Première - L'Uruguay a franchi, l'année dernière, une ligne qu'aucun pays n'a osé franchir jusque-là en légalisant le commerce du cannabis. C'est là une première mondiale que le Président uruguayen n'a pas manqué de saluer car, pour lui, «c'est la meilleure façon de lutter contre le narcotrafic». «Le meilleur moyen de résister à la tentation c'est d'y céder», disait Oscar Wilde. Cette citation, les sénateurs uruguayens l'ont faite en approuvant, le 10 décembre 2013, un texte régulant la production et la vente de cannabis. Pour la première fois au monde, un Etat a été chargé de contrôler la filière des stupéfiants, de la production jusqu'à la consommation. Concrètement, le texte de loi adopté autorise explicitement l'accès au cannabis via l'auto-culture, la culture dans des clubs de membres et la vente libre en pharmacie. Le tout sous le contrôle de l'Etat. De fait, quiconque souhaitant cultiver cette drogue doit s'inscrire sur un registre national. Cependant, la vente est réservée aux seules personnes majeures résidant en Uruguay. Pour le Président José Mujica qui a œuvré pour l'adoption de cette loi dont il est l'instigateur, la régulation du commerce de la drogue vise surtout à couper l'herbe sous le pied des trafiquants. «Cette réforme a pour but de ne pas laisser ce marché aux narcotrafiquants. Il ne s'agit pas d'une défense de la marijuana. Aucune addiction n'est bonne. Ce que je crains le plus, c'est ce qui vient. Et ce qui vient, ce sont les drogues synthétiques, celles qui sont fabriquées en laboratoires», a-t-il affirmé à ce propos. Même s'ils ont convaincu un certain nombre d'anciens Présidents latino-américains qui ont d'ailleurs applaudi la mesure, les arguments du Président uruguayen ont été rejetés en bloc par l'Organe international de contrôle des stupéfiants (Oics), dépendant des Nations unies. Pour ses responsables, cette législation qui enfreint la convention unique sur les stupéfiants de 1961, dont l'Uruguay est signataire, ne réglera en rien l'épineux problème du trafic de drogue. Un avis partagé par l'opposition uruguayenne qui a estimé qu'une plus grande disponibilité de la marijuana entraînera une plus grande consommation et un accès plus facile des enfants et des adolescents à cette drogue. Pour leur part, les Uruguayens ne se sont pas montrés favorables à la légalisation du commerce du cannabis. 62 % d'entre eux se sont exprimés contre le projet du Président Mujica, selon un sondage réalisé quelques heures seulement avant l'adoption de la nouvelle loi.