Dérive n Le communautarisme dans sa conception actuelle est, en réalité, une réplique déformée, voire aux antipodes de ce qui se pratiquait jadis. Le concept du communautarisme en lui-même a été dévoyé en Algérie, de ses valeurs ancestrales pour se voir prendre, de nos jours, des formes d'épanouissement individualiste comprenant notamment un partage de la rente. Ce constat a été fait, hier, à l'occasion de la tenue à l'université d'Alger du XIe Colloque national sur les organisations communautaires en Algérie. Intervenant en marge de ce colloque qu'a abrité l'Auditorium de la faculté de Bouzaréah, le docteur Bouzida Abderrahmane de la faculté de Sociologie (Université d'Alger), a souligné que les réseaux sociaux (partis politiques, organisations de la société civile…), en plus d'œuvrer à se constituer «un capital social» pour assurer un «épanouissement matériel» dans les milieux citadins, se dirigent désormais vers la campagne, histoire de retrouver une crédibilité perdue. Ainsi, certains hommes politiques, et afin de gagner la sympathie des communautés riveraines, entreprennent, dans ce dessein, un certain nombre d'actions. Celles-ci se résument – de manière aléatoire - en des travaux de relooking des tombeaux des «Saints patrons», et en des cérémonies dédiées à leur mémoire, etc. D'autres se rapprochent des Zaouïas dans le but, bien précis, d'assurer une stabilité sociale, cette dernière existant, au demeurant, grâce aux Zaouïas. D'autres acteurs, enfin, tentent de rassembler et même d'impliquer leurs communautés respectives dans cette entreprise de partage de la rente. Outre une acception purement matérialiste, le communautarisme tel que celui auquel on assiste, en Algérie, renferme par ailleurs un autre aspect, politique cette fois. Certains chefs d'Etat qu'a connus l'Algérie par le passé prenaient en compte l'aspect «communautarisme» dans la nomination de leurs collaborateurs et faisaient en sorte qu'ils soient représentatifs de toutes les régions du pays. Ils s'y appliquaient assidûment et veillaient à ce que le «dosage» dans les nominations au sein de l'Exécutif soit suffisamment équilibré de telle sorte à éviter toute forme de contestation. Le concept séculaire de tribalisme ou communautarisme refait aujourd'hui surface, en Algérie, sous forme de ce qui est communément appelé, la société civile, souligne pour sa part un autre enseignant. Associations, partis ou organisations de masses constituent désormais le communautarisme algérien et s'organisent pour se diviser la rente. Le but recherché – et souvent sous-jacent car sous-tendant toutes leurs actions –, étant de se partager la rente tout en essayant, en outre, de s'assurer un capital social fort et conséquent.