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Le jihadisme des uns et le jihadisme des autres
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 12 - 04 - 2012


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(pour Le monde diplomatique, édition arabe)
Il y a dix-sept ans déjà, l'explosion d'une bombe dans la station Saint Michel du métro parisien avait confronté la France à la violence terroriste. Devant l' unilatéralisme des réactions médiatiques et politiques, j'avais éprouvé le besoin de rappeler, dans les interstices du discours dominant, que plus encore que le poseur de bombes, qu'il fallait traquer sans relâche, il convenait de démanteler la machine sociale et politique qui fabriquait de si terribles individus (« La recette du poseur de bombes » (http://algeria-watch.de/farticle/Burgat2.htm).
Depuis que l'identité de Mohamed Merah est connue, une étrange sensation de déjà vu s'installe. Sur des plateaux de télévisions qui penchent massivement dans le même sens, la cohorte des experts auto-proclamés du terrorisme et de la culture (« salafiste ») de « l'autre » égrènent une litanie culturaliste qui, curieusement, épargne un immense non dit. Pour décrypter les ressorts de la radicalisation de quelques dizaines de citoyens de confession musulmane (dans des circonstances troublantes qui restent à déterminer), ils s'avèrent incapables de mobiliser d'autre hypothèse que celle de l'instrumentalisation criminelle d'un dogme musulman jugé au demeurant déjà plus ou moins suspect en temps normal. Experts criminologues et néo-orientalistes spécialistes des « maladies de l'autre » tournent ainsi en rond, sans jamais l'aborder, autour d'un formidable indicible qui tient pourtant en peu de mots : une part au moins de la responsabilité des actes inqualifiables de Mohamed Merah repose sur les épaules de la société qui l'a fabriqué.
Pour prémunir les Français de tels traumatismes, tout devrait donc urgemment les inciter à identifier les ingrédients de la recette qui a nourri une si funeste radicalisation. Or ces ingrédients ne se trouvent pas, tant s'en faut, dans les seules erreurs d'interprétation du livre saint des Musulmans. Qui veut quitter quelques instants le confort de l'inusable référence au « salafisme » de Merah s'aperçoit bien vite qu'ils ont bien davantage à voir avec le profond déficit de représentation d'une large partie de la communauté musulmane. Exacerbé par les réactions populistes aux questions du voile, des caricatures, des lieux de prière ou des rites alimentaires et par l'exploitation électoraliste qui en est faite, déni de représentation et dualisme de traitement des Musulmans de France sont particulièrement flagrants sur le terrain de la politique que mènent leur pays dans le monde musulman. Alors que les solidarités transnationales militantes sont permises aux uns, elles se révèlent parfaitement interdites aux autres. Exemple particulièrement emblématique : un citoyen français peut aujourd'hui en toute légalité républicaine partir endosser l'uniforme de l'armée israélienne et, dans des territoires palestiniens dont le droit international certifie pourtant qu'ils sont occupés parfaitement illégalement, déchirer de ses balles, en toute impunité, la chair de ceux que, sur leur terre, révolte la violence de cette occupation. Tel autre citoyen tout aussi français décide-t-il en revanche de prendre – autrement que par des mots – la défense de ceux-là, ou encore, de l'Irak à l'Afghanistan, celle de ses coreligionnaires musulmans qui se font massacrer dans des guerres dont la légitimité est plus que douteuse ? Celui-là, la fatwa de la « légalité républicaine » hexagonale le guette : voici un « Fou d'Allah », voici un « Jihadiste » ! Soutien complaisant, jusqu'à une date très récente, à des dictateurs répressifs unanimement rejetés, soutien plus aveugle encore au bellicisme de l'Etat hébreu, engagement militaire en Afghanistan dans une guerre dont la légitimité est désormais largement contestée, les terrains sont nombreux sur lesquels l'avis, pourtant avisé, ou l'action d'une large partie des musulmans de France ne dispose en fait d'aucun espace d'expression légal. Sur nos plateaux de télévision, comme sur la une de nos hebdomadaires, toutes tendances politiques confondues, dès lors que culture ou société musulmanes croisent la route de l'actualité, le pluralisme a de longue date cédé la place au règne de la voix du plus fort et de ses innombrables affidés. Et le « jihadisme des uns », voir leur penchant avéré à puiser eux aussi dans la théologie la justification de leur bellicisme, ne mobilisent ainsi jamais la même réprobation que le « jihadisme des autres ». Certains politiciens, incapables d'aller les chercher ailleurs, soufflent au contraire sur la braise des peurs populaires à la recherche des voix que la crédibilité de leur programme social leur interdit de mobiliser. Les conséquences de cette contre-performance manifeste des institutions représentatives et des medias, rarement soulignées en tant que telles, sont à terme extrêmement lourdes : le fait que la table du « vivre ensemble » français ait un pied musulman plus court que les autres nuit gravement à l'équilibre général. Les sociétés où la souffrance, les vécus, la voix, l'histoire, l'humanité des uns ne pèse pas autant que ceux des autres, les sociétés où la violence des uns ne suscite pas la même émotion ou la même réprobation que celle des autres, fabriquent inévitablement des individus du type de Merah. Ceux-là sont tentés d'emprunter le raccourci d'une contre-violence aussi aveugle que celle dont ils estiment que les leurs sont victimes. Ils tueront les symboles de l'institution militaire par laquelle, à leurs yeux, l'injustice et la souffrance sont exportées en Afghanistan. Ils tueront des enfants pour en venger d'autres, tout aussi innocents, empruntant sa folie meurtrière à Robert Bales, l'assassin américain des enfants afghans, histoire à leurs yeux de rétablir l'équilibre de la souffrance que l'Etat leur paraît échouer à préserver.
La réponse de la République a pris la forme d'un contrôle accru des espaces où s'exprime les cyber protestations. En réduisant un peu plus encore l'expression de la contestation, elle de toute évidence aggraver la crise qu'elle dit vouloir résorber. « J'ai un ordinateur et une épée » a sans surprise commenté l'un des adeptes de ces sites qu'il sera bientôt interdit de fréquenter. « Que celui qui veut me retirer mon PC ne vienne pas se plaindre demain qu'il ne m'a laissé que l'épée ».
Dans les interstices étroits de la dérive sécuritaire et électoraliste dans laquelle s'enfonce la République, des remèdes de fond doivent être trouvés pour rétablir le socle français du vivre ensemble. De Toulouse à Gaza, il en va non seulement de la survie de nos principes mais tout autant de celle de nos enfants.
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PS L'affaire du Métro St Michel a depuis lors livré ses secrets, qui n'ont malheureusement que très parcimonieusement été rendus publics. On sait aujourd'hui avec certitude que ce sont les services algériens, alors en pleine coopération avec tous ceux qui, en France, les aidaient activement à éradiquer le parti vainqueur des urnes législatives de décembre 1990, qui étaient les donneurs d'ordre de la machine de mort.


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