Résumé de la 3e partie - La maman qui a fait deux robes ,a bien précisé qu'elles étaient identiques puisque ses deux filles avaient la même taille... Manon pourrait refuser, mais elle se laisse faire et la voilà habillée comme sa sœur. Elle souhaite de toutes ses forces que Charlotte tombe malade qu'elle s'arrête de grandir, qu'elle garde cette robe grise toute sa vie. Elle lui dit qu'elle a inventé un nouveau jeu : il faut qu'elles se mesurent toutes les deux devant la marque de sa chambre. Charlotte est une enfant simple et rieuse. Elle aime beaucoup Manon. Elle n'a pas la moindre idée de la haine qu'elle lui porte et de la souffrance qui est en elle. Elle accepte de bonne grâce. Pendant un moment, Manon a un fol espoir. On dirait que Charlotte ne grandit plus. Et puis, un jour, elle doit se rendre à l'évidence : sa sœur dépasse nettement l'entaille du mur... Thomas Lefranc a dû s'en rendre compte aussi, car le lendemain, il arrive avec sous le bras une magnifique robe verte. Charlotte pousse des cris de joie en la voyant. — C'est pour moi ? — Mais oui ! Tu es une grande fille, maintenant. Manon, qui était là, ouvre aussi la bouche pour crier, mais elle refoule son cri dans sa gorge, tout comme elle empêche ses sanglots d'éclater. Elle court dans sa chambre. Elle ouvre sa fenêtre et regarde longuement la Seine au-dessous... En ce moment, Charlotte doit enlever la robe grise, trop petite pour elle, et la donner à la femme de chambre pour qu'elle en fasse cadeau aux pauvres. A présent, elle doit enfiler sa robe verte... Manon se perd dans la vision de ce spectacle qu'elle a eu sous les yeux depuis toujours : la Seine et son animation ; les pêcheurs dans leurs barques, les gamins barbotant près des rives, les avaleurs de nef, ainsi qu'on les appelle, tirant en longues files, avec de grosses cordes, les péniches depuis le chemin de halage. Dans ses bras, elle tient sa poupée Amélie et il lui semble qu'elle lui parle. Amélie lui dit qu'elle devrait se jeter par la fenêtre. Ce serait mieux pour tout le monde. Ce serait la sagesse. Mais Manon n'est pas en mesure d'écouter la voix de la sagesse. Il y a trop de haine en elle. Elle lance sa poupée avec un grand cri... Une fillette qui se trouvait en barque avec son père lui fait signe d'aller la chercher. Peu après, Manon voit Amélie dans les bras de la petite fille. C'est bien : sa poupée n'est pas au fond du fleuve. Maintenant, il n'y a plus qu'à attendre la nuit... La nuit venue, quand tout le monde dort, Manon quitte son lit. Elle tient dans la main droite une paire de ciseaux, dans la gauche, elle a un papier roulé en boule. Elle avance comme une somnambule vers la chambre de sa sœur, mais elle n'est pas somnambule. Elle sait parfaitement ce qu'elle va faire. Elle agit avec des gestes précis, assurés. Elle ouvre la porte sans faire le moindre bruit. Charlotte repose paisiblement dans son lit ; sa robe verte est étalée sur son prie-Dieu. Avec les ciseaux, elle coupe en deux parties égales dans le sens de la longueur la magnifique parure. Elle prend l'une des deux moitiés et s'approche de sa sœur endormie. Maintenant, elle doit aller jusqu'au bout. Elle n'a pas le choix... C'est la femme de chambre qui a retrouvé le lendemain les deux petites filles mortes. Elles avaient toutes les deux une moitié de la robe verte autour du cou, Charlotte dans son lit, Manon dans le vide. Elle s'était pendue. Elle était montée sur une chaise et avait accroché sa corde improvisée à un crochet dans le mur, qui servait autrefois à suspendre les lampes à huile. A ses pieds, elle avait laissé un message laconique sur un papier froissé : «Je ne voulais pas que Charlotte grandisse...»