De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Dans les pays développés, les politiques culturelles municipales sont réfléchies en termes de citoyenneté et de démocratie, en supprimant le plus d'obstacles possible dans l'accès équitable aux connaissances et au savoir. L'action culturelle de proximité constitue, en ce sens, un outil efficace pour cultiver les valeurs de respect et de tolérance, développer l'esprit critique de chaque citoyen, établir de véritables canaux de communication et instaurer une saine tradition de rencontre et d'échange. La gestion de ce dossier exige beaucoup de sérieux dans la mesure où il constitue un paramètre important dans le développement d'un pays, l'essor d'une région ou le rayonnement d'une localité donnée. Paradoxalement, nos communes n'accordent aucune attention à cette question. Les centres culturels, les bibliothèques municipales ou les maisons de jeunes n'ont de cela que le nom. Dépourvus de moyens matériels et de compétences humaines, ils sont réduits à de simples éléments de décor. La wilaya de Béjaïa compte une trentaine de centres culturels et une vingtaine de maisons de jeunes, mais aucun établissement n'assure un semblant de régularité dans l'activité. Elle ambitionne d'en doter toutes les communes, sans garantir toutefois une hypothétique exploitation future de ces espaces qui ouvrent leurs portes aux meetings électoraux et les ferment sitôt les élections bouclées. En matière d'infrastructures, on dénombre également plus d'une vingtaine de bibliothèques municipales. En somme, les espaces culturels existent dans toutes les communes. Même si la qualité et la quantité des moyens disponibles ne répondent pas souvent aux normes, chaque municipalité dispose généralement d'un centre culturel, d'une bibliothèque et parfois d'une salle de cinéma ou d'une auberge de jeunes. Mais ces établissements, qu'ils soient sous la tutelle des APC ou celle de la direction de tutelle, restent manifestement sous-exploités, faute d'initiatives et de programmation régulière. La demande existe pourtant. Les citoyens se plaignent souvent du manque de ce genre d'événements pour s'instruire, sortir en famille le soir où acquérir des lectures fraiches. Sachant pertinemment que la culture et le savoir participent à l'épanouissement de leurs facultés intellectuelles et à au développement de leur esprit critique, les populations sont, de plus en plus, enclines à défendre leurs droits culturels. A chaque interpellation sur le sujet, les élus locaux et les responsables du secteur évoquent invariablement l'absence des ressources financières en s'abstenant cependant de se «débrouiller» pour trouver les fonds nécessaires. Les uns et les autres comptent exclusivement sur les subventions publiques qui ne peuvent, à elles seules, pérenniser l'activité culturelle. Sous d'autres cieux, les communes élaborent leurs propres politiques culturelles de proximité et développent un programme de mise en œuvre précis. Les acteurs, les enjeux et les champs d'intervention (patrimoine, lecture publique, enseignement artistique, spectacles vivants, musées et lieux d'exposition, animations culturelles...) sont passés au crible avant d'établir les plannings de programmation. La réflexion y est également constamment renouvelée sur la démarche d'élaboration et de mise en œuvre de ces politiques publiques : Comment agir ? Quelles relations développer avec les institutions, acteurs et opérateurs culturels pour la mise en place de projets culturels locaux ? Quelle relation bâtir entre l'élu, la direction de la culture, les responsables d'institutions ou d'équipements culturels, les associations, les artistes, les usagers, les opérateurs économiques, les mécènes et les habitants... ? Les municipalités s'attachent aussi à repérer les dispositifs de gestion, de pilotage et d'évaluation permettant de mieux justifier de la pertinence des objectifs fixés, de l'efficacité et de l'efficience des moyens mis en œuvre et de l'utilité des actions conduites. Rien de tout cela dans les serviettes de nos maires ! Les animateurs associatifs font avec les moyens de bord pour «bricoler» épisodiquement des manifestations. Mais le bricolage, comme son nom l'indique, ne peut pas durer.