La librairie Cheikh, inaugurée dans les années 30, est l'une des plus anciennes de Tizi-Ouzou. Son gérant ne se contente pas de proposer les dernières parutions aux clients. Les étals n'ont rien à envier à ceux des librairies de la capitale quand ils ne sont pas mieux achalandés. Son local, situé au centre-ville et spacieux, est également le lieu de passage de tous les écrivains ou poètes qui vivent ou transitent par la ville des Genêts. Un grand tableau à l'entrée immortalise les portraits de tous ceux qui y marquèrent une halte ces dernières années. Rachid Mokhtari voisine avec Ali Dilem et Malika Arabi côtoie Malika Hachid. C'est un enfant de Tizi-Ouzou donc qui, dans l'après-midi de samedi dernier, a donné rendez-vous aux amoureux de la lecture. Youssef Merahi a dédicacé quelques-unes de ses œuvres dont son dernier recueil de poésie « Moi, Oran et quatre parenthèses ». Sa passion pour la capitale de l'Ouest algérien ne semble pas se tarir puisque ce dernier opus forme avec deux autres précédemment édités une trilogie. « Je reste fasciné par cette ville, sa fringale de vie ». Il confirme ainsi qu'il reste fidèle au genre qui l'avait révélé et fait connaître. C'est en 1985 justement que le Cridish, centre de documentation et de recherche oranais dirigé alors par le regretté Abdelkader Djeghloul, avait édité son premier recueil. Durant plus de deux heures, il s'est montré disponible envers ceux qui sont venus discuter ou tout simplement déguster un thé. Journalistes, enseignants, poètes amoureux du verbe échangeaient avec l'invité qui, pour chacun, avait un mot gentil. Certains figuraient dans son almanach, sorte de guide dans l'histoire et la géographie de la ville. Par des photos, des portraits, il a immortalisé des figures qui font revivre l'ancien Tizi-Ouzou ou révèlent ses potentialités en matière d'art, de sport, etc. « C'est toujours un plaisir renouvelé de rencontrer des lecteurs, des amis et de gagner d'autres. » « Il ne faut plus croire que les poètes ont disparu. Des éditeurs éditent quelques-uns ces dernières années », nous avoue Merahi entre deux dédicaces. Il reconnaît toutefois que « le lectorat s'est rétréci et que les lecteurs de la poésie sont devenus une sorte de club d'initiés ». Il n'hésite pas à parler à propos de ce public de « militants de la poésie ». Ceux qui ont raté ce rendez-vous pourront bientôt retrouver le poète dans un centre commercial à Fréha. Il faut souligner et saluer au passage cette nouvelle tradition qui permet aux clients dans certaines surfaces commerciales de la région, à l'instar de Priba d'Azazga, de joindre l'utile à l'agréable. Il se dit aussi content de la dynamique culturelle qui émerge dans les localités de la Kabylie profonde citant notamment l'accueil magnifique que lui et cinq autres auteurs ont reçu à Boudjima puis à Tigzirt où les APC ont fait, reconnaît-il, « un travail remarquable ». N'étant jamais à court de projets, il nous annonce la prochaine, sortie chez l'éditeur Dalimen, d'un beau livre qui renferme des photos de paysages de la Kabylie et des citations d'auteurs et d'artistes de la région.