime défense », nous précise Mohamed Abdelwahab, un habitant. Ainsi, la lutte interethnique a cessé durant des années dans cette contrée étouffée par le climat et par le choix de la politique locale. Aujourd'hui, le diktat policier qui s'abat sur la localité réveille les vieux démons.
Un conflit ancien
Le conflit entre les Mozabites et les arabophones n'est pas nouveau. Il remonte à des siècles en arrière, avant même la création de la ville de Guerrara. Il y a 400 ans existaient deux tribus, l'une constituée de Mozabites, l'autre de Châamba. Ils étaient en guerre permanente. La région est ainsi divisée en deux ksour : « Ksar Lahaner et Aghram Baday. Ce n'est qu'après la venue du cheikh Barladja Ahmed que la paix s'y est installée pour que la région porte ensuite l'appellation de Guerrara », dit Khaled Oudjana, président de l'association Afouadj el jabiria. Les atavismes sont restés pour toujours. Il a suffi d'un geste maladroit des autorités locales pour les réveiller. Les escarmouches se sont soldées par l'arrestation de sept émeutiers, dont deux mineurs qui ont été relâchés. Les autres seront jugés juste après le 1er novembre. Quant aux agresseurs, la police procède à l'arrestation de quatre qui écoperont plus tard, soit le 26 octobre, de 2 mois de prison ferme. Après le verdict, la ville sombre une nouvelle fois dans la colère. Les Mozabites, mécontents des peines retenues contre ces derniers et affolés par le maintien en prison de leurs « frères », sont sur le qui-vive. « Il risque d'y avoir d'autres escarmouches dans un avenir proche, car la colère monte, surtout qu'une rumeur circule que les prisonniers (agresseurs) sont concernés par la grâce présidentielle, alors que les émeutiers détenus seront jugés en novembre », nous explique Khaled O.
Délabrement
EN sus de la hogra et de la loi de la matraque, la population mozabite « patauge » dans des problèmes nés de la gestion des autorités locales. La ville est dans un état lamentable. Les routes sont déformées par les incessants travaux, les trottoirs défoncés et le bâti délabré. Face à la place du 1er Novembre, des façades crasseuses donnent sur la rue, défigurant le tissu architectural qui met en évidence le savoir-faire et le génie mozabites des siècles passés. Les venelles menant au ksar datant du XVIIe siècle sont impraticables. A l'intérieur, les murs rongés par le poids des ans peinent pour ne pas s'effondrer. « Lorsqu'ils ont fait les canalisations de gaz, ils ont laissé les trous béants », nous fait savoir Abdelkrim, un citoyen rencontré sur les lieux. Cela a suscité l'ire de la population qui a avisé à maintes reprises les autorités locales, en vain. En dehors des luttes ethniques et de la hogra policière, Guerrara est la plus importante et grande zone économique de la wilaya de Ghardaïa. Disposant d'une superficie agricole de 16 440 ha, elle est considérée comme le pôle agricole de Ghardaïa. Elle figure parmi les communes les plus pressenties pour connaître une grande expansion touristique. Mais jusque-là, c'est seulement sur papier. La palmeraie qui occupe le plus grand chapitre du secteur agricole meurt à petit feu. Les oasis Mangaâ, Bahdi et Innourar sont complètement délaissées à cause d'un conflit qui perdure depuis la fin de la révolution agraire. Exploitées par les Châambas durant cette époque-là, elles sont maintenant l'objet d'un litige entre les Mozabites et les Ouled Naïl. Les éleveurs de bovins et d'ovins travaillent contre vents et marées. Confrontés à des problèmes multiples, ils résistent. Leur premier problème est l'indisponibilité de vaccins pour prémunir leurs cheptels de certaines maladies mortelles. Slimane Boubekeur est gestionnaire d'une petite unité de production de lait. Il est également éleveur de vaches. Aujourd'hui, il a peur de voir son cheptel atteint de maladies. Il s'inquiète aussi pour les autres éleveurs, car son activité dépend d'eux. « Les éleveurs font beaucoup d'efforts pour maintenir la production. Mais je remarque que les cheptels diminuent de plus en plus. Il faut plus de moyens et beaucoup d'encouragement pour cette activité », prévient-il. Slimane Boubekeur n'est pas seul. Il y a deux autres usines de production de lait et de yaourt : Khobzi et Slimani. Devant ce magma de problèmes et de conflits, la population locale ne voit que des mirages qui prolifèrent à l'horizon.


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