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T'kout, la campagne au parfum de la… silicose
La chronique quotidienne y est rythmée par ses ravages parmi les jeunes
Publié dans El Watan le 21 - 11 - 2007

T'kout. Voilà trois petites syllabes qui ont fait trembler le « pouvoir » un certain 13 mai 2004.
T'kout. De notre envoyé spécial
Ce jour-là, un membre du groupe de légitime défense (GLD), un corps de supplétif créé par le gouvernement durant les années de braise, tira froidement sur deux jeunes dans la localité de Taghit, tuant sur le coup Chouaib Argabi, âgé de 19 ans. Son ami d'infortune, blessé, sera lui enlevé. Cet incident a malheureusement servi d'étincelle qui allait « allumer » toute la daïra de T'kout, lovée dans le dénuement de l'arrière-pays chaoui. De ce meurtre qui avait fait soulever toute une population oubliée des hommes ne subsistent aujourd'hui que de vagues réminiscences – quelques graffitis – des fameux corps à corps entre les forces de sécurité et les groupes de manifestants encadrés alors par les arouch (tribus) des Aurès. Tirée brutalement de l'anonymat en 2004, T'kout y est replongée depuis dans une espèce de fatalité géographico-politique… « Ici, il n'y a rien ! » Cette petite phrase gorgée de résignation lancée par Nassim, un jeune de 17 ans, pris en autostop sur notre chemin, prend tout son sens dès que vous mettez les pieds à T'kout. Cette petite localité de 12 000 âmes, enserrée entre les monts majestueux des Aurès qui s'offrent généreusement comme un tableau naturel qui n'a rien à envier à celui de l'Arizona, est un exemple type du dénuement et de la déshérence. Ici, la campagne pour les élections municipales a épousé le décor ambiant teinté d'indifférence dans une atmosphère tout aussi lourde. Interroger les gens sur les partis et les joutes en préparation relève presque de l'indécence. Pour cause, ici à T'kout, la population pleure ces enfants morts à la fleur de l'âge pour avoir inhalé à plein poumon la terrible silicose, cette substance très toxique dégagée par la pierre taillée. L'affection est due à l'action des poussières de silice sur les poumons causant des maladies mortelles comme la pneumoconiose et la silico-tuberculose. Dans une commune où le taux de chômage parmi les jeunes flirte avec les 100%, comme l'attestent les gestionnaires de la municipalité, la taille de la pierre reste le métier de survie… le temps de mourir…Entre 800 et 1000 jeunes de T'kout exercent ce dangereux métier sans aucune protection. Une mission médicale de sensibilisation y avait été dépêchée depuis Batna l'année dernière, en vain. La taille de la pierre demeure l'unique boulot à portée de mains, faute d'entreprises ou autres projets qui auraient pu absorber ces bataillons de chômeurs. En ce lundi de novembre, les T'koutis pleurent d'ailleurs un des leurs, un jeune aux 31 printemps, décédé le jour même dans le village de Inghoussène sous l'effet de la silicose. Ici, tout le monde parle de cet homme qui, en voulant nourrir ses deux enfants, a offert ses poumons à la silicose et l'amiante sans protection. Avait-il le choix ? « Que voulez-vous qu'on fasse ? Il n'y a ni usine ni aucun autre boulot pour gagner de l'argent. » Résignés, les jeunes de T'kout reprennent presque machinalement ce refrain fatal pour expliquer leur jeu de la mort avec la silicose. Les autorités locales, elles, n'ont strictement rien à offrir tant cette municipalité est l'exemple même de l'Algérie ‘‘inutile'' aux yeux des responsables, que la nature n'a pas gâté (située au fin fond des Aurès) et que la bêtise des hommes a rendu invivable. C'est pourquoi, T'kout ne ressemble guère aux autres régions du pays en cette période de campagne électorale. Elle s'est détachée socialement et politiquement du reste du pays alors qu'elle est censée abriter des joutes oratoires entre partis politiques pour qui gagnerait sa confiance. T'kout a manifestement tourné le dos à la politique. Et les cinq partis en lice dans cette commune (FLN, RND, FNA, MSP et PT) semblent avoir compris le message. Une semaine après le coup d'envoi de la campagne, point d'affiches sur les murs ni même sur les tableaux d'affichage. Il est difficile pour un visiteur de savoir que la localité se prépare pour un rendez- vous électoral. Seuls quelques fanions ornant la façade du siège de la mairie, résidus sans doute de la célébration du 1er novembre, donnent un semblant de couleurs à un événement sans relief. Ici, la chronique macabre des victimes de la silicose a pris largement le dessus sur l'échéance politique. Ils sont 20, 25, voire 30 jeunes à périr de la poudre mortelle.
Le FLN ou le RND en ordre ou en désordre…
Les autorités locales s'avouent incapables de stopper l'hécatombe. Seule « mesure » prise par l'APC pour endiguer le phénomène, la confection d'une… modeste affiche par ordinateur à travers laquelle elle espère attirer l'attention des professionnels de la pierre taillée quant aux dangers qu'ils encourent à la travailler sans masque de protection. « De grâce, rendez-nous ce service en alertant les responsables à Alger sur le danger que fait courir le travail de la pierre taillée à nos enfants. Dites aux riches hommes d'affaires, aux hommes politiques et aux généraux d'Alger que les jeunes de T'kout que vous faites travailler dans vos luxueuses villas meurent à leur retour ici… » « Ecrivez-le, que Dieu vous bénisse… » Voilà le message de « campagne » d'un cadre local du FLN rencontré dans la permanence de son parti en pleine réunion. Ici, tout le monde s'en lave les mains et attend des autorités nationales qu'elles veuillent bien nettoyer cette vallée de la silicose. En attendant, les candidats des partis se font très discrets, histoire de ne pas incommoder les citoyens dont les cœurs et les esprits ne sont plus branchés « boulitik ». « Ce sont tous des hypocrites ! », peste Nassim qui ne croit plus aux promesses sans lendemains des candidats, toutes tendances confondues. « Echâab hakem sabâou ! » Cette formule quasiment intraduisible qui veut dire à peu près : « Le peuple suit de loin la situation sans broncher », lancée par un fonctionnaire de l'APC, traduit fidèlement le sentiment des habitants de T'kout pour qui, les élections représentent au mieux un non-événement. « La commune vit des deux milliards de centimes de budget que lui allouent les autorités, et les partis n'ont strictement rien à offrir de plus sinon de gérer cette maigre enveloppe », précise notre cadre. C'est pourquoi d'après lui, les candidats hésitent à pointer le nez dehors et aller à la rencontre des électeurs définitivement convaincus que ces élus sont presque « inutiles ». Les jeunes qui ont compris leur douleur sont soit tombés dans les rets de ces substances toxiques de la pierre taillée au péril de leur vie, ou alors ont quitté le douar pour aller dans un ailleurs forcément meilleur. Les autres « tuent » le temps à longueur de journée en attendant que leur cri de cœur depuis la lointaine T'kout (elle est situé à 96 km de Batna) soit, un jour peut-être, entendu de l'autre côté des Aurès. FLN, RND en ordre ou dans le désordre, cela importe peu pour les T'koutis. Au soir de ce 29 novembre, ce sera juste un passage de témoin entre deux partis qui se relayent depuis 1997 à la tête d'une APC qui n'attire pas grand monde. Le maire du parti de Ahmed Ouyahia, qui s'apprête à remettre son mandat en jeu, a quitté son siège avec un bilan horriblement vide tout comme son prédécesseur du FLN. A quoi servirait donc de placarder les portraits de candidats tout juste bons à meubler un vide sidéral de vie à T'kout et à tout point de vue ! Il est d'ailleurs significatif de relever que les cinq partis en lice ne sont pas forcément catastrophés par le fait que les affiches ne soient pas encore prêtes, alors que la campagne tire à sa fin…La victoire électorale à T'kout vaut surtout pour les directions des partis qui vont accrocher abusivement cette APC dans leur tableau de chasse, eux pour qui, l'arithmétique tient lieu de programme politique. Et au matin du 30 novembre, T'kout sera abandonnée à sa pauvreté et sa désolation. Ses habitants en sont convaincus. Jusqu'à 2012…


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