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A la recherche de talents oubliés
Bouziane Errahmani-Pionnier de l'édition musicale en Algérie
Publié dans El Watan le 09 - 08 - 2007

« L'artiste doit avant tout être un créateur. Il a droit à une statue et non à un statut. L'artiste ne demande pas, il est demandé. »Medjahed Hamid -Auteur-compositeur
Un chanteur sans public est comme un amant sans amour
Notre éditeur a bataillé ferme pour arriver au résultat d'aujourd'hui. Seule la passion du métier l'a poussé à poursuivre son travail couronné de succès. Sa satisfaction ? Les dizaines de chanteurs et non des moindres qui sont passés par sa boîte
Bouziane s'interroge sur la passivité de la tutelle qui, selon lui, ne fait pas les efforts nécessaires pour préserver le patrimoine national musical
C'est un homme au gabarit imposant. Carré, on le dit impulsif mais d'une grande tolérance à qui l'on a appris à se méfier des vérités toutes faites, des idées reçues et des histoires trop cohérentes. Lorsqu'il a pris le parti de se lancer dans l'aventure de l'édition musicale, au lendemain de l'indépendance dans un voyage sur les traces de voix qui sont un peu aujourd'hui les siennes, Bouziane ne se doutait pas que près d'un demi-siècle après, il serait toujours là, et bien là étrennant le titre symbolique de pionnier des éditeurs lyriques. Un de ses amis a trouvé la formule : les voix ont tracé sa voie. Le secret de cette attirance pour la chanson, pour ses interprètes qui lui doivent un peu de leur réussite, est vite percé. Après des études inachevées à Mostaganem, il rejoint le maquis dans les monts du Zaccar, avec son oncle et son frère tombé au champ d'honneur. Blessé, il est transféré à Tunis pour soins. C'est là qu'il fit la connaissance de la troupe artistique du FLN. En réalité, il a toujours côtoyé les gens de l'art, et plus particulièrement ceux de la chanson, tels que Ahmed Wahby, Mahboub Bati, Scandrani, Khelifi Ahmed, le Tunisien Mohamed Djerrari, Benzerga « Enedromi » qui étaient pratiquement tous des amis. De cette amitié avec Ahmed Wahby est né un produit Lesnamia pour rappeler le tremblement de terre de 1954 et Wahran-Wahran en hommage à sa ville natale. Mais aussi avec Benzerga Enedromi, auteur d'un produit haouzi édité pour la première fois en Algérie. C'était Youm el khemis et Ya lyam, qui allaient être repris des années après par bon nombre de chanteurs. « Les deux chanteurs me remettaient leurs produits, à charge pour moi de les distribuer. De là, a commencé le dur labeur qui allait me permettre de créer les éditions Atlas. Pourquoi Atlas ? Cette dénomination m'est venue à l'esprit lors de la débaptisation du cinéma Majestic devenu Atlas, cérémonie à laquelle j'ai assisté. Cette salle mythique où se sont relayés les plus grands chanteurs et chanteuses de l'époque, nous a légué la marque Atlas déposée à la chambre de commerce située à la rue Ben M'hidi. » Le chemin a été long, parsemé d'embûches. On devine l'acharnement mis pour matérialiser ses idées. Ce combat, puisqu'il faut bien l'appeler ainsi, a laissé des traces. La fatigue est perceptible mais elle ne ressemble pas à du découragement. Pionnier de l'édition musicale en Algérie, il faisait des demandes au ministère de l'Information et de la Culture pour avoir l'autorisation de mettre sur le marché telle ou telle chanson. Une commission spécialisée siégeait au niveau de ce ministère pour étudier et éventuellement censurer le produit avant son impression. Une fois l'avis favorable accordé par cette commission, la matrice était transmise au fournisseur de l'autre côté de la Méditerranée. Les délais pour recevoir les disques 33 tours et 45 tours ne dépassaient pas le mois. « J'assurais personnellement le dédouanement et la réception de la marchandise au port d'Alger. Vous imaginez un peu toutes les démarches qu'il fallait faire pour mettre un 33 tours ou un 45 tours sur le marché algérien… Des tracasseries à n'en pas finir. Cinq années après, soit vers les années 1970, et grâce à un opérateur national, un laboratoire d'impression de disques 45 tours a été inauguré à Aïn Benian. Au cours de l'année 1973, ce même opérateur a importé les moules pour presser les disques 33 tours. Les autocollants (nom du chanteur et titres de chansons) qu'on apposait sur le disque étaient ramenés de Tunisie. On ne recevait aucune aide des autorités. Pis, on ne nous facilitait même pas les démarches et procédures », se souvient-il. La commission spécialisée, après étude des chansons, donnait un avis favorable en double exemplaire. L'un pour la société des droits d'auteur : l'actuel ONDA, et l'autre pour le presser, soit il censurait carrément le produit et la matrice était alors saisie. « Une fois le disque pressé, j'assurais la distribution. Il m'arrivait de prendre le train, l'autocar avec des cabas pleins de disques pour sillonner le territoire national à la recherche de détaillants. La création de la Sonacat nous a permis de lancer la K7 audio. Cette société importait les K7 vierges. J'ai acheté une petite machine manuelle d'occasion en France pour l'enregistrement de la K7. C'est ainsi qu'Atlas, avec ses moyens de bord, mettait les disques 33 t et 45 t et les K7 sur le marché national. De là, j'ai acheté aux enchères publiques une Peugeot 403 d'occasion qui m'a permis d'améliorer la distribution, surtout dans la périphérie d'Alger. » Comment l'éditeur qu'il est a-t-il pris conscience d'un patrimoine national musical à préserver, quitte à faire de l'ombre au côté purement musical ? « Après tous les déboires que j'ai surmontés pour créer cette maison d'édition, j'ai commencé à prospecter les nouveaux talents d'autant plus que la fréquentation des grands maîtres sus-cités ma amené à me pencher sur le patrimoine musical national. En avril 1976, l'ex-société des droits d'auteur est devenue l'ONDA. Certains chanteurs tels que Bouregaâ, Beggar Hadda, Guerouabi, Cherifa, Farid Oujdi, Réda Djilali, Mohamed Zebout, Boudjemaâ Lankiss, Hassen Saïd, Amar Laâchab qui enregistraient pour des maisons françaises, Pathé Marcoui et Philips, se sont rappelés de moi et j'allais leur permettre de travailler avec un éditeur algérien qui venait de remettre en cause la mainmise des éditeurs étrangers sur le marché algérien. » Puis, pratiquement tous les autres chanteurs (Amar Ezzahi, Anissa, Chaou, Mazouni, Noura, Nadia Benyoucef et la liste est longue) ont formé la deuxième vague qui a opté pour Atlas. « Après le démarrage avec ces grands noms, beaucoup de jeunes se présentaient aux éditions Atlas. La seule condition que je leur posais était de chanter le patrimoine national, chaâbi, haouzi et bedoui entre autres. » C'est ainsi que de très nombreux jeunes ont été lancés par les éditions Atlas à l'instar de Didine Kharoum, Mokdad Nacer, Abderrezak Guenif, Noureddine Allani, Sid Ali Lekkam et la liste est longue en dehors de ceux qui sont actuellement en plein enregistrement. Cela pour parler du genre chaâbi, si on s'amuse à citer des chanteurs ou les titres de tous les genres (andalou, haouzi, bedoui, kabyle) la liste serait exhaustive… L'éditeur titre une certaine gloire de son parcours. « Oui, c'est un grand motif de fierté. Quel est l'éditeur qui ne désirerait pas avoir dans son catalogue ces géants du patrimoine national tels qu'El Anka, Guerouabi, Remiti, Tetma et je tire un certain orgueil pour les avoir édités et essayé de sauvegarder leur héritage, d'autant plus que les relations personnelles que j'avais avec la majorité d'entre eux dépassaient le cadre du rapport (éditeur/chanteur). J'espère que parmi les jeunes que j'encourage et que j'édite actuellement, certains feront la même carrière et marqueront par leur travail l'histoire de la musique algérienne. » M. Bouziane regrette le silence radio de la tutelle qui, selon lui, fait la sourde oreille lorsqu'il s'agit des doléances des éditeurs. « Le ministère ne s'est jamais penché sur mes problèmes et ne s'est même pas inquiété des difficultés que je rencontre pour préserver ce patrimoine. Le ministère ne pense à moi que lorsqu'il a besoin des éditions Atlas. A chaque salon ou exposition organisés par les services de ce ministère, on me sollicite pour leur prêter soit les tableaux représentant les chanteurs, soit des CD des chanteurs locaux qui ne sont disponibles qu'au niveau de nos éditions. » « Une lettre demandant audience au ministre n'a jamais reçu de réponse », regrette-il amer. Une consolation cependant : l'attention accordée par le premier magistrat du pays au patrimoine. « Effectivement, Monsieur le président de la République m'a félicité et encouragé pour continuer à préserver notre patrimoine culturel. C'est ce qui me permet de continuer cette mission malgré mon âge et les difficultés rencontrées. » Les idées ne manquent pas. La preuve peut être donnée par le catalogue Les Editions Atlas. A titre d'exemple, beaucoup de chansons chaâbi ont été reprises en instrumental. Des chansons hawzi-andalou ont été reprises par des jeunes et enregistrées par Atlas. « Seules nos éditions ont investi de l'argent pour enregistrer les chants patriotiques, Qassaman et Men Djiballina entre autres. Six volumes sont là en CD et K7 pour permettre à nos jeunes de ne jamais oublier ces anachide wataniya ». Quant aux droits d'auteur, notre interlocuteur préfère nous renvoyer aux responsables de l'ONDA. « Je vous rappelle simplement que le marché informel (piratage des œuvres, reprise de chansons sans autorisation préalable du chanteur ou de l'éditeur) fait fureur. Une virée au niveau de certaines places publiques ou aux alentours de certains marchés vous renseignera sur les droits d'auteur. Malgré la déclaration des œuvres auprès de l'ONDA, certaines sont reprises par des chanteurs sans aucune pudeur et avec autorisation de l'ONDA. Beaucoup de chansons du répertoire catalogue d'Atlas sont rééditées sans qu'on me prévienne ou sollicite mon autorisation. Et surtout il faut voir de quelle manière elles sont reprises. » Loin de se décourager, il a sollicité le ministre pour une édition d'anthologie afin de faire un véritable travail d'art et d'édition ; d'autant plus que les derniers coffrets comportant des chansons font partie du répertoire détenu par Atlas. « J'ai même demandé à l'imprimeur pour faire une commande de l'emballage. A ce jour, je n'ai vu ni l'imprimeur ni les coffrets. Les gens, sachant pertinemment qu'Atlas est spécialiste dans le patrimoine musical, ne cessent de me harceler pour d'éventuels achats. Je ne peux même pas les orienter et leur donner une réponse satisfaisante. » Usant de paraboles, M. Bouziane dira : « La culture est comme une vieille bâtisse qui perd ses pierres une à une si l'on ne prend pas garde. Quand ils étaient sous le joug colonial, les Algériens étaient brimés, ils n'avaient pas le droit à
l'expression culturelle qui est l'amie même de leur personnalité. La génération actuelle semble suivre le même chemin. Les chanteurs nationaux sont mis à l'écart. Les médias audiovisuels semblent plutôt pencher vers d'autres cultures que la nôtre. » Cette vérité assenée, notre interlocuteur revient à dire qu'« effectivement l'édition peut prospérer chez nous à condition que ceux qui détiennent les décisions apportent leur contribution à ceux qui travaillent dans la légalité ». « Nous avons porté le flambeau et bataillé ferme pendant quatre décennies, la fatigue et l'âge commencent à se faire sentir. J'ai peur que tous les efforts déployés n'aient servi à rien d'après ce que je constate. » Et pour étayer ses dires, ils nous cite un exemple édifiant dont il est l'acteur impuissant et résigné. « J'ai demandé à louer un studio d'enregistrement, contre paiement cash, pour permettre au groupe Mezghenna d'enregistrer. Ce groupe est composé d'une vingtaine de musiciens. La demande a été remise en mains propres à un directeur d'une radio, au mois de décembre dernier. A ce jour, aucune réponse ne m'est parvenue et pourtant, c'est une demande de location. Allez savoir pourquoi ? » s'interroge-t-il avec une pointe de frustration et d'amertume.
Parcours
Bouziane Errahmani est né en 1936 à El Attef (wilaya de Aïn Defla) dans une famille modeste. Il effectuera ses études à Mostaganem qu'il n'achèvera pas s'occupant de sa famille. Il rejoint le maquis dans les monts du Zaccar, région qu'il connaît bien, avec son oncle et son frère qui tombera au champ d'honneur. Blessé, Errahmani sera transféré à Tunis pour soins. Il y restera quelque temps et fera connaissance avec la troupe artistique du FLN. Ami des grands chanteurs comme Ahmed Wahby, Benzerga et d'autres qu'il éditera, Bouziane se fera un point d'honneur par la suite d'encourager les jeunes talents à condition qu'ils répondent à certains critères comme la propreté du texte et bien évidemment des cordes vocales irréprochables. Sur un autre plan, notre éditeur s'est évertué à pérenniser le patrimoine musical national, en éditant par ailleurs les chants patriotiques. Ayant fait connaître les plus « grands » de la scène artistique, Bouziane en tire une certaine fierté même s'il regrette le manque d'ardeur et d'encouragement du ministère de la Culture dont c'est pourtant la création. Bouziane est directeur des éditions Altas depuis plus de quatre décades.


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