Des milliers de Thaïlandais ont commencé hier à entrer dans le grand palais de Bangkok pour se recueillir près de la dépouille de leur roi, une affluence qui a poussé les autorités à renoncer à limiter à 10 000 le nombre de visiteurs quotidiens. De nombreux Thaïlandais ont parcouru des centaines de kilomètres et dormi sur place pour rendre un dernier hommage à Bhumibol Adulyadej, décédé le 13 octobre à 88 ans, après un règne de 70 ans, considéré comme un demi-dieu par la plupart de ses compatriotes. Depuis son décès, des milliers de personnes se pressent chaque jour devant les portes du complexe du grand palais, dans le vieux Bangkok, pour chanter ou prier en son honneur. Mais pour la première fois samedi, la foule a été autorisée à pénétrer dans la salle du trône où repose dans un cercueil la dépouille du monarque, hors de vue, près d'une urne dorée. La crémation ne devrait pas avoir lieu avant une année. Les autorités ont renoncé samedi à limiter à 10 000 le nombre de visiteurs par jour alors que la foule atteignait 100 000 personnes, d'après les estimations d'une cellule installée à l'extérieur du grand palais. Mais Sansern Kaewkamnerd, un porte-parole du gouvernement, a appelé le peuple à ne pas se précipiter les premiers jours, la salle du trône devant rester ouverte aux visiteurs pour longtemps. Consignes strictes La junte a encouragé les manifestations publiques de masse et même organisé des liaisons par autocars et trains gratuits pour acheminer les gens vers Bangkok. Les personnes voulant entrer dans le palais doivent respecter des consignes vestimentaires très strictes: vêtements noirs obligatoires, jupes longues pour les femmes et chaussures fermées. Le respect du deuil royal est un sujet très sensible en Thaïlande: la junte dit avoir renforcé la surveillance des réseaux sociaux pour traquer tout commentaire relevant du lèse-majesté. Les militaires sont au pouvoir depuis un coup d'Etat en mai 2014 qui visait notamment à protéger la monarchie. Dans les rues de Bangkok, de grands portraits du roi recouvrent de centaines de panneaux publicitaires et toutes les télévisions diffusent le programme officiel montrant des documentaires sur la vie du monarque ou des cérémonies royales en cours. Les habitants sont vêtus de noir ou de blanc, couleurs du deuil. Quelques heures après la mort de Bhumibol, le prince héritier Maha Vajiralongkorn avait demandé un délai avant de monter sur le trône. Prem Tinsulanonda, principal conseiller du roi, est devenu régent. Le soutien à la monarchie a souvent permis aux Thaïlandais de se fédérer alors que la politique déchire la société. Depuis une décennie, le pays est divisé en deux camps: les Chemises rouges, mouvement populiste partisan de la famille Shinawatra qui a gagné toutes les élections ces dernières années et leurs ennemis, les Chemises jaunes, élites royalistes.