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Une ville, une histoire
Oualia
Publié dans Info Soir le 17 - 02 - 2013

Exigence - Aucune famille dans cette grande ville portuaire n'a jamais osé demander sa main tant elle paraissait inaccessible.
Rabéa est une vieille femme qui s'est toujours prévalue d'être d'origine hdar, d'extraction aristocratique et même de descendre en droite ligne d'un corsaire qui faisait régner la terreur en Méditerranée.
Selon sa généalogie personnelle, ses arrière- arrière-grands-parents seraient Turcs originaires d'Anatolie.
De son mariage, elle aura une fille qu'elle appellera d'un nom inconnu dans les annales de l'état civil et même jamais utilisé : Oualia.
Elle élèvera cette enfant dans le luxe et veillera à ce qu'elle ne manque de rien et rien n'était plus beau pour elle que Oualia.
Et c'est vrai que la nature avait gâté cette fille d'un physique de mannequin, de grands yeux noirs et d'une peau si blanche qu'elle ressemblait à de l'albâtre.
Aucune famille dans cette grande ville portuaire n'a jamais osé demander sa main tant elle paraissait inaccessible. Mais bien sûr la jeune fille avait ses propres rêves.
Le Prince charmant qui hantait ses nuits dans ces années 50 était Farid el-Atrache qui avait tout pour lui, la beauté, l'élégance, la jeunesse, une voix d'or et énormément d'argent sans compter son extraordinaire célébrité dans le monde arabe.
Mais lui, en revanche, n'était pas accessible pour elle.
Et à force de rejeter de nombreux prétendants qui avaient à ses yeux tous les défauts, la jeune fille finira par accepter du bout des lèvres la sollicitation d'un chef de service à la préfecture, un poste exceptionnel tenu par un musulman à cette époque.
Au bout de deux ans de mariage, son mari demandera le divorce en prétendant qu'une femme aussi gâtée ne pouvait jamais construire un foyer. Elle n'avait alors que 25 ans. A 30 ans elle refuse d'autres prétendants parmi lesquels un professeur de lycée et un dentiste car elle estimait que leur famille n'avait pas de rang hiérarchique.
Et comme le chevalier romantique tardait à venir alors qu'elle bouclait ses quarante-cinq ans, sa mère lui conseillera vivement de prendre pour époux, n'importe quel prétendant car le temps de la fine bouche était révolu.Elle convolera la mort dans l'âme... avec un épicier fraîchement urbanisé et qui n'avait ni ancêtres ni pedigree à faire valoir.


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