Face au chiffre avancé de 161 manifestants tués depuis le déclenchement des troubles à la mi-novembre, le pouvoir iranien ne cesse d'évoquer un " complot " ourdi de l'étranger. Vendredi, Amnesty International a estimé que 161 manifestants avaient été tués dans la répression des manifestations, déclenchées le 15 novembre par l'annonce d'une hausse du prix de l'essence, dans un pays frappé par une grave récession. Un chiffre qualifié d'" exagéré " par les autorités iraniennes samedi 30 novembre. " Les statistiques d'organisations internationales sur ceux qui ont été tués dans les récents incidents ne sont pas crédibles ", a affirmé le ministre adjoint de l'intérieur Jamal Orf, cité par l'Agence de presse de la République islamique (IRNA). Ces organisations " exagèrent " les chiffres, a-t-il accusé. Le parquet doit annoncer un bilan basé sur des chiffres qu'il a reçus du bureau du médecin légiste, a déclaré M. Orf, sans préciser de date.
" Attaque épouvantable contre la vie humaine " Pour l'organisation de défense des droits de l'homme, " la hausse du bilan des morts est une indication alarmante de la brutalité avec laquelle les autorités iraniennes ont traité des contestataires non armés, et révèle une attaque épouvantable contre la vie humaine ". L'organisation non gouvernementale (ONG) dit avoir compilé des " témoignages épouvantables de témoins et de proches des victimes " et analysé et vérifié des vidéos " prouvant clairement que les forces de sécurité iraniennes ont utilisé intentionnellement des armes à feu contre des manifestants non armés qui ne représentaient aucune menace mortelle ". L'ONG Human Rights Watch a affirmé mercredi que le pouvoir avait " dissimulé délibérément " le bilan des morts et des arrestations dans la répression des rassemblements qui ont gagné des dizaines de villes et duré plusieurs jours. Des témoignages recueillis par Le Monde ont confirmé la violence de la réaction des services de sécurité. Un manifestant a ainsi décrit, depuis une ville majoritairement kurde de l'ouest du pays, trois jours de tirs continus à partir du 15 novembre et le déploiement, en plus des forces de police, de bassiji(" volontaires ") - milices islamiques -, ainsi que des gardiens de la révolution, épine dorsale sécuritaire du régime.
Grave crise économique Les autorités répètent que la contestation, au cours de laquelle des stations-service, des commissariats, des mosquées et des bâtiments publics ont été incendiés ou attaqués, est le résultat d'un " complot " ourdi à l'étranger. L'Iran est en proie à une grave crise économique, aggravée par le rétablissement et le durcissement de sanctions économiques par les Etats-Unis depuis 2018. L'essence est extrêmement subventionnée en Iran et le gouvernement a annoncé que les recettes provenant de la hausse du prix à la pompe (50 % sur les soixante premiers litres mensuels, prix triplé ensuite) seraient intégralement reversées aux ménages les moins favorisés.