Quand la nature passe de la froidure hivernale à l'exubérance printanière, à Bordj Bou Arréridj, les habitants ne dérogent pas, comme cette année, à leurs traditionnels pique-niques dans les campagnes environnantes, pour célébrer le premier jour du printemps, selon une tradition qui se perd dans les temps les plus reculés. Signe du renouveau et de la vie, annonçant «Tafsouth» (le printemps en tamazight), cette fête promet bonheur et réviviscence, pour les Bordjis qui continuent à célébrer une tradition ancestrale, dans la nature, choisissant des endroits paradisiaques, en espérant toujours, une meilleure année, avec de belles récoltes que promettent les terres fertiles de la région des Bibans. Cette fête populaire dont l'apparition se perd avec les origines lointaines de la culture amazighe, est aussi citadine que rurale dans la région des Bibans et de la grande Kabylie, elle est transmise de génération en génération et reflète la profonde unité culturelle de l'Algérie.
Les bradj pour accueillir Tafsouth C'est dans la joie que les familles bordjies préparent, exclusivement avec des produits des terroirs des Hauts-Plateaux et des Oasis, ce gâteau qui allie harmonieusement les céréales des hautes plaines et les dattes «ghars» des palmiers des Zibans ou du Souf, une variété phoenicicole exclusivement consommée sous forme de pâte. Le fruit est dénoyauté, écrasé et pétri pour farcir, avant de faire cuire, «lambardja» ou «bradj», (les carrés), explique à l'APS Mme Taous 60 ans, réputée la meilleure spécialiste de ce «délice du printemps». Le secret de la réussite de ce gâteau ancestrale, poursuit Mme Taous, est de «choisir la bonne semoule, d'y ajouter de l'huile et du sel, de bien pétrir la pâte avant de l'aplatir et de la fourrer en dattes et la couper en losanges ou en carrés», ajoutant qu'il faut rapidement mettre au feu, pour empêcher la pâte de s'effriter, une fois cuite. Les marchés de la ville de Bordj Bou Arréridj connaissent également, avec l'arrivée du printemps, une ambiance festive, où les dattes, sous leurs différentes qualités, et le beurre naturel, deviennent les «stars des étals» à côté des oranges, le dessert préféré pour passer les «bradj» et fêter tafsouth.
Vingt-quatre heures de fête pour le premier jour du printemps Le jour J, des enfants accompagnés de leurs parents, en voiture ou en bus, se dirigent en groupe vers la campagne. Le printemps est fêté à Bordj Bou Arréridj du matin au soir. Les familles organisent des grandes collations et des repas champêtres, où «lambradja», mais aussi des barbecues de poissons, des œufs bouillis, et des fruits sont au menu. L'occasion est aussi pour les enfants pour se dépenser, profiter du soleil et du grand air, sur des champs verdoyants à perte de vue. La saison printanière, pour les Bordjis, c'est aussi le moment de renouer avec les amis et les voisins, de consolider les relations et renouveler les promesses de fidélité, tout comme la nature qui se mue et se réveille pour se régénérer. Les Bordjis restent attachés à ce rite et lui consacrent une fête particulière, au cours d'une journée porteuse de bonheur et du bien-être partagés.
