Dans la pièce « Leilet chek », (La nuit du doute), du metteur en scène Ahmed Khoudi, sur un texte d'Arezki Metref, les quiproquos s'enchaînent. Six personnages se démènent sur scène comme des zombies. Dans le hall d'un hôtel, Sana, le réceptionniste, Atafma, la femme de ménage et quatre locataires. On trouve Moutry, l'acteur, Tir Ellil, le marchand de sardines, Qabr, le fossoyeur et El Oustad, le professeur d'histoire. Ensemble, ils vivent leur dernière nuit puisque l'hôtel sera démoli au petit matin suite à une décision mystérieuse. Malgré cette perspective qui menace d'anéantir leur vie dés le lendemain, les six personnages continuent, pour les heures qui les séparent du lever du jour, à mener normalement leur vie faite de petits problèmes et de petites querelles comme s'ils voulaient conjurer le sort qui les attend. Arrive ensuite le personnage du contrôleur ou du policier qui vient, comme chaque nuit, contrôler l'identité des locataires. Ce policier use d'un zèle et d'une intransigeance démesurés qui poussent les locataires dans leurs derniers retranchements. Un meurtre sera commis, celui du policier. Nul ne sait comment, ni pourquoi...Tant d'interrogations et point de réponses. Le scénario est original et réussi. L'épilogue surprend par son côté « fin ouverte ». Des situations loufoques générées par des quiproquos, servis par des comédiens qui ne ménagent pas leur peine. Il faut accepter de rentrer dans cette histoire improbable dont on n'aura les clés qu'à la fin. C'est sinistre à souhait, angoissant, extrêmement rythmé, et, ce qu'on retient surtout, c'est la performance des six comédiens. Un très bon moment ou le public est conquis. « C'est une véritable performance. Les comédiens se sont donnés à fond, ils explosent véritablement sur scène. De grands comédiens. Avec une performance réussie et presque parfaite, Nabila Brahim, Hamid Bouhayek, Nacer Mouhaoueche, Meftah Mensouri, Abdenour Yassaâd, Mohamed Hilali et Alaoua Zegrar ont su créer l'illusion du réel et raconter avec talent en usant diverses techniques de théâtre. La scénographie a été confiée à Mourad Bouchehir. Il a savamment réussi à épater les praticiens du théâtre et les amateurs.La pièce suscite une émotion car elle pose avant tout la question bien plus large du comportement humain. Les médiocrités et les petites lâchetés et, surtout, le rapport à l'autre et l'étrange dépendance qui en découle. Ahmed Khoudi propose au public un cadre général à la compréhension de la politique globale de notre monde. Pendant une heure et cinq minutes, le spectacle a tenu en haleine le public qui a exprimé son admiration. Ahmed Khoudi, une personnalité active dans le théâtre, a, à son actif, plusieurs œuvres. Dans cette nouvelle production, il a montré sa préoccupation pour des détails précis de mise en scène et, surtout, sa quête permanente d'un théâtre de qualité.
