Créer une association culturelle en Algérie est chose, relativement, aisée. On peut en avoir dans le douar le plus inaccessible, la commune la plus pauvre, la localité la plus reculée. Une quinzaine de personnes, un programme, des objectifs, et vogue la galère. Car, quand on croit avoir tout réuni, il reste à trouver ces fameux «moyens», financiers et logistiques, sans lesquels aucun programme, projet, ou la moindre initiative ne pourrait se matérialiser.C'est là que le bât blesse. A quelques rares exceptions, toutes les associations existantes, et elles sont des milliers, se plaignent de n'avoir aucun soutien ni subvention des pouvoirs publics qui les marginalisent, les excluent, au bénéfice de quelques-unes seulement pour le seul motif que ces dernières acceptent de faire le jeu, politique, de l'administration.L'instrumentalisation du mouvement associatif est une réalité indéniable, mais il faut dire aussi que les associations y ont prêté le flanc. En se mettant sous la dépendance des autorités locales et des pouvoirs publics, elles leur ont donné toute latitude pour qu'ils «monnayent» des subventions rachitiques qui suffiraient à peine à monter une petite exposition, alors qu'avec une bonne réserve de volonté, un brin d'imagination et un programme bien torché, une association peut s'imposer sur le terrain. Ce faisant, elle pourra dès lors prétendre à des soutiens, et elle a bien plus de chances de les avoir que si elle restait à pleurer sur son sort en accusant tout et tous de lui barrer la route. D'autant plus que l'administration a vraisemblablement changé son fusil d'épaule et revoit ses rapports avec le mouvement associatif. Les responsables locaux sont de plus en plus enclins à travailler en collaboration avec les associations «sérieuses», voire à leur déléguer certaines missions. La direction de la culture de la wilaya de Constantine donne l'exemple de cette disposition de l'administration à travailler avec les associations. Son responsable, M. Foughali, n'a en effet cessé d'inviter toutes les associations, sans aucune exclusion, à se rapprocher de la direction et à s'impliquer activement et concrètement dans la vie culturelle locale. La seule condition posée par le responsable est que l'association ait un programme bien ficelé et des objectifs bien ciblés.Les associations d'Oran, du moins certaines, ont fait mieux : elles ont investi le terrain et sont devenues des acteurs incontournables. L'association Bel Horizon, qui milite pour la sauvegarde et la réhabilitation du patrimoine historique oranais, est ainsi devenue «le guide attitré» à qui la wilaya n'hésite pas à confier ses invités et dont l'avis sur tel chantier de restauration ou telle opération de sauvegarde est pris en considération par le ministère de la Culture. Il y a aussi le Petit Lecteur pour le livre pour enfants, Amel pour le théâtre, Santé Sidi El Houari pour la préservation de ce quartier historique d'Oran ou encore l'association le Libre pinceau pour, comme son nom l'indique, la promotion et l'enseignement des arts plastiques. Ces associations ont pour points communs leur indépendance, leur volontarisme et la besogne abattue avec les moyens qu'elles ont dénichés. Ces cinq formations, qui ne sont pas plus riches que les autres, à elles seules, totalisent plus d'actions que toutes les autres réunies. Leur force ? Une foi inébranlable en leur mission, un engagement inépuisable et beaucoup d'imagination. «Une association, c'est avant tout une question d'investissement personnel, de sacrifices. Après on peut parler de finances, sinon cela ne servirait à rien», résume un militant. Et si toutes les associations en prenaient de la graine, la culture, qui pourra atteindre les recoins les plus reculés du pays, ne pourrait que s'en porter mieux. H. G.