L'Espagne appelle à l'adhésion pleine et entière de l'Etat de Palestine à l'ONU    Le charme turc sublime la 3e soirée du Festival du Malouf à Constantine    Le président de la République reçoit l'archevêque d'Alger    Nasri passe en revue avec l'ambassadeur malaisien l'état des relations profondes entre les deux pays    Baddari affirme depuis Tissemsilt que l'Université algérienne est le cœur battant du développement    APN: deux ateliers de formation au profit des députés sur l'investissement et la communication numérique    ONU: l'Algérie salue la tenue de la Conférence sur la solution à deux Etats issue d'un consensus international authentique    Foot/ Coupe arabe Fifa 2025 (préparation) : Algérie- Palestine en amical les 9 et 13 octobre à Annaba    Football: Rabehi préside une cérémonie de distinction des clubs algérois sacrés pour la saison 2024-2025    Génocide à Ghaza: manifestations, grèves et blocages dans plusieurs villes d'Italie    Rentrée universitaire 2025-2026 : renforcement de l'offre pédagogique dans les wilayas de l'Ouest et du Sud-Ouest du pays    Mouloudji souligne à Mostaganem l'importance du programme de la famille productive    Le ministre de la Communication en visite de travail et d'inspection dans nombre d'établissements relevant du secteur    Bande dessinée: 16 pays au 17e Fibda, l'Egypte à l'honneur    Tébessa : le ministre des Moudjahidine préside la commémoration du 70e anniversaire de la grande bataille d'El Djorf    Deux ministères pour mettre en œuvre les sept axes de la stratégie énergétique de l'Algérie    Athlétisme : Djamel Sedjati marque les esprits    L'Algérie reprend sa place et confirme sa voie en athlétisme et en gymnastique    Défaite de la sélection algérienne face au Sénégal    Les armes du Hezbollah et les leçons à tirer de la Syrie, de l'OLP et de l'Algérie    Des dizaines de colons prennent d'assaut Al-Aqsa    212 112 élèves sur les bancs de l'école avec un dispositif sécuritaire renforcé    La veuve de l'ex-gendarme et ses 4 filles dorment dans un dortoir collectif privé    L'opération solidarité scolaire élargie    L'occupation prend d'assaut l'Université de Birzeit, agresse les gardes de l'université et saisit les biens de l'université    Nouveaux horaires de travail dans les établissements postaux    Rezig préside une réunion d'évaluation    Célébration vivante d'un patrimoine musical    Duo posthume Whitney Houston-Callum Scott    L'Algérie, la Chine et la Russie au troisième soir    Chargé par le président de la République, le Premier ministre effectue une visite de travail dans la wilaya de Jijel    La reconnaissance de la Palestine par le Royaume-Uni, le Canada et l'Australie saluée    Baddari supervise la cérémonie d'ouverture de la nouvelle année universitaire    Tirer les leçons des expériences passées    Aït Messaoudene au chevet des victimes après une attaque de chien mortelle    Ali Badaoui en mission de reconnaissance en Chine    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Fraîcheurs kabyles
«Imaqar» de Rachid Mokhtari
Publié dans Le Midi Libre le 21 - 12 - 2007

Lire ce second roman de Rachid Mokhtari c'est se perdre dans les profondeurs du pays kabyle. Dans les méandres de l'âme complexe des villages haut perchés, lieux de combats immémoriaux. Tout y est.
Lire ce second roman de Rachid Mokhtari c'est se perdre dans les profondeurs du pays kabyle. Dans les méandres de l'âme complexe des villages haut perchés, lieux de combats immémoriaux. Tout y est.
L‘ambiance bucolique est décrite avec une plume nostalgique qui restitue un regard d‘enfant sur la luminosité des monts et rivières. Le roman fleure bon les rivages méditerranéens de vie et d‘ivresse. Et puis, c‘est soudain la Méditerranée noire, celle des tragédies et des coups fourrés, des maffias et vendettas. L‘Afrique aussi, avec l‘imaginaire débridé des contes. C‘est l‘Algérie tout court, celle des lendemains douteux du prestigieux Novembre. L‘Algérie des justes piétinés et des idéaux trahis mais encore féconde. Allégorique, le roman puise à pleines mains dans l‘esprit des fables que l‘on conte aux nuits d‘hiver. Pétri d‘humour, il restitue cette verve des villes et villages qui se gaussent de tout et de tous. D‘une actualité quasi journalistique, il met en scène les mouvements anti-hogra des jeunes qui embrasent sporadiquement jusqu‘aux régions les plus reculés du pays. Des jeunes et aussi de vieux, très vieux militants, s‘y donnent la main pour conjurer la malédiction qui semble s‘abattre sur un village au nom sonore d‘Imaqar (dérivé du mot grenouilles).
Dans un endroit vert et humide de la montagne, les villageois ont bâti leur lieu de vie en en délogeant les premiers habitants : les crapauds, grenouilles et autres batraciens qui y pullulaient.
Un jour, Anar n‘Boudrar la place centrale du village est en émoi.
Dans un tumulte de galopades et de cris d‘enfants une ambulance venue de la grande ville, livre un cercueil plombé qui contient un mort du nom mystérieux de Gérard Saïd. C‘est «Le Vieux», un prestigieux personnage du village qui en accuse réception. Présumé né en 1902 à Imaqar et décédé en 1990 à Paris, le défunt inconnu devient très vite le centre des préoccupations de tous. Les membres de l‘assemblée n‘autorise ni son inhumation au cimetière ancestral ni sa mise à l‘abri des intempéries dans une petite pièce de la djemaâ. Il est entreposé près du dépotoir du village. Mais Le Vieux, célèbre érudit qui a fui la grande ville pour finir sa vie dans la sérénité des champs le soustrait à l‘opprobre des ordures pour l‘abriter dans une hutte située sur son bout de terre. Accompagné d‘un autre personnage solitaire, «Le chauffeur de la camionnette», et d‘un jeune journaliste, Le Vieux remue ciel et terre pour découvrir qui est l‘énigmatique macchabée dont il a hérité. Après bien des péripéties, l‘identité du mort est établie, il s‘agit bien d‘un fils d‘Imaqar. Commencent alors de lourds complots pilotés par le président de l‘APC d‘une part, et les autorités de wilaya, d‘autre part, pour s‘approprier l‘immense fortune du mort en lui établissant de fausses filiations. Entre-temps, la malédiction suit son cours et le village doit faire face à la revanche des batraciens qui menacent de détruire le village à la manière d‘une éruption volcanique. Le vieux, aidé par ses amis sort le village de cette impasse en traçant une véritable stratégie de combat contre les immondes bestioles à pustules.
Ayant gagné la confiance des villageois, il a tout leur soutien dans ses investigations pour rétablir l‘identité du mort.
Ce roman émouvant recèle des pages désopilantes qui font rire à gorge déployée. Notamment lorsque les vieux héros du mouvement de libération nationale décident de faire une marche dans la capitale pensant ne pas être réprimés. Quelle n‘est pas leur déconfiture lorsque la matraque anti-émeutes s‘abat sans états d‘âme sur leurs vieux os ! C‘est en ramassant leurs dentiers brisés et leurs carcasses endolories qu‘ils se jurent de ne plus jamais recommencer cet acte de bravoure.
Les obsèques de Gérard Saïd qui clôturent le roman constituent un moment de grande intensité émotionnelle. La plus vieille tombe du cimetière est rouverte pour l‘accueillir. Gérard est enterré au milieu des psaumes millénaires et de ses ancêtres des Aït Lakhart (la tribu de l‘au-delà) enveloppés de leurs burnous immaculés.
Plus tard, le Vieux surprend le chauffeur de la camionnette en larmes sur la tombe de défunt. «Je n‘ai pas connu mon père. Il est tombé au maquis quand ma mère m‘allaitait. Je n‘ai de lui ni odeur, ni parole, ni nom. Où est-il ? Ma grand-mère m‘a dit qu‘il était parti me rapporter des oiseaux du djebel Ouaq Ouaq pendant que les glands éclataient dans le brasero afin que nous puissions les manger chauds avant de dormir. …» Le Vieux le prend alors par la main comme pour une tardive mais nécessaire adoption.
Rachid Mokhtari qui a signé six essais artistiques et un roman expérimente avec Imaqar une synthèse de différents genres et s‘en sort honorablement. Le fantastique des fables y avoisine la rigueur des articles de presse. Différentes époques y sont également abordées, faisant faire au lecteur un va-et-vient incessant entre le passé colonial et le présent des servitudes. La lutte des ancêtres, celles des aïeux et les mouvement émeutiers de la jeunesse d‘aujourd‘hui. Le tout baigne dans une fraîcheur et une luminosité qui rendent l‘œuvre agréable à lire. Le roman pèche cependant, par une inégalité dans la qualité de l‘écriture de ses différentes parties. Un certain manque de finition déjà décelable pour ‘‘Elégie du froid‘‘, son roman précédent publié en 2004. Quelques faiblesses que le lecteur ne peut que souhaiter voir dépassées lors d‘éventuelles œuvres à venir.
«Imaqar» de Rachid Mokhtari
Alger, Chihab éditions, 2007, 239 pages ; prix public : 450 dinars.
L‘ambiance bucolique est décrite avec une plume nostalgique qui restitue un regard d‘enfant sur la luminosité des monts et rivières. Le roman fleure bon les rivages méditerranéens de vie et d‘ivresse. Et puis, c‘est soudain la Méditerranée noire, celle des tragédies et des coups fourrés, des maffias et vendettas. L‘Afrique aussi, avec l‘imaginaire débridé des contes. C‘est l‘Algérie tout court, celle des lendemains douteux du prestigieux Novembre. L‘Algérie des justes piétinés et des idéaux trahis mais encore féconde. Allégorique, le roman puise à pleines mains dans l‘esprit des fables que l‘on conte aux nuits d‘hiver. Pétri d‘humour, il restitue cette verve des villes et villages qui se gaussent de tout et de tous. D‘une actualité quasi journalistique, il met en scène les mouvements anti-hogra des jeunes qui embrasent sporadiquement jusqu‘aux régions les plus reculés du pays. Des jeunes et aussi de vieux, très vieux militants, s‘y donnent la main pour conjurer la malédiction qui semble s‘abattre sur un village au nom sonore d‘Imaqar (dérivé du mot grenouilles).
Dans un endroit vert et humide de la montagne, les villageois ont bâti leur lieu de vie en en délogeant les premiers habitants : les crapauds, grenouilles et autres batraciens qui y pullulaient.
Un jour, Anar n‘Boudrar la place centrale du village est en émoi.
Dans un tumulte de galopades et de cris d‘enfants une ambulance venue de la grande ville, livre un cercueil plombé qui contient un mort du nom mystérieux de Gérard Saïd. C‘est «Le Vieux», un prestigieux personnage du village qui en accuse réception. Présumé né en 1902 à Imaqar et décédé en 1990 à Paris, le défunt inconnu devient très vite le centre des préoccupations de tous. Les membres de l‘assemblée n‘autorise ni son inhumation au cimetière ancestral ni sa mise à l‘abri des intempéries dans une petite pièce de la djemaâ. Il est entreposé près du dépotoir du village. Mais Le Vieux, célèbre érudit qui a fui la grande ville pour finir sa vie dans la sérénité des champs le soustrait à l‘opprobre des ordures pour l‘abriter dans une hutte située sur son bout de terre. Accompagné d‘un autre personnage solitaire, «Le chauffeur de la camionnette», et d‘un jeune journaliste, Le Vieux remue ciel et terre pour découvrir qui est l‘énigmatique macchabée dont il a hérité. Après bien des péripéties, l‘identité du mort est établie, il s‘agit bien d‘un fils d‘Imaqar. Commencent alors de lourds complots pilotés par le président de l‘APC d‘une part, et les autorités de wilaya, d‘autre part, pour s‘approprier l‘immense fortune du mort en lui établissant de fausses filiations. Entre-temps, la malédiction suit son cours et le village doit faire face à la revanche des batraciens qui menacent de détruire le village à la manière d‘une éruption volcanique. Le vieux, aidé par ses amis sort le village de cette impasse en traçant une véritable stratégie de combat contre les immondes bestioles à pustules.
Ayant gagné la confiance des villageois, il a tout leur soutien dans ses investigations pour rétablir l‘identité du mort.
Ce roman émouvant recèle des pages désopilantes qui font rire à gorge déployée. Notamment lorsque les vieux héros du mouvement de libération nationale décident de faire une marche dans la capitale pensant ne pas être réprimés. Quelle n‘est pas leur déconfiture lorsque la matraque anti-émeutes s‘abat sans états d‘âme sur leurs vieux os ! C‘est en ramassant leurs dentiers brisés et leurs carcasses endolories qu‘ils se jurent de ne plus jamais recommencer cet acte de bravoure.
Les obsèques de Gérard Saïd qui clôturent le roman constituent un moment de grande intensité émotionnelle. La plus vieille tombe du cimetière est rouverte pour l‘accueillir. Gérard est enterré au milieu des psaumes millénaires et de ses ancêtres des Aït Lakhart (la tribu de l‘au-delà) enveloppés de leurs burnous immaculés.
Plus tard, le Vieux surprend le chauffeur de la camionnette en larmes sur la tombe de défunt. «Je n‘ai pas connu mon père. Il est tombé au maquis quand ma mère m‘allaitait. Je n‘ai de lui ni odeur, ni parole, ni nom. Où est-il ? Ma grand-mère m‘a dit qu‘il était parti me rapporter des oiseaux du djebel Ouaq Ouaq pendant que les glands éclataient dans le brasero afin que nous puissions les manger chauds avant de dormir. …» Le Vieux le prend alors par la main comme pour une tardive mais nécessaire adoption.
Rachid Mokhtari qui a signé six essais artistiques et un roman expérimente avec Imaqar une synthèse de différents genres et s‘en sort honorablement. Le fantastique des fables y avoisine la rigueur des articles de presse. Différentes époques y sont également abordées, faisant faire au lecteur un va-et-vient incessant entre le passé colonial et le présent des servitudes. La lutte des ancêtres, celles des aïeux et les mouvement émeutiers de la jeunesse d‘aujourd‘hui. Le tout baigne dans une fraîcheur et une luminosité qui rendent l‘œuvre agréable à lire. Le roman pèche cependant, par une inégalité dans la qualité de l‘écriture de ses différentes parties. Un certain manque de finition déjà décelable pour ‘‘Elégie du froid‘‘, son roman précédent publié en 2004. Quelques faiblesses que le lecteur ne peut que souhaiter voir dépassées lors d‘éventuelles œuvres à venir.
«Imaqar» de Rachid Mokhtari
Alger, Chihab éditions, 2007, 239 pages ; prix public : 450 dinars.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.