Photo : S. Zoheir Par Hassan Gherab Le théâtre de Verdure, les salles El Mouggar, Atlas et Ibn Zeydoun, le Théâtre national d'Alger, le palais de la Culture et quelques autres sites à Alger ont tourné à plein régime durant le mois de Ramadhan. Si l'on ajoute toutes ces «kheïmas» organisées un peu partout, on ne peut que conclure sur la bonne santé de la culture en Algérie. Car, cette ambiance de fête quotidienne ne se limite pas à la capitale, mais elle est généralisée. Un peu partout, dans toutes les grandes agglomérations et les petites villes du pays, ça chante, ça danse et ça joue du théâtre. Toutes les institutions officielles se réservent pour le Ramadhan et préparent des programmes d'animation pour la circonstance. Des opérateurs privés mettent également à profit ce mois pour organiser des soirées festives, mais où la culture est surtout un argument commercial. Tout le monde s'y met et la fête est partout. On se marche même sur les pieds. Il y en a pour tous. L'offre dépasse la demande. Pourtant, on en compte des consommateurs. Certains concerts se sont joués à guichets fermés. Des spectacles qui, en d'autres temps, n'auraient pas intéressé le gardien de la structure même, ont eu leur public. Après la rupture du jeûne, les gens sortent et ne demandent qu'à consommer à n'en plus pouvoir tous les plaisirs de la vie. Et, après la nourriture, la fête est à ce titre une source de plaisir que tout le monde apprécie et recherche. Quand le ventre est plein, la tête chantonne, dit fort à propos ce proverbe bien de chez nous. Ainsi, le premier repas avalé, la cigarette grillée, le café dégusté, on s'occupe à chercher quel spectacle choisir pour la soirée.On retiendra toutefois que ces programmes d'animation des soirées de Ramadhan se caractérisent par la qualité des arts qui y sont privilégiés : ils sont exclusivement distractifs, festifs. «On vient pour danser et nous amuser, pas pour nous prendre la tête avec des spectacles qui vous parlent de politique», nous dira une spectatrice dans une kheïma. «Vous pouvez, vous, aller voir un film ou une pièce de théâtre après le f'tour ?» nous demande un jeune en réponse à notre question de savoir s'il lui arrivait de «consommer» autre chose que de la musique dansante en soirée. «Après le f'tour, il faut quelque chose de léger, digeste, pas une prise de tête», renchérira un autre. La demande est sur la «culture fast-food». Les arts, expression du génie créatif de l'Homme, n'ont pas la cote.Mais, en faisant valoir un impénitent optimisme, on peut se féliciter de l'existence de cette animation festive généralisée qui pourrait faire œuvre pédagogique en rapprochant la culture de la société, à charge après pour les artistes et les responsables culturels de faire tout pour redonner aux arts leur valeur et leur importance réelles aux yeux de la société, ainsi que leur place. Or, pour l'heure, passé le Ramadhan, les soirées suivront, et il n'y aura plus que cette activité culturelle en dents de scie, tant sur le plan qualitatif que quantitatif, qui ne fera qu'associaliser un peu plus la culture ou déculturaliser la société.