Chaque nation à travers le monde a encore en mémoire la crise alimentaire de 2008 et les émeutes sociales qui l'ont accompagnée révélant pour nombre de pays, une fragilité structurelle porteuse de risques systématiques majeurs qui font de la souveraineté et de la sécurité alimentaire un enjeu central de la gouvernance .Tout ceci justifie une réflexion sur les stratégies agricole et alimentaires envisagées pour les Etats. Droit à l'alimentation et à la production La souveraineté alimentaire, concept créé et porté par le mouvement paysan international " La Via Campesina, peut être entendue comme " le droit des populations, des communautés et des pays à définir leur propre stratégie alimentaire, agricole, territoriale ainsi que de travail lesquelles doivent être écologiquement, socialement, économiquement et culturellement adaptées à chaque spécificité. La souveraineté alimentaire inclut un véritable droit à l'alimentation et à la production alimentaire, ce qui signifie que toutes les populations ont droit à une alimentation saine, culturellement et nutritionnellement appropriée, ainsi qu'à des ressources de production alimentaire et à la capacité de leur survie et celle de leur société ". Selon la terminologie préconisée par le Conseil de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), la sécurité alimentaire, par contre, renvoie à la " possibilité physique, sociale et économique pour tous les êtres humains, à tout moment, de se procurer une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins et préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. La sécurité alimentaire peut se décliner à différents niveaux, individuel ou collectif. Elle peut affecter un ménage, une communauté ou un groupe de population, une région, un pays. Ainsi, si elle existe à l'un des niveaux elle n'existe pas nécessairement aux autres. Un pays en situation d'insécurité alimentaire peut compter des groupes de population dont les besoins alimentaires sont satisfaits . Et à l'inverse, un pays en situation de sécurité alimentaire peut compter des catégories sociales dont les besoins ne sont pas satisfaits. Si les deux notions sont complémentaires, la souveraineté alimentaire revêt, quant à elle, un contenu plus politique, reprenant notamment l'idée d'un droit à l'alimentation, et le droit pour tout pays de mettre en place les politiques agricoles les mieux adaptées aux besoins de sa population. Plus particulièrement, aux yeux de ses initiateurs, la notion de souveraineté alimentaire a également pour objet " de favoriser le retour à une agriculture de proximité destinées en priorité à alimenter les marchés locaux, régionaux et nationaux .Selon la mouvance altermondialiste, l'agriculture de proximité offre de surcroît une plus grande efficacité économique, sociale et environnementale que l'agriculture industrielle et les plantations à grande échelle ".
Le secteur agricole national et son contexte L'Algérie se caractérise par une grande diversité agro-écologique et par d'abondantes ressources naturelles, dont l'exploitation judicieuse pourrait contribuer à la transformation de son agriculture. C'est un territoire, où se côtoient les quatre régions du pays, chacune avec sa propre spécificité économique permettant de générer une gamme variée de produits agricoles et d'emplois. Malheureusement, l'évolution du secteur agricole, a montré, notamment, une insuffisance de la production, un accroissement des importations de produits alimentaires et de facteurs de production et une incapacité du secteur à contribuer correctement à l'accumulation au profit de l'économie nationale. A beaucoup d'égards, il s'agit d'une agriculture peu modernisée. Un risque majeur à prendre au sérieux à travers une nouvelle politique en matière de développement à moyen et long termes et d'accorder la priorité nécessaire et indispensable au développement de ce secteur qui doit donc plus que jamais être orienté en vue d'améliorer ses résultats en matière de productivité et de production et de participer au développement de l'économie nationale. Cette mission s'avère impérative et urgente sachant que : il faut, obligatoirement, fournir à une population plus nombreuse et plus exigeante des produits agricoles en quantité et qualité suffisantes, la dépendance alimentaire chronique du pays risque d'hypothéquer la décision politique nationale, les ressources en devises provenant des exportations des hydrocarbures sont en diminution et appelées à être de plus de plus réduites. Dans ces conditions, les objectifs d'un développement accéléré ne peuvent être atteints que par la promotion et le renforcement d'une agriculture moderne impliquant que lui soit accordée une priorité indiscutable dans la réalisation et le suivi des investissements nécessaires à moyen et long termes. Aussi, l'action à projeter doit viser à réduire, puis à supprimer les facteurs de vulnérabilité et de fragilité de l'agriculture.
Une agriculture arriérée Un tel objectif suppose indubitablement.la création de conditions fondamentales, indispensables à la valorisation des potentialités agricoles. En effet, l'évaluation de la situation de ce secteur confirme également certaines caractéristiques défavorables et auxquelles il faut remédier par des actions immédiates et de longue durée dans le cadre des plans de développement et de modernisation. Deux décennies de politique de développement n'ont pas supprimé les faiblesses structurelles d'une agriculture arriérée. En dépit de quelques progrès, le secteur n'arrive pas à assurer la satisfaction des besoins essentiels de la population et de l'économie nationale et n'a pas rempli la fonction d'accumulation dans le développement national. Confrontée aux besoins d'une population croissante, limitée par les aléas climatiques et des déperditions de ressources, concurrencée à divers titres par les autres secteurs d'activité, soumise à un appareil technico-administratif fluctuant et bureaucratique contraignant, l'agriculture apparaît comme un secteur malade. Ainsi, la faiblesse de la production agricole par rapport aux besoins de la population et des secteurs économiques est encore plus manifeste eu égard aux réelles potentialités du secteur. Le capital productif (personnel ; terres, exploitations, cheptel) n'a pas été valorisé correctement. Les terres agricoles n'ont pas bénéficié dans l'ensemble d'actions de bonification et d'amendement organique qui auraient pu améliorer le taux de fertilité des sols et par conséquent les rendements des diverses cultures.
L'autosuffisance alimentaire retardée Diverses contraintes, tant internes qu'externes, concurrent ainsi à retarder l'autosuffisance alimentaire du pays, parmi lesquelles le désinvestissement de 'Etat du secteur agricole, l'orientation vers la culture de rente au détriment des cultures vivrières, avec comme conséquence l'amplification de l'exode rural ; l'urbanisation croissante accompagnée par l'adoption de nouvelles habitudes alimentaires orientées pour les plus aisés vers les produits d'importation au détriment des filières vivrières locales.
Une nouvelle stratégie s'impose Pour s'y faire, une nouvelle stratégie s'impose et reposant essentiellement sur la promotion et le développement de l'investissement privé en tant que locomotive du secteur agricole dans le cadre du partenariat public-privé, des partenaires du secteur privé pour un développement renforcé des filières agricoles stratégiques à l'image des céréales, du lait, des fourrages, des semences et des viandes. Aussi sur une irrigation par des systèmes à économie d'eau, la modernisation des exploitations agricoles, peut-être même de revoir leur statut et leur mode de fonctionnement en visant plus l'intégration de l'agriculture industrielle dans le tissu économique productive. D'où la nécessité de déployer davantage d'efforts et de mobilisation de tous les acteurs du secteur (Fellahs-producteurs-éleveurs et autres opérateurs économiques). Il s'agit du même coup de faire dans la réduction de la facture des importations alimentaires par l'augmentation et l'amélioration de la production alimentaire gage de la sécurité alimentaire du pays. En effet, la lutte contre l'insécurité alimentaire n'a toujours pas été considérée comme une politique absolue restant un champ d'action influencé par des stratégies agricoles inopérantes et par des goulots d'étranglement structurels " crédits, semences, engrais, sécheresse, etc.).
Lier la question sociale et sécurité alimentaire Le secteur agricole a besoin dans l'immédiat d'une nouvelle orientation afin d'aller de l'avant vers de nouveaux enjeux et nouveaux paradigmes dans la finalité de développer les innovations en matière d'outils et de diversification, une volonté de spécialiser les filières, l'intensification économique et agricole et leur nécessaire diversification afin de prévenir les risques en vue de réaliser les cadres stratégiques de sécurité alimentaire : tenir mieux compte de l'effet d'entrainement que peut engendrer l'investissement du secteur privé vis-à-vis du secteur agricole et de l'économie nationale et locale. En termes d'analyses scientifiques, beaucoup reste à faire pour mieux lier la question sociale (inégalités, redistribution…) et sécurité alimentaire, comme à articuler questions foncières et sécurité alimentaire. Ainsi, la diversité des modes de régulation des systèmes alimentaires et des contradictions intrinsèques qu'elle comporte apparaissent à présent comme un préalable éclairant la prise de décision politique afin d'assurer à tout moment et à l'ensemble de la population un accès équitable, durable à une alimentation équilibrée suffisante et saine afin de contribuer à la réduction de la pauvreté, à la consolidation de la paix sociale et à la réalisation d'un développement durable et harmonieux. La problématique qui se pose pour l'Algérie c'est que plus de 50 % de ses produits sont importés de l'étranger , c'est dire ce que consomme la population au quotidien sous formes de produits finis ou produits agricoles bruts destinés à la transformation puis à la consommation alors que les prix des produits alimentaires sur le marché national sont instables et connaissent des fluctuations continues en raison des conditions du marché, ce qui pose en permanence un problème de continuité de la disponibilité alimentaire à des prix abordables par les petites bourses, et par voie de conséquence un pas à atteindre l'autosuffisance alimentaire.