Le secrétaire général du FLN, M. Belkhadem, a présidé, samedi dernier, un forum sur « les réformes fiscales et bancaires». L'orateur ne dira pas s'il s'agit d'une rencontre programmée de longue date, ou seulement dictée par la conjoncture actuelle que traverse le pays. Cette réunion apparaît pour comme une manière, sans doute, de se placer dans la course de l'après Ouyahia. En tous les cas, un forum sur les réformes fiscales et bancaires, sort quelque peu du sujet à la mode, à savoir « le chômage et la jeunesse » qui a fait des administrations et des entreprises publiques de véritables «berrah» (crieurs publics dans les souks) annonçant à qui mieux mieux des recrutements et des titularisations en masse. Le FLN, parti bien connu par son conservatisme séculaire, dont les députés adoptent unanimement tout texte proposé à l'Assemblée populaire nationale, et qui s'intéresse aux réformes fiscales et bancaires, cela peut susciter des interrogations. Car, s'agissant de secteurs qui n'ont pas connu beaucoup de réformes pendant que M. Belkhadem, alors Premier ministre, présidait aux destinées du pays. Il y a aussi lieu de relever qu'à son le Premier ministre n'était que le simple exécutant du programme présidentiel. « Le mérite d'Ouyahia c'est d'avoir tenté, un tant soit peu, de faire bouger les choses». Nous dira un connaisseur, qui n'est pas vraiment un fervent défenseur de l'actuel chef du gouvernement. Au regard de son poids politique, avec quelques 150 députés et une pléthore de ministres, le FLN avait-il vraiment besoin d'organiser un forum sur le sujet ? Certainement pas, pourrait-on dire, sauf, peut-être, pour donner le change ; d'autant plus que les conclusions du forum ne sont pas très pertinentes. Dans sa conclusion, le premier secrétaire du FLN demande une dépénalisation de l'acte de gestion qui bloquerait, selon lui, l'initiative bancaire. En fait, dans le système bancaire, il y a une règle qu'aucun banquier digne de ce nom n'oserait enfreindre : « sans garantie, il n'y pas de crédit ». « Tout le reste ne tient plus que de la bureaucratie et du banditisme », nous dira un ancien banquier. S'exprimant sur un ton qu'il voulait un peu saupoudré d'ironie, M. Belkhadem ne manquera pas de lâcher « nous n'avons jamais mis en prison un directeur général d'une banque qui n'a pas donné de crédits.» Mais, il taira bien le fait qu'il y ait bien quelques banquiers qui croupissent en prison ou qui ont été réduits au chômage, parce qu'ils ont accordés quelques crédits sans garanties sur injonction venues d'en haut.. Une chose est sûre : on saura que le système bancaire algérien ne manque d'argent. 1.200 milliards de dinars de surliquidités bancaires sont toujours disponibles. Pendant ce temps, des entreprises publiques ne trouvent pas de crédits pour acheter des matières premières ou renouveler leur outil de production. Les milliers de projets en instance pour manque de financement ne sont pas seulement le fait des banquiers mais plutôt du désintéressement des politiques. La rencontre organisée par M. Belkhadem a été sanctionnée par une déclaration commune des experts présents à ce forum, qui ont proposé «la suppression de la législation en vigueur qui consacre une gestion bancaire par les effets d'injonctions «. Une recommandation vivement partagée par le représentant de l'Association des banques et établissements financiers (ABEF), M. Abderrahmane Benkhalfa. Celui-ci a plaidé aussi pour une réforme en soutenant que «trop de contrôle, trop de pénalisation tue l'initiative et n'encourage pas à la prise de risque». Les banquiers, qui savent très bien que leurs affaires c'est d'abord l'argent des autres, notamment celui de l'Etat, ne se sont pas exprimés sur les limites de la liberté de l'initiative qu'ils revendiquent. Alors que pour M. Belkhadem, libérer l'initiative de la «peur» n'empêche pas la mise en place de mécanismes de contrôle et de prudence. M. Belkhadem a été bien inspiré, en débattant dans le cadre du forum de la fiscalité. D'autant plus que les députés, sénateurs et autres hauts responsables de l'Etat sont grassement payés et se constituent ouvertement d'énormes portefeuilles patrimoniaux. Le paradoxe est que nos responsables, politiques ou technocrates, nous abreuvent sans cesse d'exemples venus ailleurs, sauf sur la question de l'imposition sur la fortune qu'ils passent sous silence. «Est ce qu'un agent fiscal peut débarquer comme ça, dans une maison et dire : je viens évaluer votre fortune ?» S'interrogera le représentant du Ministère des Finances. L'enjeu de la finance islamique, abordé à son tour, est considéré comme «un produit utile» selon certains participants. Ce qui permettra à M. Belkhadem de rebondir en s'interrogeant «qu'est ce qui empêche l'ouverture de ce créneau en Algérie ?» Ajoutant que «tout ce qui sert le citoyen devrait être évoqué et étudié». Reste à savoir pourquoi, celui qui fut premier ministre il n'y a pas bien longtemps, a perdu son temps à pourchasser des chimères caractérisées dans une chasse aux sorcières, plutôt que de s'être investi dans le bien-être du citoyen ? L'autre gros dossier évoqué dans ce forum, a porté la fiscalité locale qui échappe aux collectivités, dont plus de la moitié ne doivent leur survie qu'aux perfusions de l'Etat, a relevé M. Belkhadem évitant, toutefois, de reconnaître que, tout comme les banques, les municipalités sont gérées par injonctions, ce qui aboutit au même résultat, à savoir le blocage de toute initiative.