«Je ne m'attendais pas à jouer toute une mi-temps» Veh (ent. Wolfsburg) : «Il a été bon» C'est une bonne surprise qu'a vécue Karim Ziani durant ce week-end européen : alors qu'il en était à la préparation physique foncière avec le Vfl Wolfsburg pour la nouvelle saison, la précédente s'étant achevée tard pour lui, voilà que son entraîneur, Armin Veh, prend le risque de le convoquer pour le match de la Supercoupe face au Werder Brême. Le risque était osé, mais calculé car le sponsor de ce match de gala, Volkswagen, qui se trouve être, dans le même temps le sponsor et propriétaire du club, a imposé des règles spéciales dignes d'un match amical, afin de préserver l'intérêt de ce rendez-vous annuel qui n'a jamais été accepté par le public allemand. Des places de 5 à 20 euros seulement… mais aucun succès populaire En effet, de crainte d'une désaffection des supporters, Volkswagen, en collaboration avec la Fédération allemande de football, a tenté plusieurs opérations de charme. La première a été de baisser drastiquement les prix des billets d'entrée. Figurez-vous qu'on pouvait avoir des billets pour la première tribune pour seulement 20 euros ! Là où un match ordinaire de la Bundesliga aurait coûté dix fois plus. Ne parlons pas des gradins auxquels les supporters pouvaient accéder pour seulement 5 euros, soit le «smig» tarifaire dans un des plus grands pays de football au monde. Malgré cela, ils n'étaient que quelque 15 000 spectateurs des deux clubs à avoir effectué le déplacement. Cela était pressenti dès la matinée au niveau de la gare et ses environs : les supporters du Werder, pourtant nombreux, n'ont pas envahi Wolfsburg. Côté populaire, le match a été donc un bide. 20 joueurs sur la feuille de match et 6 changements, comme dans un match amical Deuxième mesure prise par le sponsor pour donner du crédit et un attrait au match : les deux équipes avaient le droit d'inscrire 20 joueurs sur la feuille de match et de procéder à 6 changements chacun durant la rencontre. Comme dans un match amical, quoi ! Cette mesure n'a pas été acceptée par tout le monde, notamment les puristes particulièrement Franz Beckenbauer, mais elle aura eu le mérite de permettre à Karim Ziani d'effectuer ses débuts avec son nouveau club. En effet, Dzeko n'étant pas complètement rétabli, Johnson, Aldung et Dejagah, âgés tous trois de moins de 21 ans, étant jugés encore un peu tendres par Veh et l'inscritpion d'un troisième gardien de but sur la feuille de match étant absurde, c'est donc Ziani qui a eu le privilège d'être convoqué pour compléter la liste, en dépit de son manque de fraîcheur physique. «Je te ferai jouer durant le dernier quart d'heure» «Pourrais-tu jouer 20 minutes ?», a demandé Armin Veh à l'international algérien la matinée du match. «Oui, je pourrai tenir le coup pour une vingtaine de minutes», lui a répondu l'Algérien, pas du genre à se défiler. «Alors, je t'incorporerai durant le dernier quart d'heure.» Voici le projet initial. Du coup, Ziani a fait une bonne sieste l'après-midi, après la séance de mise en place tactique de la matinée, et est parti au stade le soir avec ses coéquipiers avec la ferme volonté de montrer ce dont il est capable. Déjà, durant l'échauffement, il a fait deux ou trois dribbles, durant la séance de mini-match, qui ont laissé le milieu de terrain Schindzielorz bouche bée. Agissant comme un «ancien», il indiquait même à ses coéquipiers, par des gestes, où se placer. Le Werder s'amuse, Veh décide de réagir Dès les premières minutes du match, ça sentait mauvais pour les supporters de Wolfsburg, évidemment un peu plus nombreux que leurs homologues du Werder. La liaison entre les trois lignes, pourtant point fort du champion d'Allemagne durant son glorieux parcours de la saison passée, se faisait très mal. Il manquait du mordant au niveau de l'attaque, où l'absence de Dzeko, véritable complément de Grafite, s'est fait cruellement ressentir. En face, le Werder Brême se montrait très entreprenant, démontrant qu'en dépit du départ de Diego pour la Juventus, la philosophie de jeu de l'équipe, basée sur l'attaque à outrance, était restée intacte. La preuve : le détenteur de la Coupe d'Allemagne ouvre le score grâce à un… défenseur. Même mené, Wolfsburg ne réagit pas. L'attaque est amorphe. Sur l'écran géant du stade, Veh, en gros plan, fait la grimace en hochant la tête. Il fallait que ça change. «Karim Ziani ! Oh oh oh !» et va pour toute une mi-temps ! En deuxième mi-temps, Veh tente un coup de poker : Ziani, «programmé» pour jouer le dernier quart d'heure, est incorporé pour au moins trois quarts (et plus, si prolongations il y aurait). Le coach visait vraisemblablement trois objectifs : ne pas perdre ce match qui tenait à cœur à Volkswagen en tant que sponsor du match, sponsor du club et porteur du nom du stade, déstabiliser la défense disciplinée du Werder par l'incorporation d'un joueur technique et démontrer que Ziani, qui est «sa» recrue à lui, n'est pas un unijambiste. Du virage sud du stade, des «Karim Ziani ! Oh oh oh !», comme au premier jour de l'entraînement de l'Algérien, se sont élevés, mais telle une hirondelle qui, seule, ne peut faire le printemps, Ziani s'est démêlé comme un beau diable, mais ses coéquipiers n'étaient pas tout le temps sur la même longueur d'onde. «Il y a du Ribéry en lui» «Non, mais il n'est pas maladroit avec le ballon !» Des confrères journalistes, qui ont tellement entendu parler de la nouvelle recrue de Wolfsburg qu'ils se sont mis à suivre sa prestation au crible, sont charmés. L'impression est plutôt positive, même si les difficultés physiques que le milieu de terrain algérien a éprouvées durant les dernières minutes, du fait de sa reprise tardive par rapport à ses coéquipiers, l'ont émoussé vers la fin. Wolfgang, stadier, est séduit : «Il y a du Ribéry en lui.» «Oui, mais à un moindre degré», tempère Christian, journaliste local. Même si on lui a assigné de jouer à droite, il n'hésite pas à s'immiscer dans la zone «réservée» au meneur de jeu officiel, le Bosniaque Misimovic. Ziani s'est même aventuré deux ou trois fois sur le côté gauche. Comme quoi, cela ne lui déplait pas de se déplacer sur le terrain, tout en conservant une certaine rigueur. «Il est trop intelligent pour ses coéquipiers» Le clou de sa prestation : un petit crochet suivi d'une passe millimétrée vers Grafite qui s'est retrouvé astucieusement démarqué, mais qui n'a pas su exploiter cette offrande. «Contrairement à ce qu'on pourrait croire a priori, ce n'est pas du tout un individualiste. Il dribble et provoque l'adversaire, mais il joue avec ses partenaires», affirme Andreas Pahlmann, chef du service Sport du quotidien local Wolfsburger Allgemeine. «Je dirai même plus : c'est un joueur intelligent, peut-être même trop intelligent pour ses coéquipiers. Cela s'est vu à deux ou trois de ses centres.» Cette phrase résume l'impression générale : pour une première prestation, de surcroît avec un handicap au plan du rythme, l'impression est globalement très positive. Un geste de colère envers Misimovic Reste à Ziani à régler un gros problème : la communication avec ses coéquipiers. Ne parlant pas la langue allemande, il ne peut discuter qu'avec Kahlenberg et Grafite, seuls joueurs à parler français (et encore, Grafite a beaucoup perdu de son français appris au Mans). Résultat : que de fois l'a-t-on vu, durant le match, user de gestes pour communiquer. Il a même exprimé un geste de colère à l'égard de Misimovic qui lui reprochait son positionnement. Ce n'est qu'un détail et cela viendra avec le temps. Ce qui est certain, c'est que Ziani a globalement réussi sa première sortie, même si la défaite a été au bout du match 2-1 en faveur du Werder Brême. Armin Veh a perdu le pari de remporter le trophée, mais a gagné celui de mettre Ziani vite dans le bain. Le meilleur est certainement à venir. De notre envoyé spécial à Wolfsburg : Farid Aït Saâda «Comment a-t-il donc d'aussi bons rapports avec vous ?» Beaucoup de journalistes rencontrés à Wolfsburg nous ont posé cette question : «Pourquoi Ziani est-il si distant avec les journalistes ?» En effet, l'international algérien ne s'est pas montré très chaud pour parler aux journalistes allemands, se contentent, lorsqu'il est sollicité (comme cela avait été le cas durant la conférence de presse ayant suivi sa signature), de phrases courtes et concises. Nous avons expliqué à nos confrères germaniques que Ziani est loin d'être arrogant et que c'est juste un trait de caractère : il n'aime pas parler à des inconnus. «Comment a-t-il donc d'aussi bons rapports avec vous ?», se sont-ils interrogés. «Parce qu'il entretient une relation de confiance avec nous, forgée par plusieurs années de travail en commun», avons-nous répondu. Cela a semblé les avoir convaincus. Veh : «Son rendement a été satisfaisant» Interrogé, en conférence de presse d'après-match, sur le choix d'avoir incorporé Ziani dès le début de la deuxième mi-temps, alors qu'il n'a que quatre séances d'entraînement dans les jambes, l'entraîneur du Vfl Wolfsburg, Armin Veh, a répondu que «Kahlenberg a déployé de grands efforts durant la première période sur le côté droit et, en dépit de son bon rendement, il était fatigué, ce qui m'a amené à faire entrer prématurément Ziani». Il a jugé le rendement de l'Algérien «satisfaisant», insistant sur le fait qu'il «doit bénéficier de plus de temps pour s'adapter au jeu de ses coéquipiers». La photo de Ziani avec Brehme lors du Ballon d'Or 2007 du Buteur largement commentée La photo illustrant la remise du Ballon d'Or 2007 par le champion du monde allemand Andreas Brehme à Karim Ziani a surpris plus d'un en Allemagne. Personne ne s'attendait à une pareille rencontre entre ces deux stars, chacune dans son pays. «Comment Brehme a-t-il accepté de venir chez vous, dans votre journal ?», se sont-ils interrogés. «Même en Allemagne, il ne s'affiche pas beaucoup en public», ont-ils expliqué. Aussi, le fait que Le Buteur soit un quotidien de football, avec une parution même durant les week-ends, est une autre surprise pour les Allemands. «Chez nous, nous n'avons pas de quotidien de football. Pourtant, c'est l'Allemagne !»
