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L'homme qui traque les criminels de guerre
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 10 - 09 - 2012


letemps.ch 10/09/2012
Les affaires Nezzar et Sperisen ont remis TRIAL et son directeur, Philip Grant, sur le devant de la scène. L'avocat militant raconte son parcours.
«Je dois en fait beaucoup à Pinochet!» Voilà comment Philip Grant démarre le récit de son infatigable lutte contre l'impunité des criminels de guerre. Œil espiègle et fossette au menton, l'avocat dirige l'organisation TRIAL (pour Track Impunity Always) depuis 2002. Deux affaires l'ont récemment remis sur le devant de la scène. L'arrestation à Genève de Khaled Nezzar, ex-ministre de la Défense algérien accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis entre 1992 et 1999, et dont le Tribunal pénal fédéral a refusé fin juillet de reconnaître l'immunité. Et, le 31 août dernier, celle d'Erwin Sperisen, ancien chef de la police guatémaltèque. Incarcéré à Champ-Dollon, le binational est prévenu de douze assassinats.
Mais au départ, donc, il y avait Augusto Pinochet. «En 1995, des rumeurs laissaient entendre que l'ex-dictateur et commandant en chef de l'armée chilienne allait venir en Suisse pour s'acheter des armes à Lucerne. Beaucoup trouvaient qu'il fallait tout faire pour éviter cela. Ma position était au contraire de dire qu'il fallait lui dérouler le tapis rouge pour mieux lui passer les menottes ensuite!» raconte Philip Grant, en sirotant un jus de pomme dans le petit restaurant de la Maison des Associations qui abrite TRIAL.
C'est finalement ce qui s'est passé, quelques années plus tard, en novembre 1998: l'ex-chef d'Etat a été arrêté à Londres, à la suite d'une plainte internationale déposée en Espagne pour «génocide, terrorisme et tortures». A partir de ce moment-là, la justice internationale «a enfin commencé à bouger, après presque 50 ans d'inertie». La lutte contre l'impunité des tortionnaires s'est matérialisée à travers la constitution de tribunaux internationaux, puis, en 2002, de la Cour pénale internationale (CPI). L'intérêt de Philip Grant, et sa volonté de se mettre au service des victimes de génocides, crimes contre l'humanité, crimes de guerre, tortures et disparitions forcées, n'a fait que croître.
Adolescent déjà, l'avocat, qui a un temps été conseiller municipal, sous les couleurs socialistes, était très porté sur la défense des droits de l'homme. Avant TRIAL, il a fondé d'autres organisations. Comme les «Jeunes contre le racisme». Ou la Permanence service civil, en 1994. TRIAL est née en 2002, année de la création de la CPI. La structure était au départ assez «artisanale», avoue Philip Grant. Aujourd'hui l'ONG, qui lutte contre «l'impunité des responsables, complices et instigateurs des crimes les plus graves», compte une vingtaine de collaborateurs. Presque tous des juristes, sauf des militants locaux qui travaillent en Bosnie et au Népal. Mais aussi dans un troisième pays qu'il préfère ne pas nommer: «trop délicat».
Philip Grant se consacre entièrement à TRIAL depuis 2009. Ce passionné d'histoire de 41 ans, de père écossais et de mère valaisanne, a beaucoup bourlingué dans sa jeunesse grâce au métier de son père: il a vécu à Chicago, Paris, Hongkong... Il avoue avoir aujourd'hui trop peu de temps libre pour sa famille. Et pour son télescope: il adore regarder les étoiles. «Nous avons des dossiers qui parfois s'accélèrent très vite. Il faut toujours être prêt à agir...»
Le premier gros dossier de TRIAL concernait, en 2003, Habib Ammar, ex-ministre de l'Intérieur tunisien, venu à Genève pour l'organisation du Sommet de l'information. Il était accusé de tortures. «Nous avons déposé plainte au nom d'une victime, mais le procureur genevois de l'époque, Daniel Zappelli, l'a très rapidement classée.» L'ex-ministre en question a pu repartir chez lui, mais il a perdu son travail. En 2001, l'avocat François Membrez, un ami de Philip Grant devenu ensuite vice-président de TRIAL, avait déjà porté plainte contre un autre ministre de l'Intérieur tunisien, qui se faisait soigner aux HUG. Le prédécesseur de Daniel Zappelli, Bernard Bertossa, avait pris l'alerte au sérieux et envoyé la police le cueillir. Mais le Tunisien, averti, avait déjà pris la fuite.
Philip Grant se défend de jouer au valeureux justicier: «Des dispositions légales existent pour punir les auteurs de ces crimes ignobles, et notre but comme juristes est de s'assurer qu'elles soient appliquées à la lettre.» Depuis le 1er janvier 2011, l'arsenal juridique a été renforcé. Le Ministère public de la Confédération est désormais tenu de rechercher activement les personnes suspectées d'avoir commis de tels crimes présentes sur son territoire.
L'affaire Nezzar? Philip Grant jubile. La décision du TPF, qui n'a pas reconnu son immunité, est «historique» et ouvre la porte à un procès pour crimes de guerre en Suisse. «A l'avenir, les bourreaux ne pourront plus se cacher derrière leur fonction officielle pour commettre des atrocités. C'est réjouissant», commente l'avocat. Concernant l'affaire Sperisen, TRIAL n'a pas été l'élément déclencheur: d'autres ONG ont au départ donné l'alerte. «Mais TRIAL a repris le dossier en main dès 2009», s'empresse-t-il de dire. «Nous n'avons par contre pas accès au dossier du Ministère public.»
L'avocat tient à le rappeler: ce type d'affaire pénale contre de gros poissons qui vivent ou sont de passage en Suisse n'est pas courant. TRIAL a déposé douze dénonciations pénales en dix ans. L'ONG consacre donc la majeure partie de ses activités à assister des victimes qui se retournent contre un Etat pour des demandes en réparation. «Lorsque les recours à un tribunal national sont épuisés, nous pouvons lancer des procédures auprès d'instances internationales en matière de droits de l'homme, comme la Cour européenne de Strasbourg, et la CPI», précise-t-il. «Avec l'espoir que les décisions fassent jurisprudence.»
Il donne l'exemple de la Bosnie. En 2006, il constate lors d'une mission dans le pays que l'aide juridique aux victimes est inexistante. Avec son équipe et son réseau, il y remédie. Aujourd'hui, TRIAL a plus de 130 procédures en cours contre la Bosnie, l'Algérie, le Burundi, la Libye et le Népal. Et même une contre la Suisse.
Malgré son travail sensible, Philip Grant assure ne jamais avoir subi de pressions. «En revanche, j'évite d'aller dans certains pays en vacances», glisse-t-il en souriant. En ce moment, c'est bien l'Algérie qu'il doit mettre de côté. Son nouveau cheval de bataille? Viser la responsabilité des entreprises, comme celles qui vendent des armes ou importent des matières premières de zones en conflit.
On ne peut s'empêcher de revenir sur les criminels de guerre. TRIAL a actuellement quatre auteurs de crimes de guerre qui vivraient en Suisse dans le collimateur, nous confie Philip Grant, après avoir compté sur ses doigts. Il n'en dira pas plus. Il évoque juste le cas d'un Irakien dans le canton de Vaud, qui travaillait pour les services de sécurité d'Oudaï, fils de Saddam Hussein. Accusé de tortures, il n'a pas obtenu l'asile mais l'admission provisoire, car il risquerait d'être exécuté en cas de renvoi. «Il vit pour l'instant sans être inquiété. Mais nous surveillons le dossier.»


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