Oyez oyez braves gens, l'Algérienne existe, et elle est même la plus heureuse au monde dans son pays ! Et vous grincheux, chichiteux, hargneux, Hadjs Machos que vous êtes, si vous n'en êtes guère convaincus, dites-vous alors que preuve en est le fait même que la culture soit un mot féminin. Qu'en Algérie, qui est une femme, il se conjugue au féminin et que son ministre est une femme. Elle se prénomme Khalida. Khalida l'éternelle. Preuve féminine que l'Algérienne et la culture sont épanouies pour… l'éternité. Hein, elle pas belle la vie, dites-le, dites-le Hadjs Machos qui ne croyez pas que l'Algérienne, mieux que ses sœurs d'ailleurs, est la «moitié de la religion» et «l'avenir de l'Homme». Et, une fois mère, Eve qui donne la vie aura le paradis sous ses pieds, ainsi qu'en a décidé la volonté divine. Elle a même son propre salon, Eve, le bien-nommé, qui est à sa huitième édition. Un hymne à la culture, on vous le dit, avec ses stands du bonheur féminin dédiés aux cosmétiques, aux produits de «bien-être», à la décoration d'intérieur, aux cuisinières et, cerise culturelle sur le gâteau du bien-être féminin, l'artisanat. Alors, elle pas belle la vie pour l'Eve ? Et comme le 8 mars, c'est sa fête à elle seule, les hommes la chantent. Ils s'égosillent pour elle. Ce 8 mars d'avant les élections législatives du siècle du 10 mai, les Abou Deryassa, Hamidou, Samir Zerieb, Ghilès, Ghani El Djazaïr, Cheb Tewfik, pas celui du DRS, bien sûr, et Nabil Rostom, ainsi que Cheb Yazid, rivaliseront de poésie et de vocalises. Yazid, celui-là, il chante Eve depuis quinze ans, et il veut l'enchanter plus qu'avant. Ce féministe, qui a lu Louis Aragon, est devenu le chéri de ces dames, avec sa célèbre Darou Esshour. Hymne d'amour à ces Eve qui font des gris-gris, des chlaouèche et des harharouch-barbarouch pour séduire ou détruire Adam. Ce coup-ci, Cheb Yazid Aragon leur chantera Had el youm aïdkoum, 8 mars, ya lébnèt.» Hein, dites-nous, Hadjs Machos, Hadjs Fachos moustachus du bulbe, elle est pas belle la vie pour les Algériennes qui ont droit ce 8 mars, au Hilton, ce palace du bonheur méditerranéen, au Botox capillaire ? Dans cette Algérie édénique, qui a accueilli Adam après son expulsion du Paradis céleste, les Hadjs Machos aiment tellement l'Algérienne qu'ils «l'honorent», à défaut de la mettre à l'honneur toute l'année. Par exemple, notre vénérable DGSN qui honore les femmes journalistes et les moudjahidate. Remarquez que les flics sont désormais accompagnés de fliquettes, pas beaucoup mais il y en a quand même 14 000 sur 170 000 policiers. Même le WEB est l'univers d'Eve l'Algérienne. Elle y a ses sites propres du bonheur, comme l'Algérielle où, au pluriel, on leur dit que «la fripe, c'est chic», on leur montre comment prendre soin de leur peau et, à défaut de Botox capillaire, on leur propose un «lissage brésilien adapté à leurs envies». Elle est pas belle la vie pour elles dans une Algérie où leur Abdelaziz Bouteflika a imposé, dans la Constitution, «l'élargissement» de leur représentation politique. C'est que notre grand et bien-aimé président a dû entendre le conseil de Maïssa Bey. L'écrivaine a suggéré que «l'homme se mette dans la peau d'une femme, au moins une fois par an.» C'est pour ça, que le 8 mars, Hadj Macho se plie en huit pour elle. N. K.
