La production industrielle de l'Allemagne a contre toute attente nettement reculé en juillet, nourrissant les craintes d'une nouvelle baisse de régime de la première économie européenne. La production a chuté de 1,5% sur un mois, après une hausse révisée de 1,1% le mois précédent, a annoncé mercredi l'Office fédéral des statistiques Destatis. Une très mauvaise surprise: les analystes interrogés par le fournisseur de services financiers Factset attendaient une très légère progression de cet indicateur, de 0,1%. Pour Johannes Gareis, de la banque Natixis, ce recul, le plus prononcé depuis août 2014, "donne une image déplaisante de l'économie allemande au début du troisième trimestre", réagit-il dans une note. "Même si les données de la production dans les mois d'été font souvent l'objet de révision, la forte baisse alimente les inquiétudes concernant un nouvel affaiblissement de l'économie allemande", abonde l'économiste d'ING-Diba, Carsten Brzeski. D'autant plus que les commandes industrielles, qui permettent d'anticiper l'activité des mois à venir, ont également déçu en juillet. Elles ont augmenté de seulement 0,2% sur un mois, selon un chiffre annoncé mardi, une performance là aussi inférieure aux attentes.
L'effet brexit Dans le détail, la production manufacturière s'est repliée en juillet de 2,3%, selon des chiffres corrigés des variations saisonnières, calendaires et de prix, tandis que l'activité dans le BTP, plutôt terne au deuxième trimestre en raison d'un hiver doux, a retrouvé son élan avec une progression de 1,8%. "Les entreprises industrielles adoptent une attitude attentiste au regard de l'évolution en berne des marchés mondiaux", a commenté dans un communiqué le ministère de l'Economie. Les raisons de la baisse de régime de l'industrie sont multiples. "La tendance a commencé bien avant le référendum britannique" de juin en faveur d'une sortie de l'Union européenne, "mais le Brexit a certainement été l'un des éléments principaux" du mauvais chiffre de la production en juillet, estime Carsten Brzeski. "Il est possible que des commandes aient été annulées" après le vote en faveur du Brexit, "ce qui a ainsi ralenti directement la production", juge Stefan Kipar, de BayernLB. Mais l'Allemagne, championne des exportations, souffre aussi depuis de nombreux mois déjà d'une activité économique plus faible en Chine et d'une atonie de la plupart de ses partenaires commerciaux européens.
Pas de récession Globalement, la production de juillet appuie les prévisions d'un "refroidissement de la conjoncture au deuxième semestre", estime l'expert de BayenrLB, ajoutant que les rythmes de croissance trimestriels ne pourront plus être tenus. Le Produit intérieur brut (PIB) avait progressé de 0,4% au deuxième trimestre, après un début d'année en fanfare (+0,7%). Il n'y a toutefois pas de raison de "s'attendre à une récession, même après les chiffres" de mercredi, juge-t-il. Le gouvernement mise sur une croissance de 1,7% du PIB cette année, après 1,5% en 2015. Le chiffre de la production montre aussi une nouvelle fois que l'économie allemande est de plus en plus dépendante de la consommation intérieure, soulignent les analystes. Dans ce contexte, le débat actuel sur des baisses d'impôts, évoquées encore mardi par le ministre des Finances Wolfgang Schäuble devant le parlement à un an des élections générales dans le pays, devrait se déplacer vers des aides aux investissements pour les entreprises, un meilleur accès au financement des start-up, ou encore des investissements publics dans l'éducation et les infrastructures de haute technologie, juge l'analyste d'ING-Diba. "En clair des instruments pour soutenir la croissance à long terme plutôt que d'apporter un stimulus à court terme", estime-t-il.