Ali Benflis ne revient pas en arrière. Qu'elles viennent du pouvoir politique ou du gouvernement, toutes les décisions semblent décidément, à ses yeux, «illégitimes», et par ricochet, vouées à l'échec et sont donc rejetées en bloc. Un rejet systématique que le candidat à la dernière présidentielle n'a guère de mal à argumenter, tant que «la vacance du pouvoir est flagrante», répétera-t-il à chaque occasion. Pour une énième fois depuis le dévoilement de l'avant-projet de Constitution, le président de Talaîa El Houriyat a violemment critiqué la révision constitutionnelle. Dans une conférence de presse organisée au siège de son parti à Alger, M. Benflis a exposé son «Livre Blanc» sur cette révision, intitulé Le coup de force constitutionnel. Après avoir détaillé les grands axes du livre blanc, le conférencier a estimé qu'il est «légitime» de conclure que «cette révision constitutionnelle n'a été ni consensuelle ni rassembleuse comme le souhaitaient ses auteurs». M. Benflis dit avoir jugé utile de revenir à l'opinion par un «livre blanc» sur les desseins inavoués, les objectifs véritables et le caractère foncièrement inutile de cette révision constitutionnelle. Ali Benflis, invité à l'époque aux deux rounds de consultations autour du projet en sa qualité de personnalité nationale, invitation qu'il avait décliné, explique ensuite les raisons du livre. «Ce Livre Blanc a pour but de relever combien les suspicions, les doutes et les craintes qu'elle (la révision de la Constitution) avait suscités étaient justifiés», dira-t-il. Le peuple algérien, explique-t-il en seconde position, «seul constituant» a été totalement exclu de l'intégralité du processus. Pour cette raison, le livre consacré à ce processus constitutionnel «vient apporter les preuves confirmant que la révision constitutionnelle n'est qu'un autre jeu du sérail, qu'elle est foncièrement inopportune et inutile et qu'elle est destinée seulement à différer le règlement de la crise de régime et non à la résoudre», ajoutera l'ancien chef de gouvernement sous Bouteflika. Cette révision «ne change rien de fondamental ou d'essentiel dans la nature du système politique algérien, le livre en question démontre clairement qu'avant, comme après la révision constitutionnelle, le système politique algérien est personnalisé à l'extrême, qu'il est bâti sur le culte de l'homme providentiel, qu'il est autocratique et qu'il est totalitaire. Ce Livre Blanc démontre, dans le même sens comment la révision constitutionnelle a accentué la personnalisation du pouvoir et comment elle a conforté la concentration des pouvoirs entre les mains d'un seul homme», explique-t-il encore. Interrogé sur les dernières opérations dans l'institution militaire, notamment la transformation du département du DRS en DSS contenant trois directions, M. Benflis, en sa qualité de juriste, fera remarquer que deux articles de l'ancienne Constitution régissant le fonctionnement et l'organisation militaire ont été supprimés. Il s'agit des articles 25, 122 et 123. «Le premier qui aborde le rôle de l'armée a été maintenu dans la nouvelle Constitution. Tandis que, le second qui permettait de légiférer en matière de la défense nationale, et l'article 123 qui stipule que la sécurité nationale est encadrée par une loi organique, ont été supprimés d'une manière surprenante», a-t-il fait remarquer.