Approche n Une communication se proposant de réfléchir sur les diverses entraves au métier d'historien en France, a été animée jeudi au CCF par le docteur en histoire, Laurent Martin. Parler de recherche et d'écriture de l'histoire revient inévitablement à évoquer les mémoires oubliées, mises sous silence. La tâche de l'historien en quête de véracité des faits est d'autant plus délicate lorsque ce dernier est soumis, au cours de son travail de recherche, aux lois tacites de la censure. Chargé de recherche au centre d'histoire de sciences Po à Paris, Laurent Martin dont la conférence était tournée sur les «lois mémorielles», a tenté de lever le voile sur le rapport opaque qui existe entre les pouvoirs publics ou autres groupes de pression et le simple citoyen dans la manière d'appréhender la recherche historique. Dans sa conférence intitulée «Histoire, une discipline sous influence», l'orateur parlera de prime abord de la censure en évoquant toutes les dynamiques qui contrôlent, orientent ou empêchent la production de pensée sur l'histoire. «Je vais centrer mon propos sur l'histoire contemporaine française que je connais et que je pratique dans le cadre professionnel», a-t-il souligné. S'accordant sur le fait que la France fait partie des catégories politiques des sociétés libérales et démocratiques, celles dont la tradition est centrée sur «l'affirmation du droit du citoyen à connaître le passé de sa société, le moins reluisant fût-il», dira-t-il. Il notera que ce fonds hérité d'une philosophie développée depuis la Révolution française avait incité, autrefois, le citoyen à connaître son passé afin d'éviter les erreurs commises, cette idée généreuse comprend la notion de progrès et de perfectibilité avec la société pour un meilleur avenir. Néanmoins, relèvera-t-il, «dans toutes ces généralités généreuses on s'aperçoit quand on descend dans le concret que les législations nationales et les pratiques administratives ont tendance à écorner assez facilement ces nobles principes en rendant difficile aux historiens l'accès aux traces du passé, aux archives en particulier». Il a ensuite insisté sur les mécanismes qui empêchent l'accès aux productions historiques. Il a notamment fait référence à la censure qu'il a défini, selon les termes d'un spécialiste, comme le contrôle systématique dans les échanges d'informations par les autorités. Cette censure est dirigée contre un travail historique à toutes les étapes de son élaboration, parfois même contre ses consommateurs. Selon notre conférencier, cette censure peut être officielle ou non, formelle ou informelle ce qui donne «la possibilité de déterminer pour chaque pays, les zones d'ombre, les trous noirs et de voir les sujets qui fâchent», a-t-il ajouté. Se penchant sur le panorama des moyens légaux ou pas qui régissent l'histoire par des lois de contrôle dont l'un des principes de fonctionnement, outre le pouvoir de conserver ou de détruire les archives, est le délai de communicabilité qui ne doit pas dépasser les 50 ans. «Il s'agit de comprendre comment en France la culture du secret a perduré jusqu'à nos jours sans être véritablement remise en cause», a-t-il affirmé.