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« La violence, une vengeance sociale »
Saïd Benmerad. Expert consultant pour le CENEAP
Publié dans El Watan le 22 - 07 - 2008


A quoi rêvent les jeunes d'aujourd'hui ?
Les jeunes algériens rêvent de réussite. Les statistiques montrent qu'ils veulent simplement faire de bonnes études et trouver un emploi. Il y a également ceux qui rêvent de réussite « spirituelle » à travers la mosquée et là, ce sont de nombreux modèles : le jeune cadre dynamique, celui qui veut réussir dans le commerce jusqu'au jeune apôtre « plein » de Dieu. Il est nécessaire d'admettre l'existence de plusieurs modèles. Les voies classiques de réussite restent les plus dominantes.
Autrefois des « hittistes », ils sont aujourd'hui des « trabendistes » (puis terroristes, islamistes, kamikazes et harraga). Y a-t-il un « péril jeune » ?
Combien y a-t-il eu de kamikazes ? Très peu. Ce phénomène n'est pas propre aux jeunes. Nous avons eu le plus vieux kamikaze. Des millions de jeunes se lèvent tôt pour se rendre au lycée ou à l'université. Ils ont leurs inquiétudes de jeunes et rejettent toute forme de violence. Aujourd'hui, il faut leur donner ce qu'ils attendent : loisirs, études sérieuses et un avenir. Selon notre sondage, 50% des jeunes espèrent travailler dans leur pays. Il ne faut pas que les harraga et les kamikazes soient le phénomène qui occulte tout le reste. Ce sont des phénomènes marginaux. Il y a des cas désespérés, mais la majorité des jeunes aspire à travailler. Il ne faut pas s'inquiéter outre mesure des prétendants au départ. La migration est un phénomène qui a toujours existé. C'est dans l'ordre naturel des choses. Ce n'est certes pas en leur faisant peur avec ces phénomènes qu'on va les gagner. Il est nécessaire de les faire participer à la vie politique et économique du pays.
On a l'impression qu'il y a une politique « anti-jeune » notamment dans les entreprises publiques, qu'en est-il réellement selon vous ?
Il y a un décalage flagrant entre l'âge de nos politiques et la réalité de la pyramide des âges. Il y a une différence entre le discours et la réalité. Dans notre mentalité, l'adulte a toujours raison. Les jeunes ne sont pas traités comme des personnes entièrement responsables avec lesquelles on peut discuter. On devrait faire du marketing politique et social auprès de cette frange de la société. Il faut plus de consultation, plus de démocratie, plus de participation. Les jeunes sont impatients et nerveux par nature. Il ne faut pas prendre cela pour de la violence. Il est urgent de leur tendre l'oreille. L'absence de communication aggrave le manque de reconnaissance. C'est ainsi que les émeutes se déclenchent. La jeunesse est désenchantée, il faut la gagner autour de la construction d'un projet de société.
Il y a aujourd'hui deux jeunesses et le fossé se creuse davantage, comment expliquez-vous cette situation ?
Il y a plusieurs Algérie. Il existe des distinctions entre les couches sociales, entre le Nord et le Sud, entre les quartiers populaires et ceux résidentiels. Le fossé se creuse car il y a des inégalités. Cela s'explique par la conjoncture et les choix socioéconomiques du pays. L'Algérie tend à libéraliser son marché, et nous allons vivre les travers des économies libérales. Moins d'Etat, cela équivaut à moins de politiques sociales.
Les grandes villes algériennes souffrent d'insécurité. Est-ce que la violence juvénile émane de frustrations ou d'une perte des repères ?
L'agressivité est générale. La société est plus violente qu'il y a quelques années. Le vol d'un portable paraît anodin quand on sait que des êtres humains en ont égorgé d'autres. Le pouvoir des structures qui régulaient la société s'est effondré. La jeunesse est désemparée. Arracher une chaîne à une jeune fille est l'expression d'une forme de vengeance sociale. Et se justifie aujourd'hui plus facilement. Si vous vous plaignez du vol de votre portable, on vous demandera la raison pour laquelle vous l'avez exhibé. Il y a là un atavisme millénaire. Une société pauvre égalitaire a du mal à absorber le choc de la modernité. Les valeurs vacillent. Il est important de reconstruire des crédibilités sociales politiques et économiques.
L'émergence de « nouvelles fortunes » a-t-elle participé à la « désorientation » des jeunes ?
Dans la mesure où la société est issue d'un système socialiste dans lequel tout le monde portait la même chemise, le passage à une économie de marché a été une opération délicate. Le retour d'une idéologie islamiste qui prône l'égalité est également un facteur qui doit être pris en considération. Nous avons vécu suivant des modèles qui n'intègrent pas de manière rationnelle l'inégalité. Les jeunes veulent tout et tout de suite. Même si dans l'absolu tout le monde a sa chance, dans la réalité c'est plus dur pour ceux qui sont en bas de l'échelle. On a tendance à reproduire la situation familiale. L'ascenseur social est en panne. La famille doit reprendre en main l'organisation de la vie sociale. Un père de famille doit être crédible moralement et matériellement. Il est urgent d'améliorer la situation financière des familles et réhabiliter les villes avec des centres de loisirs. Les jeunes sont de grands consommateurs de bien-être. Cela est difficile lorsqu'ils voient leur père triste, car il vient de recevoir sa retraite minable et des tas de factures.
Quelle est la part de la déperdition scolaire dans tout cela ?
La déperdition scolaire concerne davantage les jeunes issus des milieux défavorisés ayant un seul parent (la mère dans la plupart des cas). Très peu de jeunes disent qu'ils veulent arrêter leurs études pour travailler (à peine 4%). Les garçons sont tentés par l'informel. Les filles vont plus loin dans leur scolarité, elles continuent à réussir par la voie classique par défaut. Elles ont une certaine maturité face au désenchantement. Elles font avec.
La langue évolue au gré de ces bouleversements, le langage change d'un quartier à un autre, peut-on parler d'une « fracture linguistique » ?
La réalité est dite par des langues différentes. La réalité étant différente d'abord géographiquement puis socialement. Chacun tente ainsi d'asseoir son identité. La langue est un signe extérieur d'appartenance à une communauté. Les jeunes d'aujourd'hui s'expriment avec une certaine lenteur, ce qui donne l'impression qu'ils sont drogués (ce qui n'est pas forcément le cas). La ville est en train de se reconfigurer. L'écart entre les quartiers populaires et résidentiels s'accentue. Chacun des idiolectes porte des valeurs et des modes de penser différents. Ce n'est jamais une fracture, on reste dans les limites. Il y a des identités linguistiques. Ce sont des sociolectes pour affirmer leur différence. Il y a de nombreuses catégories. Les jeunes qui fréquentent assidûment la mosquée ont leur propre langage, c'est dans l'ordre des choses.


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