Aïd ou pas Aïd ? Le doute sera-t-il enfin levé ou juste décalé ? Ce sont les questions du long week-end qui s'annonce. Tout le monde sera suspendu aux lèvres des vénérables cheikhs, qui à leur tour, se mettront à l'écoute de ceux qui vont sonder les profondeurs du cosmos. Qu'importent les télescopes géants ou les calculs précis des astronautes. Il faut se fier à l'œil nu et à rien d'autre. D'autres s'abîment dans d'autres calculs. Auront-ils droit à une seule journée de repos ou vont-ils se libérer des tracas du travail deux jours, voire plus pour les malins. Après l'ultime f'tour, on peut rire, déguster les gâteaux mais l'œil reste tourné vers l'écran de télévision et le cercle des religieux. « Attendu comme un croissant de l'Aïd », peu d'expressions n'ont su décrire mieux l'attente aussi fébrile d'une personne ou d'un événement. Nul ne cherche l'esquiver, ni en être indifférent. Le jour d'après sera différent. L'annonce de l'Aïd sera d'abord un soulagement. Elle ne ravit pas seulement les enfants qui attendent depuis lurette de nouvelles tenues. Ni les croyants qui auront accompli leur devoir. Il y a d'abord ceux qui, un mois durant, ont dû se priver. Ceux-là vont désormais pouvoir prendre tranquillement leur petit-déjeuner. Le supplice va s'achever pour d'autres qui vont griller, avant de sortir ou sur le chemin du travail, une cigarette. A midi, ils s'en iront tranquillement siroter un café. La fin du Ramadhan annonce aussi un moins mauvais accueil aux bureaux de poste. Quelle raison avancera l'employé grincheux pour se débiner et se renfrogner ? Si la violence ne va pas disparaître, l'adrénaline va se refroidir et les marchés, les bus ou les rues ne seront plus des rings improvisés. Le bonheur des uns ne doit pas faire oublier la déception des autres. ll y a d'abord tous ces marchands occasionnels qui s'enrichissent. La fin du mois des gâteries est à coup sûr une mauvaise nouvelle. En dehors de ce mois, qui songerait à se reconvertir en vendeur de zlabia ou de kalbellouz ? Mais la roue de la fortune tourne. D'autres vont prendre aussitôt le relais. Les « casse-croutiers » vont se déployer le long et aux abords des plages et rien ne garantit que celui qui touillait l'huile chaude ne va pas se retrouver vendeur de serviettes ou de savates d'été. Il y a aussi d'autres qui vont regretter la fin du Ramadhan. Pas seulement les dévots qui auront testé le degré de leur piété et répandu la bonne parole. Tous ceux qui savent qu'en ce mois c'est « doucement le matin, pas trop vite le soir » auraient aimé que cette longue parenthèse s'étire davantage. Pour une autre raison, les artistes qui seront privés de soirées. Ils auraient aimé, comme le chacal de la légende que tel mois béni soit deux années de suite, une succession de spectacles dans les localités les plus reculées. Heureusement que pour les plus sollicités, l'après-Aïd ouvre la saison des fêtes. Samedi, chacun aura fait ses comptes mais nul ne se privera malgré tout de la joie que procure ce jour.