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Les restaurants de la rahma privés ou la solidarité citoyenne
Chaque jour, ils offrent des repas gratuits aux nécessiteux
Publié dans La Tribune le 25 - 09 - 2008


Photo : Riad
Par Samir Azzoug
La «rahma» est un vocable arabe très difficilement traduisible. Il peut aussi bien signifier l'absolution, l'amabilité, l'aumône, la charité, la compassion, la grâce, l'indulgence, le pardon ou la pitié. Mais le mot français qui se rapproche le plus reste la miséricorde, cette bonté qui incite à l'indulgence et au pardon.
En Algérie, c'est pendant le mois de Ramadhan que ce mot est le plus usité. Ils sont nombreux ces lieux qui portent une enseigne en arabe ou en français où figure la transcription du vocable. Les «restaurants de la rahma» poussent comme des champignons dans les artères. Il existe même plusieurs formules de resto «rahma». Il y a ceux organisés par le ministère de la Solidarité, d'autres par le Croissant-Rouge ou les APC, d'autres par des associations agréées par le ministère précédemment cité et d'autres encore par des âmes charitables, des particuliers qui ont saisi le vrai sens du mois sacré, celui du partage et de la compassion. Des propriétaires de commerce, de fast-foods, de gargotes, de pizzerias ou même sans aucun lien avec la restauration s'appliquent, l'espace d'un mois, à offrir aux nécessiteux un repas gratuit pour la rupture du jeûne.
Qu'y a-t-il derrière la charité ?
«La restauration est gratuite pour tout le monde. Qu'il soit dans le besoin ou simplement de passage, quiconque se présente à l'heure du f'tour est servi», explique Ali à l'entrée de son petit restaurant populaire de Vieux Kouba. Petit de taille, pantalon noir retroussé au niveau des mollets, marcel (tricot de peau), espadrilles et moustache à la turque, Ali sue à grosses gouttes devant l'entrée du restaurant. Collé à la vitrine, sur une simple feuille de papier, est écrit au stylo bleu «restaurant de la rahma. Venez manger gratuitement». Les moyens sont dérisoires, mais l'intention est celle des grandes âmes. «Toute l'année, on ne pense qu'à soi. Avec l'avènement du mois de Ramadhan, un sentiment de compassion nous pousse à faire ce genre d'actions», poursuit-il. Est-ce vraiment de la charité gratuite ou y a-t-il une arrière-pensée plus terre-à-terre derrière ces actions individuelles ? «Ils ont sûrement quelque chose à se reprocher», nous interpelle un jeune homme assis sur le capot d'une voiture garée en face d'un de ces lieux. «Pendant toute l'année, ils saignent leurs clients, trichent sur la marchandise et ne respectent pas les conditions d'hygiène, mais dès que le mois de Ramadhan approche ils tentent de s'acheter une bonne conscience», poursuit-il.
«Vous savez, on ne gagne rien à agir de la sorte [dispenser des repas gratuits], sauf la paix de l'âme. Cela ne fait pas baisser nos contributions fiscales et ce n'est aucunement une opération de marketing [rires]. On offre des repas à des gens qui sont dans le besoin, je ne m'attends pas à ce qu'ils deviennent, après le mois sacré, de fervents clients, ils n'ont pas d'argent. C'est justement le principe de l'opération, offrir un repas aux nécessiteux», se défend un autre bienfaiteur rencontré au niveau de Ben Omar.
Ces explications ont été largement partagées par Ali. «J'aurais très bien pu fermer le commerce pendant tout le mois. Cela m'aurait permis de prendre un congé et de me reposer un peu. Au lieu de cela, j'ai sollicité mes employés et amis afin de me prêter main-forte. Bénévolement, on vient chaque jour préparer le repas», explique-t-il. Selon ces explications, lui et deux autres personnes viennent quotidiennement quatre heures avant l'appel de la rupture du jeûne pour préparer le repas. De la «chorba», une soupe incontournable préparée par tous les foyers durant les 30 jours de Ramadhan, un plat de résistance, une salade et un dessert, voilà le menu quotidien offert par Ali aux convives. Sur le montant de la facture quotidienne du repas, notre interlocuteur décide de garder le silence. «C'est entre moi et mon Créateur. Le prix importe peu», déclare Ali. Quant au nombre de personnes qui viennent quotidiennement rompre le jeûne chez lui, ils seraient une trentaine. «Cela varie de 25 à 30 personnes. Il y a pratiquement une vingtaine d'habitués, les autres, ce sont plutôt des gens de passage dans le quartier surpris par l'adhan [appel à la rupture du jeûne]».
Mais au-delà du nombre, qui sont ces gens qui se dirigent vers ces lieux de bienfaisance et quelles sont les raisons qui les y ont conduits ?
Qui sont les nécessiteux ?
D'Après Omar, un individu qui se dit être le bras droit d'Ali, «il y a de tout». Un air suspicieux, des yeux inquisiteurs, curieux dans l'âme, durant toute la conversation qu'on a eue avec Ali, il s'approchait de nous à petits pas, tendant l'oreille avec un faux air distrait. Au bout de son «approche», et sentant l'ambiance se détendre, sa langue commence à se délier.
«La misère touche tout le monde. Le soir, on voit venir des gens qui sont mieux habillés que moi. D'autres stationnent leur véhicule juste en face du restaurant et entrent sans aucune pudeur pour manger. Et, bien entendu, il y a les autres. Les vrais nécessiteux», constate-t-il avec un air savant que ne peuvent prendre que des gens comme lui. Ali, plus tempéré, sourire aux lèvres nous fait signe de la tête, manière de dire «ne lui prêtez pas trop attention». Pour lui, c'est vrai qu'il y a plusieurs catégories de gens qui viennent manger. «Il y a d'abord les travailleurs célibataires. Ce sont en général des jeunes qui ont quitté leur famille pour venir chercher un moyen de subsistance dans la capitale. Pris par leur travail, ils préfèrent venir manger ici. Il y a aussi les étudiants. Même si la rentrée universitaire n'a pas encore débuté, des étudiants en fin de cycle ou ceux qui préparent certains examens viennent se restaurer. Il y a les passagers. Ce sont des gens qui sont arrivés de loin pour une raison ou une autre et qui, ne trouvant pas où rompre le jeûne, choisissent de s'attabler chez-nous. Et, bien sûr, il y a les vrais nécessiteux et des cas plus spéciaux. J'ai deux personnes qui n'aiment pas la façon de cuisiner de leur épouse, d'autres qui n'ont pas assez d'espace dans la maison et qui préfèrent l'ambiance du restaurant» énumère notre interlocuteur.
On décide de laisser nos locuteurs vaquer à leurs occupations pour revenir quelques minutes après la rupture du jeûne. Exactement une demi-heure après. Les convives étaient encore installés devant les longues tables. On décide de leur laisser le temps de terminer le repas, sachant qu'en nourriture, c'est toujours la dernière bouchée qui a le plus de saveur, pour aborder quelques-uns à la sortie. Si les deux ou trois premiers ont fui notre approche, fonçant tête baissée vers les petites ruelles du quartier, d'autres plus expressifs ont accepté de nous parler. «Cela ne peut se passer qu'en Algérie. Des gens assez généreux pour offrir des repas gratuits aux autres», déclare fièrement un quadragénaire tirant allègrement sur la très célèbre et très prisée première cigarette d'après le f'tour. «C'est dans des moments pareils que j'apprécie mon pays et ma religion»,
poursuit-il. Sur le nombre de ce genre de restaurants de la «rahma» privés, il est très difficile de se faire une idée. Sur des décisions personnelles et sans avoir besoin d'une autorisation particulière (selon les dires de plusieurs restaurateurs), ils sont des centaines, voire des milliers à offrir ce genre de services uniquement dans la capitale. Ni subventionnés, ni dédommagés, ni exonérés d'impôts (selon leurs déclarations), ces bienfaiteurs contribuent chaque année à rendre la souffrance des nécessiteux moins pesante le mois sacré.


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