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Le jour d'après, révolutions et révolution
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 20 - 02 - 2013


Révolutions ou peuples en danger ?
Globalement on peut dire qu'on a largement sous-estimé la crise économique mondiale qui constituait l'arrière-plan des soulèvements populaires actuels alors que l'on fantasmait une dimension politique et révolutionnaire. On a parlé de mouvement social, de mouvement populaire en opposition à un mouvement politique en pensant ou pas aux majorités sociales et politiques islamistes. On a ainsi dissocié le mouvement de sa direction puis s'est vite estompé l'intérêt pour l'innovation sociale quand sont venues les élections et leurs résultats. A rejailli alors la vieille opposition entre « laïcs » et islamistes, les modernistes et les obscurantistes, la liberté et l'oppression religieuse.
Avec ces mouvements populaires, des sociétés non occidentales découvraient enfin la liberté et se mettaient à ressembler à l'Occident. Et cela au moment où les privations multipliaient les Bouazizi et les incendies. Dialectique mise à part, cela ne constitue-t-il pas un véritable détournement de sens ? Après que des sociétés avec l'aide du monde aient couru dans le mur tête baissée, que les intérêts particuliers aient été incapables d'arrêter une machine suicidaire et que celle-ci ait conduit des Etats et des nations à l'explosion, on parle de révolution plutôt que de catastrophe et d'effondrement ! Oubliée la catastrophe et ses responsables, on passe à la révolution et bientôt à ses échecs, ses responsables. Il faut vite oublier les premiers pour leur substituer les seconds ! Le problème de global, de néocolonial était transformé en problème local, islamiste ! Et les acteurs locaux de s'étonner du comportement de la France : alors qu'elle discourait sur la fin de la Françafrique elle intervenait militairement au Sahel ! Pourquoi ne pas parler de révolution en Grèce ! A elle on apporte le soutien matériel aux autres on vend des illusions !
La fin de nombreux compromis
En vérité nous sommes en présence de la fin d'un certain nombre de compromis sociaux et politiques dans le monde. Il apparaît de nouvelles puissances avec lesquelles il faut faire, l'Etat providence est remis en cause au sein des anciennes puissances, de même le compromis entre ces dernières et les élites postcoloniales (importatrices d'Etat) qui cèdent leurs marchés aux nouvelles puissances, et enfin les compromis entre les élites et les sociétés postcoloniales. On peut le soutenir clairement : avec l'émergence de nouvelles puissances industrielles, la crise du fordisme et la nouvelle révolution industrielle économe en main d'œuvre, nous assistons à une nouvelle répartition du pouvoir d'achat mondial. Beaucoup de sociétés ont longtemps vécu au-dessus de leurs moyens escomptant un futur semblable au passé. Elles sont aujourd'hui en crise ou en voie de l'être. Il est clair qu'en Afrique, la Chine, l'Inde et les autres pays émergents deviennent « mieux disant » que les anciennes puissances. Ce que donc les soulèvements expriment c'est la rupture de certains compromis sociaux et politiques internes et externes. C'est la rupture d'un certain ordre interne appuyé sur un autre externe. Parce que l'ancien s'est rompu, qu'il faille en inventer de nouveaux, entre soi et le reste du monde, ce sont les plus démunis devenus fort nombreux qui ont été les premiers à craquer. Continuer à parler de révolution arabe, parce que des populations non occidentales ne supportent plus un certain ordre mondial qui les a privées de la liberté et ne peut plus leur assurer le minimum vital, revient à faire une apologie de la révolte.
S'il faut parler de révolution, c'est de révolution mondiale et cela dans le but de rendre la troisième révolution technologique supportable par la planète. La révolution industrielle transforme déjà la guerre et donc le pouvoir, les frontières, les ensembles politiques. Les soulèvements éclatent dans les parties les plus faibles du monde. La façon dont le monde traite ces soulèvements préfigure la direction qu'il prend. Pour les populations des régions, il devrait être clair que la sortie de crise réside dans la construction de nouveaux compromis sociaux et politiques entre partenaires internes et externes à l'ère de cette troisième révolution industrielle qui pointe. Il faut ici avoir la modestie d'affirmer l'ampleur de la tâche et la responsabilité premières des grandes nations qui font dans la diversion et se préparent à imputer la responsabilité à des élites mineures et à des adversaires politiques traditionnels pour préparer l'investiture de nouveaux importateurs d'Etat.
Des élites, des forces légitimes et des compétences.
L'égarement des « laïcs » est patent : classe moyenne déracinée entretenue par un Etat importé, qui fonce dans l'utopie et parle de révolution, alors qu'il est question de survie politique, de celle des classes politiques, des Etats et des sociétés desquels ils relèvent ! Ils ne veulent pas voir qu'il s'agit en fait de la fin d'une époque. Après avoir échoué à construire une nation (une industrie nationale et un marché national), elles se prétendent à la hauteur du monde, en mesure de diriger leur pays à l'ère de la troisième révolution industrielle. Il faudra d'abord se remettre en cause, produire un bilan. Aussi de quelles compétences peuvent-ils se prévaloir ? De celles qui ont conduit à la crise ? Suffit-il de se convertir à la démocratie occidentale jadis dite formelle ? Elles reprochent aux fondamentalistes de vouloir reconduire le pays à l'âge de la pierre. Mais ne voient-elles pas que parce qu'elles ne font pas ce qu'elles disent, ceux qui disent ce qu'ils font ont plus de chance de réussir ?
Egarement aussi des « islamistes » qui ignorent leur degré d'occidentalisation à travers leur étatisme et qui croit que leur légitimité d'opposants en fait les héritiers d'un pouvoir en décomposition, et qui confondent de surcroît capacités organisationnelles relatives avec la capacité de transformer le pouvoir. Comme on peut le constater ces mouvements non fondamentalistes sont largement imprégnés de ce qui doit aujourd'hui être considéré comme l'utopie de l'Etat nation, au sens étymologique du terme. L'idéologie islamiste dominante partage avec l'ancien système politique occidental, la conception d'une construction par le haut de la société dont a hérité le capitalisme d'Etat de la monarchie de droit divin. De ce point de vue les frères musulmans et les salafistes sont les seules forces qui peuvent prolonger la crise et la vie de l'ancien. Voilà pourquoi on les préfère souvent aux autres forces. Parce que disposant d'une certaine légitimité du à leur opposition politique, elles seules peuvent hériter provisoirement de cet Etat nation. Dans le même temps pourra être disqualifié une propension politique locale et se poursuivre l'élimination d'un espace concurrent. Jusqu'à ce que les opposants des opposants puissent être à leur tout disqualifiés. Le temps que le monde et ses puissances dominantes puissent se restructurer et s'adapter à la mutation qui vient et servir de support à de nouveaux importateurs d'Etat. Les mouvements islamistes offrent en pratique la possibilité d'une relégitimation de l'autoritatisme à partir de la religion, une regénération à moyen terme du capitalisme d'Etat ou une perpétuation de la crise. Les exemples de l'Egypte, de la Tunisie et bientôt de l'Afghanistan sont là pour l'illustrer : relance d'un capitalisme d'Etat et/ou prolongation de la crise.
Il n'y a pas dans ses régions de forces politiques en mesure de se mettre et de mettre la société à la hauteur du monde, juste des forces en mesure de se mettre à la hauteur de la fragmentation et qui parce qu'elles seront combattues par les dites forces nationales entretiendront la guerre civile. Le Mali et la Libye peuvent être de bons exemples. Ces réelles compétences sont expatriées.
C'est pourquoi on n'entre pas en démocratie comme on entre dans un moulin. Une phase de transition est nécessaire. Ce qui ne peut être envisagé quand la baraque saute. L'épreuve de la formulation d'une Constitution accroit les divisions profondes des sociétés postcoloniales plutôt qu'elle ne les résorbe. L'anti-islamisme européen incite la société civile postcoloniale à la désobéissance des gouvernements islamistes. Tout cela incite à une entrée en démocratie en douceur avec une stratégie. Ce n'est ni à la rue, ni aux puissances extérieures d'instruire une telle entrée. Last but not least, la révolution de demain ne ressemblera pas à celle d'hier qui opposait une bourgeoisie, une aristocratie militaire et une armée industrielle du travail.
La flèche du temps
L'ère de l'Etat providence, de l'Etat nation porté par la seconde révolution industrielle s'achève. Le marché et la nation qui s'était appuyé l'un sur l'autre avec la première et la seconde révolution technologique se sépare aujourd'hui à quelques exceptions près. On peut affirmer de ce point de vue (le soutien d'une demande nationale pour répondre à l'offre) la mort de Keynes. Le nouveau monde est traversé par deux mouvements contradictoires, il se globalise et se fragmente pour former de nouvelles cohérences. Il lui faut de grands ensembles en mesure de tenir des marchés et des territoires.
D'où ces forces révolutionnaires pourraient-elles donc émerger ? De sociétés hétérogènes entretenues dans la confusion par des élites défaillantes soutenues par l'extérieur ? de pseudo-nations qui ont subi les marchés du monde ? on répète à l'envi qu'il faut du temps pour que les révolutions donnent leurs fruits et de comparer les soulèvements actuels aux anciennes révolutions ! Il faut cependant rappeler que peu de soulèvements se sont transformés en réelles révolutions. Tous n'ont pas été portés par l'histoire, beaucoup ont été égarés par l'air du temps, mais peu se sont inscrits dans la tendance générale, le sens de l'histoire ! Les soulèvements peuvent être de simples soubresauts qui accompagnent de lentes agonies. Rappelons notre histoire sur la longue durée. La flèche du temps aujourd'hui ne porte plus les armées industrielles de travailleurs et de consommateurs dont il a fallu et dont on a pu défendre les intérêts contre les différents capitalismes d'Etat pour fonder l'Etat providence.
De la fragmentation à la composition de grands ensembles.
La démarche la plus rationnelle est celle qui consisterait à accompagner le mouvement de fragmentation plutôt que celle contreproductive, à contrecourant, d'essayer de lui résister. Ainsi ce qui oppose aujourd'hui les forces nationales centripètes à celles centrifuges. Ce qui est en jeu dans ce mouvement c'est la reconstitution des élites : recyclage et conversion pacifique ou disparition violente.
Autrement dit il faut commencer par la maîtrise des territoires pour arriver à la construction de grands ensembles capables de traiter avec les marchés globalisés, de les incorporer dans le meilleur des cas ou de s'y soumettre de gré ou de force.
Les révolutions passées ne sont probablement rien face à celle qui arrive. La restructuration du monde risque d'être douloureuse avec la troisième révolution industrielle. On va probablement assister à l'effondrement de nombreux Etats du monde. Celui des Etats arabes non pétroliers préfigurent un tel mouvement. Aussi les guerriers en tous genres risquent de triompher sur de nombreux points de la planète. Il est même probable que le monde les investisse de quelque autorité. On pressent le nouvel ordre sécuritaire américain et israélien. Il risque d'émerger une économie de la sous-traitance de la violence.
Le destin africain va être à nouveau en jeu : nous n'étions pas sortis de l'Histoire, nous en avons été sortis en victimes rapidement consentantes. Il y a ceux qui préfèrent les démonstrations verbales et ceux qui préfèrent les démonstrations de force. Un nouvel épisode de cette ancienne histoire risque d'être réécrit du fait de nos divisions. Pour échapper à un tel sort, il faut retrouver le rêve panafricain des fondateurs des indépendances et le faire descendre sur terre. Certains parle de Chindiafrique[1] : comment transformer des faiblesses en forces ?
DERGUINI Arezki
20/02/2013
[1] « Chindiafrique. La Chine, l'Inde et l'Afrique feront le monde de demain », de Jean-Joseph Boillot et Stanislas Dembinski ;


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