Défi Elle a osé. Elle a franchi le pas, mais jusqu?où ira-t-elle ? Quand on lui ôte les qualificatifs de «trotskiste», de «communiste», de «turbulente», il ne lui reste alors qu?un seul atout pour tenir tête à un monde politiquement misogyne : femme ! Louisa Hanoune ne s?en plaint pas. Son parcours plein d?embûches, des tabous transcendés jusqu?aux geôles d?un système hermétique, lui a valu maturité, sobriété et surtout robustesse. Le minimum requis pour une femme qui sait faire quelque chose de beaucoup plus passionnante que cuisiner, changer les couches du bébé ou exorciser les démons de la belle-mère. Et il n?y a pas plus osé pour une femme que le fait de rivaliser, avec sa frêle musculature et sa générosité de femme, pour le poste trop exigent de président de la République ? une première dans les annales ? et montrer, par un coup «diaboliquement féminin», la voie à ses millions de cons?urs. Pour le cas qui nous concerne, à savoir Louisa hanoune, sa tâche n?a rien d?une sinécure. Son parti lui doit une fière chandelle. En effet, le PT ne vit que par la dose d?émulation insufflée par la «dame de fer». Aujourd?hui, Louisa Hanoune veut rivaliser sur un terrain où beaucoup d?hommes avaient dû laisser des plumes, par la faute d?un applaudimètre qui ne rime pas forcément avec urne, multipliant, une fois intronisés, bourdes et déconvenues. Et quand une femme ose, peut importe le résultat. Elle aura le mérite d?avoir tenté l?insensé et c?est cela la grande victoire. Avec 92 706 signatures acquises en un temps record sur les 48 wilayas, la chef du Parti des travailleurs (PT) peut se targuer aujourd?hui d?avoir les coudées franches pour déranger, une fois la course à la présidentielle lancée, la quiétude des favoris. Louisa Hanoune le crie haut et fort : elle est venue injecter du sang neuf, un parfum féminin avec la même rage, les mêmes crises de nerfs quand elle était invitée par le passé pour disséquer, en chef de parti, la situation politique, économique et sociale d?un pays en éternelle descente aux enfers. Son charisme de «m?ra» la fait propulser jusqu?à devenir une pièce maîtresse sur l?échiquier politique, comme le furent naguère, toutes proportions gardés, Catherine la Grande, Cléôpatre où Indira Ghandi. N?a-t-elle pas osé défier, sans jamais être démentie, gouvernants et décideurs quand l?économie nationale marchait à reculons avec son lot de licenciements et de nouvelles misères noires ? N?a-elle pas remis des hommes à leur place en énumérant tares et défauts ? N?a t-elle pas enfin osé mettre dans la même assiette prolétariat révolu et Islam ancestral, modernité et conservatisme ? Mais si Louisa a osé tout cela, elle devra aussi oser défier cet hermétique mur d?incompréhension dressé depuis des décennies dans cette Algérie où la femme est présentée comme «mineure éternelle». Par quelle magie s?attirera-t-elle donc les gracieuses faveurs d?un peuple qui n?a pas l?habitude d?être commandé par une femme ? Cela est le grand défi, l?ultime peut-être d?une femme qui a tout de même osé. Oser surtout être différente. Rien que pour cela, elle a d?ores et déjà gagné.