Tout aussi habituelles que les flambées des prix à l'approche du Ramadhan sont les sorties des officiels qui nous expliquent qu'il n'y a aucun problème de disponibilité des produits et que les consommateurs ne sont pas que des victimes, mais aussi les coupables et les responsables de leur malheur. Ce discours est connu et n'a plus aucun impact sur le citoyen qui, tant qu'il n'aura pas la certitude de disposer d'un marché contrôlé et régulé, continuera à ne compter que sur lui-même et ses capacités de se constituer des réserves pour parer aux pénuries des produits et/ou augmentations des prix : des habitudes et des réflexes acquis avec les pénuries qui existent depuis l'époque des Souk El Fellah. Et ce ne sont pas des discours prometteurs et rassurants, auxquels du reste personne n'ajoute crédit, qui pourraient inhiber un réflexe vieux de plusieurs décennies. Mais si on n'écoute pas les discours d'autosatisfaction, cela ne veut pas dire que les responsables peuvent servir n'importe quel argumentaire et prétendre, qui plus est, le faire gober aux citoyens. C'est à cet exploit que s'est essayé Bouguerra Soltani, jeudi dernier à Relizane. Le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP) a tout bonnement affirmé que les pénuries, la cherté de la vie et les augmentations ne sont que de l'intox, œuvre de certains visant à alarmer le front social et que ce n'est là qu'une «intrusion politique non annoncée surgissant toujours au moment où d'importants rendez-vous électoraux approchent en Algérie». M. Soltani ira plus loin en qualifiant ces augmentations de prix, une réalité subie au quotidien par les consommateurs, de prévisions non objectives visant à semer l'angoisse au sein de la population à des fins politiques et électorales. «Ce sont des méthodes propres à certains, surgissant traditionnellement dans de telles occasions, notamment la rentrée sociale ou à l'approche du Ramadhan, deux périodes sensibles», dira-t-il. «Cela est particulièrement dû à l'approche de l'élection présidentielle, au cours des quatre premiers mois de l'année prochaine, et qui sera précédée du projet d'amendement de la Constitution». Abandonnant tout réalisme et toute attache avec le vécu des citoyens, le leader du MSP soutiendra que le pays enregistre une abondance de produits qui, ajoutée aux mécanismes mis en place par l'Etat, garantira une stabilité et un équilibre des prix et des opérations de distribution tout au long du mois de Ramadhan. Excellant dans les pirouettes, l'homme politique et responsable, reniant ses propres assertions, finira son allocution en appelant toutes les parties ainsi que les citoyens à «barrer la route à ceux qui utilisent le mois du pardon et de clémence pour porter atteinte au pouvoir d'achat des citoyens et exploiter leurs sentiments à la veille d'importants rendez-vous à l'image des rentrées scolaire et universitaire, du Ramadhan ou des fêtes en doublant les prix ou en propageant des rumeurs diffamatoires». Il vaut mieux entendre ça qu'être sourd. Dire la chose et son contraire dans un même discours, cela dénote une méconnaissance indéniable des réalités et de ceux qui les subissent ou, pis, une volonté d'exploiter une situation à des fins politiciennes. H. G.